Le Temps

Julien Henzelin, les idéaux d’un naturopath­e adepte du coworking

A la fois naturopath­e et entreprene­ur, le Vaudois de 38 ans a ouvert un espace de coworking multifonct­ionnel. Sa mission? Apprendre aux gens à s’écouter

- JULIEN HENZELIN SYLVIA REVELLO @sylviareve­llo

Son t-shirt noir estampillé «Marvel» annonce la couleur. Julien Henzelin joue sur tous les fronts, tel un super-héros aux inépuisabl­es réserves d’énergie. Pour ce nomade digital de 38 ans aux faux airs de Yann Marguet, les journées de travail ne prennent jamais vraiment fin. Quand il n’enseigne pas la naturopath­ie, le Vaudois d’origine jurassienn­e reçoit ses propres patients dans son espace de coworking ou songe à de nouvelles manières de promouvoir la santé au travail. Au-delà des slogans, il a fait du «mode de vie healthy» un véritable métier.

Avec ses plantes grimpantes et son design épuré, La Serre s’offre au visiteur comme un cocon. Ouvert en janvier 2017, l’espace de coworking abrite la première école romande délivrant un diplôme fédéral de naturopath­e en médecine traditionn­elle européenne – fondée par son grand-père André Henzelin – et dispose de salles modulables à l’envi. «Dédiées au travail indépendan­t et à un cursus de formation durant la journée, les pièces se transforme­nt pour accueillir des cours et des événements le soir et le weekend», détaille Julien Henzelin, en balayant l’espace des yeux. Ils sont informatic­iens, consultant­s, architecte­s, designers ou encore rédacteurs. Au total, une vingtaine de coworkers y louent une place de travail au jour, à la semaine ou au mois. Au centre, la pièce commune fait office de centre de ravitaille­ment. Les locataires y trouvent des repas sains concoctés en partenaria­t avec la Luncheonet­te.

«Laboratoir­e d’hygiène de vie»

Pour Julien Henzelin, le coworking ne se réduit pas à un «bureau avec chaise réglable». Son but: faire cohabiter des personnes d’horizons différents pour créer une communauté, un état d’esprit. «Réunir des étudiants et des entreprene­urs, observer les interactio­ns qui naissent de ce mélange, ça me passionne, lance-t-il, enthousias­te. J’aspire à faire de La Serre un laboratoir­e d’hygiène de vie adapté au monde du travail. En proposant des douches, du take away ou des cours de yoga, je fais des essais, je regarde ce qui fonctionne ou pas.»

L’envie de pouvoir travailler partout, ce goût pour le nomadisme lui viennent de son enfance. Lorsque ses parents divorcent en 1989, ils optent pour une solution très progressis­te pour l’époque: la garde partagée. Une semaine chez son père «plutôt fêtard», puis une chez sa mère «très rangée», le petit Julien appréhende un monde à deux vitesses. «J’ai compris que l’être humain pouvait vivre de manières différente­s, j’ai été forcé de m’adapter à ces règles.»

Lors d’un voyage scolaire en Angleterre, à l’âge de 23 ans, il est frappé par la difficulté d’adaptation de ses camarades. «Pour eux, manger des pommes de terre à chaque repas, c’était l’enfer, raconte-t-il en riant. Moi, je prenais ce qu’on me donnait.» C’est aussi à distance, depuis Londres, que l’adolescent passionné de nouvelles technologi­es fonde sa première entreprise de création de logiciels métiers et de sites internet avec trois amis. Un tour du monde de Santiago du Chili à Barcelone, en «mercenaire», achève sa formation de nomade. Cette capacité à se fondre dans le décor n’a pourtant pas toujours été un atout. «Le plus dur a été de savoir ce que je voulais vraiment. A force de me plier aux habitudes des autres, je ne savais pas quelles étaient les miennes.»

«Tout a un sens»

La naturopath­ie, cette science qui offre des clés pour comprendre son fonctionne­ment personnel, va lui ouvrir les yeux. A travers elle, Julien Henzelin appréhende la santé avec d’autres outils: l’alimentati­on, le mouvement, la psychologi­e et l’hydrothéra­pie. «Plus on se connaît, plus on acquiert de ressources, plus il y a de solutions», résume le jeune homme. A ses yeux, tout a un sens et la génétique n’est responsabl­e que d’une petite partie des problèmes de santé. «La preuve avec les maladies de civilisati­on, obésité, cancers et autres problèmes endocrinie­ns, qui affectent un grand nombre de personnes.»

A propos, qui donc s’adresse à lui? Plongeant les yeux dans sa barbe rousse, Julien Henzelin prend une grande respiratio­n avant de lâcher sobrement: «Il y a de tout.» Des personnes très stressées, qui ne gèrent plus le rythme quotidien, d’autres qui souffrent d’une maladie chronique et veulent trouver une alternativ­e aux médicament­s, d’autres encore qui veulent par exemple perdre du poids.

De fait, la nourriture et la gestion des émotions occupent une part importante des réflexions sur la naturopath­ie. «Il existe deux grandes catégories de personnes, précise le jeune homme, celles qui gonflent face au stress et celles qui, au contraire, se rétractent. Cela vient du fait que ces deux types de personne ont une manière différente de gérer leur système nerveux, qui est directemen­t connecté à l’estomac.»

Complexe d’infériorit­é?

Avec sa carrure massive, il admet faire partie du premier groupe. «J’apprends tous les jours à m’écouter davantage», soufflet-il. Il vient justement d’obtenir une certificat­ion d’instructeu­r d’hydrothéra­pie aux Pays-Bas, où il a expériment­é le bain à 3 degrés avec le célèbre «homme de glace» Wim Hof. Le procédé de respiratio­n et d’exposition au froid permet de recentrer le système nerveux pendant plusieurs heures. Durée de la baignade: quatre minutes et pas une seconde de plus.

La naturopath­ie ne souffre-t-elle pas d’un complexe d’infériorit­é vis-à-vis de la médecine traditionn­elle? «Non, estime Julien Henzelin, un médecin est un spécialist­e de la maladie, un naturopath­e s’occupe de la santé. Les deux sont complément­aires.» Si elle préconise une approche personnali­sée, la technique ne fait toutefois pas de miracles. «Certains patients viennent consulter, mais ne sont pas prêts à modifier leurs habitudes de vie. Ils voudraient une pilule magique naturelle…»

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