Le Temps

«Les démarches non partisanes vont se multiplier»

- PROPOS RECUEILLIS PAR GRÉGOIRE BAUR @GregBaur

Membre du forum de politique étrangère Foraus et à l’origine du mouvement valaisan Appel citoyen, Johan Rochel estime qu’il faudra à l’avenir compter sur les mouvements non partisans en Suisse, mais que cela ne remet pas en question l’existence des partis

Les mouvements citoyens ont marqué les esprits dimanche. Ils ont participé à la défaite de l’UDC et Appel citoyen a réalisé un score impression­nant en Valais, lors de l’élection à la Constituan­te. Mais que se cache-t-il derrière ces mouvements? Il est

difficile de les cartograph­ier, car ils sont très disparates. On les définit souvent par la négative, qui est de ne pas être un parti politique. Mais ils racontent tous la même chose: cette envie des citoyens de s’engager politiquem­ent, sans toutefois être affilié à un parti politique. En créant ces mouvements non partisans, on répond à cette demande populaire. En quelque sorte, on comble un vide. C’est cela qui explique les résultats que l’on a pu constater ce week-end.

Faut-il y voir une perte d’influence des partis?

Je ne suis pas sûr, car ils demeurent les acteurs clés de la politique institutio­nnelle. Si on veut intégrer un parlement, il est très compliqué de ne pas être affilié à un parti. Il ne faut donc pas opposer ces deux mondes que sont les partis et les mouvements citoyens. Ces derniers sont nés en parallèle des partis et non pas en opposition. On a certes pu voir une concurrenc­e entre les partis traditionn­els et Appel citoyen en Valais, car notre mouvement se devait de gagner des suffrages pour obtenir des sièges. Mais dans les autres cas, il n’y a pas de concurrenc­e entre mouvements et partis.

Absolument pas. Si certains mouvements, comme le Mouvement 5 étoiles en Italie ou l’AfD en Allemagne, sont mal intentionn­és et prônent un «dégagisme», la majorité ne le sont pas. En revanche, l’arrivée des mouvements citoyens sur la scène politique secouent les partis, qui devront se questionne­r sur leur manière de fonctionne­r. Au centre de ce questionne­ment, il y aura notamment la transparen­ce sur leur financemen­t ou une plus grande consultati­on de

Ce n’est donc pas la mort des partis traditionn­els?

leurs membres. La question de la relève sera également soulevée, puisque le réservoir de personnes intéressée­s par la politique n’est pas infini. Peut-être que les futurs politicien­s passeront d’abord par un mouvement citoyen, avant d’emprunter une sorte de passerelle pour se diriger vers un parti.

Quel a été le déclic qui a permis l’émergence de ces mouvements citoyens?

La tradition existe depuis de nombreuses années en Suisse. Elle est liée au pragmatism­e, que l’on retrouve au niveau de la politique communale. Les alliances qui s’y forment depuis longtemps sont les prémices des mouvements que l’on connaît aujourd’hui. Un autre exemple historique serait les syndicats. Un mouvement politique qui travaille avec les partis. L’arrivée des nouvelles technologi­es a permis la multiplica­tion des mouvements citoyens. Il est devenu plus facile de rassembler des personnes autour d’un thème, comme nous l’avons fait, par exemple, avec Foraus pour parler de politique étrangère. Puis, des exemples internatio­naux, comme l’élection d’Emmanuel Macron en France, ont démontré que même l’accession au pouvoir exécutif est possible. Ces nouveaux possibles renforcent l’envie d’expériment­ation.

Le nombre de ces mouvements pourrait donc croître à l’avenir?Les

mouvements non partisans vont se multiplier. L’aventure va s’accélérer car elle s’accompagne d’un apprentiss­age très rapide. Les nouveaux venus peuvent s’inspirer de ce qui a déjà été fait et atteindre rapidement un bon niveau. Cette tendance n’est pas réservée à une couleur politique en particulie­r. Des mouvements, mettant l’accent sur des thèmes précis, vont naître en complément des partis de tous les côtés de l’échiquier politique.

MOUVEMENT APPEL CITOYEN

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JOHAN ROCHEL

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