L’assurance Nespresso pour cultivateurs de café
En Colombie, le fabricant de café en capsules développe une micro-assurance dans le cadre d’un programme pilote
Le changement climatique touche aussi les propriétaires de plantations de café de Colombie, l’un des plus gros producteurs mondiaux. Avec le cacao et le sucre, cette culture est l’un des piliers de l’économie nationale. Les petits cultivateurs sont particulièrement exposés. Lorsque les circonstances saisonnières donnent une mauvaise récolte, les paysans spécialisés dans le café n’ont pas les moyens de subsister, et encore moins de plan de secours. Dans les cas extrêmes, il ne leur reste plus qu’à brader leur terre et à aller chercher fortune en ville. La qualité du café s’en ressent alors doublement: à cause du mauvais temps d’une année, et à cause du changement de propriétaire, du fait que pendant la période de transition personne ne s’occupe des cultures.
Des fonds après les fortes pluies
Jusqu’ici, il n’y avait guère de possibilités financièrement abordables pour les cultivateurs de se prémunir contre ce risque. Pour les bourses à terme, leurs volumes de production sont généralement largement insuffisants.
C’est cette lacune que la micro-assurance de Blue Marble vient combler. Avec la filiale locale de Nestlé, elle travaille à une solution d’assurance dite paramétrique, dans le cadre d’un programme pilote. Son principe est de verser des sommes d’assurance prédéfinies lorsqu’un événement déclencheur (trigger) se produit, ou lorsqu’une certaine valeur également prédéterminée est atteinte. Il peut s’agir, par exemple, d’un certain nombre de jours sans pluie ou d’une valeur seuil non atteinte en termes de précipitations.
Avec ce système, les sinistres sont réglés très rapidement et sans complications administratives. Les assurés reçoivent généralement la somme assurée dans un délai de quelques jours. La compagnie d’assurances y trouve également son compte. Plus besoin d’envoyer des inspecteurs sur les lieux pour procéder à l’évaluation visuelle laborieuse des dommages.
Combler les lacunes
Aux dires de l’assurance, ce sont près de 2000 agriculteurs qui participent à ce programme pilote. Réunis au sein de deux coopératives de la province de Caldas, celles des cultivateurs de café d’Aguadas et du nord de Caldas, ils exploitent 5700 hectares de terres.
Le projet trouve son origine dans la collaboration entre la division états-unienne de Nespresso, qui s’approvisionne entre autres en Colombie pour son café, et Blue Marble, compagnie d’assurances également basée aux Etats-Unis. En l’occurrence, l’assurance paramétrique reconnaît deux déclencheurs: les pluies torrentielles et la sécheresse durant la phase de croissance cruciale du caféier, quand la plante est la plus sensible aux variations de climat extrêmes. Les valeurs de référence ont été fixées sur la base de mesures effectuées depuis de nombreuses années et de l’expérience des cultivateurs eux-mêmes.
D’après Guillaume Le Cunff, qui dirige les activités de Nespresso aux Etats-Unis, il s’agit de mettre en place un mécanisme stable de soutien aux agriculteurs afin que ceux-ci puissent préserver leurs moyens d’existence en dépit des variations climatiques. La perte des récoltes présente des conséquences lourdes: non seulement ils n’ont plus de quoi vivre à partir du moment où l’argent qu’ils ont économisé est près de s’épuiser, juste avant la récolte. Mais en plus, il va leur manquer de quoi racheter de nouveaux plants de caféier.
Par ailleurs, Nespresso a intérêt à obtenir un produit de qualité, souligne l’entreprise dans un communiqué. De son côté, la société Blue Marble, spécialisée dans la micro-assurance, bénéficiera de potentialités et de sources d’encaissement de primes supplémentaires si le test pilote produit les résultats escomptés. Le secteur des assurances a déjà fait de bonnes expériences sur d’autres marchés latino-américains avec des contrats de type paramétrique, notamment en assurance contre les ouragans. Tant du point de vue de l’assurance que de celui de la réassurance, de telles polices vont dans le sens de combler progressivement les lacunes de couverture constatées sur les marchés visés.
Pour les producteurs regroupés au sein de coopératives, elles donnent naissance à une sorte de filet social. La chose est totalement nouvelle, étant donné que les producteurs de café ne peuvent pas bénéficier d’une assurance chômage au sens classique du terme.
L’instrument technologique de base du système est constitué d’images satellites. L’association des producteurs de café colombiens a elle-même manifesté son intérêt. Elle suit de près le déroulement du test et verrait d’un bon oeil l’extension de cette forme d’assurance à d’autres régions du pays.
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