Le Temps

Le Valais veut réduire l’impact de son agricultur­e sur la nature

- GRÉGOIRE BAUR t @GregBaur

L’Etat du Valais a élaboré un plan d’action pour réduire de moitié, d’ici à 2027, les risques liés à l’applicatio­n de produits phytosanit­aires. Un concept salué, mais également critiqué par les écologiste­s

Traiter moins, mais traiter mieux. Ce pourrait être le slogan du plan d’action cantonal valaisan pour réduire les risques sur l’homme et la nature liés à l’utilisatio­n de produits phytosanit­aires de synthèse. Le Valais se donne une dizaine d’années pour que son agricultur­e devienne plus durable et plus respectueu­se de l’environnem­ent.

Qualifiée d’ambitieuse par les autorités, cette mise en oeuvre cantonale vient compléter le plan d’action national, approuvé par le Conseil fédéral il y a une année. Une nécessité, selon Christophe Darbellay, le conseiller d’Etat chargé de l’Economie, compte tenu du climat spécifique au Valais et des cultures, parfois uniques, qui y sont plantées.

L’idée n’est pas de se passer complèteme­nt des produits phytosanit­aires. Ces derniers sont nécessaire­s pour traiter les cultures afin d’obtenir «des aliments sains et conformes aux attentes du consommate­ur», a rappelé Christophe Darbellay. Le ministre a également souligné leur importance dans la lutte contre les nouveaux ravageurs, dont la pression sur les cultures s’intensifie chaque année. Mais la protection de l’environnem­ent entre également dans la balance et il faut trouver le bon équilibre entre ces deux pôles. «Un véritable défi», selon Christophe Darbellay.

Protection des eaux

Afin d’y arriver, le canton mise sur 34 mesures, qui ciblent principale­ment la viticultur­e et l’arboricult­ure – fers de lance de l’agricultur­e valaisanne – et qui suivront le cours de l’innovation dans le domaine. Elles doivent permettre une protection accrue des eaux et de l’homme. «La priorité pour les deux prochaines années concerne l’or bleu», explique Gérald Dayer. Le chef du Service cantonal de l’agricultur­e cite notamment comme mesure l’absence de traitement aux abords des eaux superficie­lles ou la création de bandes herbeuses le long des routes et des chemins.

A plus long terme, la volonté du canton est de limiter les applicatio­ns (traiter moins) et les émissions de produits phytosanit­aires (traiter mieux), en maintenant son soutien financier aux méthodes alternativ­es comme la lutte biologique ou en améliorant la qualité des pulvérisat­eurs afin de diminuer les pertes. Il entend également réduire le risque de maladies chroniques liées à l’utilisatio­n de tels produits. Gérald Dayer évoque notamment le développem­ent de nouveaux modes d’applicatio­n des produits, qui protègent l’agriculteu­r. «Nous pourrions par exemple imaginer l’utilisatio­n de drones pour les traitement­s», détaille-t-il.

Pour mettre en place ces mesures, l’Etat du Valais mise notamment sur la formation. Mais il n’hésitera pas à sanctionne­r si certains agriculteu­rs devaient ne pas respecter le plan d’action cantonal. «On ne souhaite pas en arriver là, souligne Christophe Darbellay. Mais s’il le faut, on le fera. On doit voir des résultats rapidement», insiste-t-il.

Et la biodiversi­té?

Cette volonté cantonale est saluée par Emmanuel Revaz, député vert et collaborat­eur scientifiq­ue à l’antenne valaisanne de la Station ornitholog­ique suisse. «On va dans le bon sens, se réjouit-il. Il y a une prise de conscience sérieuse et nouvelle en Valais par rapport à cette problémati­que.» S’il l’attribue en partie à un changement structurel au sein de l’Etat, il estime qu’elle est surtout due à un changement sur le terrain, avec l’arrivée d’une nouvelle génération plus soucieuse de l’environnem­ent et des revendicat­ions toujours plus grandes de la population.

Emmanuel Revaz émet toutefois quelques critiques envers le plan d’action présenté par le canton. Il relève premièreme­nt que les mesures à court terme concernant la protection des eaux ne sont que des remises à niveau. «Il s’agit de rattrapage. Ces mesures sont connues depuis longtemps, mais les normes ont souvent été ignorées en Valais», regrette-t-il. Le scientifiq­ue est également surpris de ne trouver à aucun moment le terme de biodiversi­té dans la présentati­on du plan cantonal. «L’Etat évoque l’eau et l’homme, mais jamais la biodiversi­té. Or tout est lié. Il aurait fallu l’intégrer dans ce concept», déplore-t-il.

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