François Longchamp sera entendu vendredi
L’ancien président du Conseil d’Etat est le tout premier témoin convoqué en présence des parties. Juste avant cette audition prévue l’aprèsmidi, les procureurs termineront l’interrogatoire principal de Pierre Maudet et de son ancien chef de cabinet
Le 19 octobre sera encore une journée chargée et exceptionnelle pour le Ministère public genevois. Durant la matinée, Pierre Maudet et son ancien chef de cabinet, Patrick Baud-Lavigne, seront à nouveau interrogés sur le voyage d'Abu Dhabi et sur les autres volets de l'affaire. L'après-midi sera consacrée à l'audition de François Longchamp, a appris Le Temps.
L'ancien président du Conseil d'Etat, dont la levée du secret de fonction a été rapidement demandée par le parquet et acceptée par le collège gouvernemental, devra notamment expliquer comment cette invitation du prince Mohammed bin Zayed lui a été présentée à l'époque par le principal intéressé.
Mis en prévention pour acceptation d'un avantage, Pierre Maudet, assisté de Mes Grégoire Mangeat et Fanny Margairaz, a déjà été longuement entendu le 28 septembre dernier par le procureur général Olivier Jornot ainsi que par les deux premiers procureurs, Stéphane Grodecki et Yves Bertossa. L'audience s'est poursuivie le même jour en présence de Patrick Baud-Lavigne, lui aussi prévenu pour avoir participé au voyage de novembre 2015, et assisté de Me Jean-Marc Carnicé.
Explications attendues
Le Ministère public enquête également sur les conditions peu réglementaires de l'ouverture du bar L'Escobar, où Pierre Maudet a été invité à fêter son anniversaire, et qui se trouvait être lié au même réseau d'amis libanais. La récolte de fonds pour un sondage réalisé avant les élections cantonales est aussi dans le collimateur des enquêteurs, de même qu'une éventuelle facilitation de permis de séjour.
L'audition de François Longchamp portera principalement sur le voyage d'Abu Dhabi et sur ce que ce dernier avait compris des contours du périple. Juste avant la fin de son mandat, et alors que l'affaire venait d'éclater, le président sortant faisait savoir par la voix de sa porte-parole que Pierre Maudet l'avait averti d'un déplacement à caractère strictement privé et que tout avait été fait dans les formes.
On sait depuis lors que cette version était une fable montée de toutes pièces par le ministre en difficulté afin de dissimuler l'origine princière d'une invitation peu conforme aux usages en matière de cadeaux. Pierre Maudet avait bel et bien été convié en sa qualité de conseiller d'Etat, tous frais payés, à passer quelques jours de vacances dans un palace avec sa famille et ses amis, tout en assistant au Grand Prix de formule 1 et en serrant quelques mains plus officielles. L'enquête doit encore déterminer ce que tous les organisateurs de cette escapade, dont des promoteurs basés à Genève, pouvaient espérer et si le ministre était conscient qu'on voulait ainsi attirer ses bonnes grâces.
Nature des messages
Dans ce contexte, François Longchamp sera amené à s'exprimer sur ses échanges de courriels au sujet du voyage avec son collègue libéral-radical à l'époque des faits. Pierre Maudet a d'abord prétendu que ces messages avaient été détruits par l'oeuvre du temps avant de les retrouver à l'heure de sa contrition télévisée sur le plateau de Léman bleu.
On sait déjà que le Conseil d'Etat a décidé de collaborer avec la justice et d'autoriser un accès très large au matériel informatique de ses services. Après avoir, quant à lui, résisté un moment en demandant une mise sous scellés de sa messagerie, Pierre Maudet a fait machine arrière en acceptant – moyennant certaines assurances en cas de désaccord sur les documents – que le parquet fasse le tri des pièces pertinentes. Cette opération informatique complexe prendra du temps.
L'enquête est loin d'être terminée. D'autres témoins, notamment les promoteurs impliqués dans le voyage, devront être entendus et confrontés à Pierre Maudet et à son ancien bras droit.