Le Temps

Premier feu vert pour une ligne Hyperloop aux Etats-Unis

- FABIEN GOUBET t @fabiengoub­et

Une étude de faisabilit­é a eu lieu pour la première fois sur le territoire américain. Si les technologi­es embarquées dans le train ultrarapid­e du futur sont dans les starting-blocks, la question du coût pourrait être dissuasive

Et si, finalement, l’Hyperloop voyait le jour sur ses propres terres? S’il ne fait plus vraiment de doute que les technologi­es nécessaire­s au fonctionne­ment de ce train ultrarapid­e sont bientôt prêtes, ses coûts de développem­ent, de constructi­on et de fonctionne­ment suscitent plus d’interrogat­ions. Ce qui amène les détracteur­s de ce nouveau moyen de transport, censé circuler à la demande, à plus de 1000 km/h dans des tubes sous vide, le tout en carburant aux énergies vertes, à dire qu’il ne verra jamais le jour en Europe ou aux Etats-Unis.

Techniquem­ent viable

Une récente enquête de faisabilit­é menée dans l’Etat du Missouri et publiée le 17 octobre tend cependant à leur donner tort – du moins en partie. Commandée par un consortium réunissant industriel­s, institutio­ns publiques locales ainsi que Virgin Hyperloop One, l’une des entreprise­s qui se sont lancées sur ce créneau, elle conclut à la viabilité technique et économique de la route proposée, reliant Saint Louis à Kansas City dans l’Etat du Missouri, le long de l’autoroute Interstate 70.

Cette nouvelle réjouissan­te pour les partisans d’un Hyperloop américain fait suite à une autre annonce d’envergure: celle de la reconnaiss­ance officielle en septembre par le Comité sénatorial américain sur le commerce, la science et les transports de l’Hyperloop comme un nouveau moyen de transport, un pas en avant décisif pour l’établissem­ent d’un cadre réglementa­ire approprié pour ce nouveau mode de transport.

L’étude de faisabilit­é, indispensa­ble première étape de la constructi­on d’une ligne Hyperloop, a été effectuée par un cabinet de consulting en ingénierie indépendan­t, Black & Veatch. Le tracé (qui serait situé entre les deux voies de l’Interstate 70) devrait réduire à vingt-huit minutes la durée du trajet entre Saint Louis et Kansas City contre trois heures trente par la route. Après l’avoir examiné, Black & Veatch a évalué les impacts potentiels du tracé sur des secteurs variés allant de la sécurité aux opportunit­és économique­s.

Elle a ainsi estimé à 6000 le nombre de passagers aux heures de pointe. Prenant en compte un coût de trajet inférieur à celui du transport routier (en ne considéran­t que le prix de l’essence), elle calcule que l’Hyperloop ferait économiser aux voyageurs 410 millions de dollars chaque année, auxquels il faut ajouter 91 millions d’économies grâce aux accidents de la route évités. «C’est la première fois qu’une étude estime le prix d’un ticket Hyperloop, c’est une nouvelle particuliè­rement réjouissan­te», confie par courrier électroniq­ue au Temps Ryan Kelly, le responsabl­e marketing et communicat­ion de Virgin Hyperloop One.

L’inconnue des coûts

Reste cependant une inconnue de taille, très peu abordée dans le rapport: le coût de constructi­on et de fonctionne­ment d’un tel engin. Dans un communiqué, Virgin Hyperloop One mentionne un coût «40% inférieur à celui des autres lignes de train à haute vitesse dans le monde», notamment grâce au caractère linéaire de ses lignes. Lorsqu’il imagina le premier le concept d’Hyperloop en 2013, le milliardai­re Elon Musk estima à 6 milliards de dollars la facture à payer pour relier San Francisco à Los Angeles. Sortons la calculatri­ce, cela représente environ 12 millions par kilomètre. On connaît le patron de SpaceX et de Tesla pour ses deadlines et ses estimation­s les plus fantaisist­es. Des documents plus sérieux ayant fuité en 2016 des bureaux d’Hyperloop One (l’ancien nom de l’entreprise avant son rachat par Virgin) et destinés aux investisse­urs faisaient plutôt état de 60 millions par kilomètre, pour une ligne située dans la région de la baie de San Francisco.

Avec un tel tarif, l’Hyperloop de Virgin coûterait bien plus qu’une ligne de type TGV (20 millions par kilomètre), mais beaucoup moins que celle en constructi­on en Californie, qui cristallis­e les rancoeurs des contribuab­les avec 140 millions par kilomètre. Si l’on s’en tient à ce chiffre, l’estimation de 40% par Virgin tient la route.

Quoi qu’il en soit, il ne fait aucun doute que bâtir une ligne Hyperloop coûtera cher, très cher. Virgin Hyperloop One, qui a jusqu’ici levé un peu moins de 300 millions de dollars, compte sur des partenaria­ts publics-privés pour réunir les fonds nécessaire­s. «Notre ligne Hyperloop ne sera pas un gouffre à argent public», assurait au Temps en septembre dernier Ryan Kelly. «Ni Virgin, ni les gouverneme­nts ne le permettrai­ent.» Pour voir si les coûts demeurent réalistes, il faudra se tourner vers l’Inde: c’est là-bas, entre Bombay et Pune, que devrait se construire la première ligne commercial­e en 2019.

De Saint-Louis à Kansas City en vingt-huit minutes contre trois heures trente par la route

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(DR) Des trajets à plus de 1000 km/h dans des tubes sous vide.

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