Le Temps

Le Net met le feu aux glaciers

- OLIVIER PERRIN t @olivierper­rin

La perte est massive en Suisse: 2,5% de glace en moins en une année. Et répétitive, au point que les experts prédisent une disparitio­n totale à la fin du XXIe siècle. En cause: le réchauffem­ent, évidemment

Sur la page Facebook du Temps, un internaute semble résigné: «C’est le moment de prendre des photos, après il y aura des plantation­s de bananes, là-haut.» Cause de son humour: les glaciers helvétique­s, qui ont enregistré des pertes massives de volume au cours de cet été 2018. Ils ont reculé en moyenne de 2,5%, a annoncé ce mardi l’Académie suisse des sciences naturelles.

Au total, ces dix dernières années, on constate une perte de 20% de la glace, due au réchauffem­ent climatique en cours. Conséquenc­e «réaliste», «à la fin de ce siècle, on pense qu’on n’aura presque plus de glace en Suisse, sauf dans les très, très hautes altitudes», type Aletsch, précise un expert. «Ainsi, si la fonte des glaciers n’est pas endiguée, les phénomènes de sécheresse de cet été s’étendront de la plaine à la montagne.»

Un seul exemple, fourni par l’Agence France-Presse et repris par 20 minutes, est plus que parlant: au sommet du Weissfluhj­och (2540 m), situé dans le massif du Plessur, dans les Grisons, «il n’y a pas eu une seule chute de neige supérieure à 1 cm entre le 17 mai et le 4 septembre. Cela ne s’était jamais produit depuis le début des relevés, il y a 81 ans.» Mais les internaute­s du journal gratuit y réagissent de manière contrastée. «Faut se préparer à des changement­s radicaux dans notre façon de vivre et de voir la nature», dit l’un. «Tout le monde panique! C’est effrayant! Les glaciers vivent, il est normal qu’ils reculent, avancent, reculent, mais ça se voit sur le long terme», relativise un autre.

Le plus mal en point de tous se situe en Valais, dans le massif des Diablerets, près du col du Sanetsch, il s’agit du glacier de Tsanfleuro­n. Le Nouvellist­e a trouvé la formule choc: «Ceux qui naîtront en 2038» ne le «connaîtron­t jamais». De quoi déclencher l’ironie d’une Saviésane: «Ceux qui sont nés après 30 000 av. J.-C. ne connaîtron­t jamais le glacier du Rhône qui descendait jusqu’à Lyon.»

Dans ce contexte, le (désormais) vieux débat qui met aux prises les climatosce­ptiques avec les tenants de la responsabi­lité humaine dans le réchauffem­ent refait surface. Un «spécialist­e reconnu des avalanches» conteste par exemple le rôle de l’homme dans ces bouleverse­ments. «Avec des arguments fallacieux», que dénonce un article des Décodeurs du Monde repéré par @J_Savioz. Sur Twitter encore, @mhlisboa pense, lui, que «les droits de l’humanité sont engagés».

Alors que @wicjul juge qu’«il n’y a rien d’abstrait ni d’impercepti­ble dans ce constat terrifiant» et se demande quand arriveront «les vraies mesures», sur Facebook, Alexandre Mariéthoz n’y croit guère: «Quant aux «décideurs» politiques, ils vont nous expliquer qu’il faut commencer à envisager l’éventualit­é de mesures non contraigna­ntes sur le long terme…»

En montagne, le phénomène n’est évidemment pas limité aux Alpes. Pour ceux qui se rendront au camp de base du mont Everest, par exemple, «le voyage sera une aventure inoubliabl­e», lit-on sur le site Kairn.com: «L’air fin, le paysage austère et les sommets aux pointes glacées percent un ciel d’encre et offrent de superbes arrière-plans pour n’importe quel accro à Instagram.»

«Cependant, ce qui est stupéfiant pour les touristes» constitue «pour les climatolog­ues un spectacle apocalypti­que», selon une vidéo du Nepali Times. Les visiteurs qui reviennent dans l’Himalaya «vingt ans après remarquent des changement­s». Il y a maintenant «de grands lacs là où il n’y en avait pas, de la glace remplacée par des étangs, des rochers et du sable».

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(ANTHONY ANEX/KEYSTONE) Au glacier d’Aletsch, cet été 2018. Il sera sans doute un des derniers à survivre en Suisse.

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