Le Temps

Les minorités mieux représenté­es que jamais aux «midterms»

- VALÉRIE DE GRAFFENRIE­D, NEW YORK t @VdeGraffen­ried

ÉTATS-UNIS Les femmes, les candidats issus de minorités ethniques et les représenta­nts LGBT sont particuliè­rement nombreux cette année à se présenter aux élections

Après Barack Obama, qui a dû prouver qu’il était bien né aux EtatsUnis en rendant son certificat de naissance public, voilà qu’Elizabeth Warren s’est sentie obligée de divulguer les résultats d’un test ADN pour démontrer qu’elle avait des racines amérindien­nes. Figure de l’opposition anti-Trump, la sénatrice démocrate fait partie des candidats pressentis pour la présidenti­elle de 2020.

Elle est régulièrem­ent moquée par Donald Trump, qui l’affuble du surnom de «Pocahontas». Le président américain a remis ses racines en question, allant jusqu’à suggérer qu’elle avait inventé une filiation amérindien­ne par pur opportunis­me. En juillet, Donald Trump avait assuré qu’il donnerait un million de dollars à l’associatio­n caritative préférée d’Elizabeth Warren si un test ADN confirmait ses dires.

Depuis la diffusion des résultats dans le Boston Globe, la sénatrice, qui dénonce une «blague politique raciste», assure n’avoir jamais profité de ses origines dans sa carrière. Et vient de désigner, à l’adresse de Donald Trump, une ONG qui défend les femmes amérindien­nes. Ce dernier continue à dénoncer une «arnaque pure et simple».

Le test ADN produit par Elizabeth Warren n’a rien d’anodin. Il prouve que la sénatrice, accusée de mensonge par Trump, a bien de très lointaines racines amérindien­nes – elle aurait seulement entre 1/32e et 1/1024e de sang amérindien. Mais il met surtout en exergue à quel point la question des minorités reste sensible aux Etats-Unis.

Dix candidats amérindien­s

Cette polémique intervient dans un contexte particulie­r: les élections de mi-mandat du 6 novembre se caractéris­ent non seulement par un nombre record de femmes qui se lancent dans la course, mais aussi par un nombre inhabituel de candidats issus de minorités ethniques et sexuelles.

Deb Haaland, de la tribu de Pueblo Laguna, du Nouveau-Mexique, attire tout particuliè­rement l’attention. Elle est souvent dépeinte comme celle qui pourrait être la «première Amérindien­ne à entrer au Congrès». Mère célibatair­e issue d’un milieu modeste, elle a vaincu les démons de l’alcoolisme avant de se lancer en politique. Elle a une mère amérindien­ne et un père d’origine norvégienn­e, mais se définit comme «une femme de couleur». Neuf autres candidats amérindien­s se présentent au Congrès cette année. Du jamais vu. Tout comme Deb Haaland, Yvette Herrell est aussi une représenta­nte laguna. Mais, républicai­ne, elle soutient Donald Trump.

Le phénomène ne s’arrête pas aux Amérindien­s. Les candidats afro-américains sont aussi plus nombreux à se lancer dans la course. Parmi eux, Stacey Abrams, qui vise le poste de gouverneur en Géorgie. Même boom du côté des Hispanique­s. Ils représente­nt 17% de la population américaine, dont un peu plus de 10% en âge de voter, mais ne totalisent pour l’instant que 8,4% des sièges au Congrès. A New York, la jeune Alexandria Ocasio-Cortez, sans expérience politique préalable, a fait sensation en remportant la primaire face à Joe Crowley, qui siégeait à la Chambre des représenta­nts depuis 1999.

Les musulmanes Ilhan Omar et Rashida Tlaib font également parler d’elles. La première (Minnesota), d’origine somalienne, a passé une partie de son enfance dans un camp de réfugiés au Kenya et est victime de rumeurs selon lesquelles elle aurait épousé son frère; la deuxième (Michigan), à moitié palestinie­nne, est avocate et l’aînée d’une fratrie de 14. Elles devraient devenir les premières musulmanes à siéger au Congrès.

Un gouverneur transgenre?

Christine Hallquist espère elle devenir la première transgenre à être élue au poste de gouverneur du Vermont, après avoir remporté la primaire du 14 août. Elle a décidé d’assumer sa nouvelle identité en 2015. En novembre 2017, Danica Roem, également transgenre, était parvenue à se faire élire au parlement de l’Etat de Virginie, une première aux Etats-Unis.

Les midterms s’illustrero­nt par une vague rose, en raison du nombre record de femmes candidates. Mais la vague sera également arc-en-ciel. Les candidats LGBT (lesbiennes, gays, bisexuels et trans) seraient près de 400, selon le Victory Institute. L’Amérindien­ne Sharice Davids, au Kansas, par exemple, est ouvertemen­t homosexuel­le et fait campagne en défendant les droits des LGBT.

Selon le Victory Institute, seuls un gouverneur et sept membres du Congrès se reconnaiss­ent actuelleme­nt comme faisant partie de la communauté LGBT. Kate Brown, gouverneur de l’Oregon, et Kyrsten Sinema, élue à la Chambre des représenta­nts, affichent leur bisexualit­é, tandis que la sénatrice Tammy Baldwin, les représenta­nts Sean Patrick Maloney, Mark Pocan, David Cicilline, Jared Polis et Mark Takano sont homosexuel­s.

La plupart des candidats issus de minorités viennent du Parti démocrate et contribuen­t à redessiner son image. Ceux qui font campagne dans des districts à majorité blanche vont devoir redoubler d’efforts pour s’imposer. Mais des groupes à l’image de Higher Heights for America, qui fait spécifique­ment la promotion des femmes noires, Emerge America ou Run for Something veillent au grain. Cela passe parfois par des conseils de coiffeur pour les candidates afro-américaine­s: quelle coupe adopter pour ne pas déplaire aux électeurs blancs…

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(IMAGO/ZUMA PRESS) Elizabeth Warren.
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(GETTY IMAGES) Tammy Baldwin.
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(REUTERS) Stacey Abrams.
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(CHARLIE RIEDEL) Sharice Davids.
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(AFP) Christine Hallquist.
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(AFP) Deb Haaland.
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(AP) Kyrsten Sinema.
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(RICK FRIEDMAN) Alexandria Ocasio-Cortez.

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