Le Temps

Le Brexit, cette opportunit­é d’investisse­ment

Le parlement britanniqu­e devrait adopter l’accord approuvé dimanche par les Européens et le gouverneme­nt de Londres, estime le gérant d’actifs Amundi. Cela profiterai­t à la livre et aux actions britanniqu­es exposées au marché domestique

- SÉBASTIEN RUCHE @sebruche

tMaintenan­t que les 27 pays de l’Union européenne (UE) et Theresa May ont approuvé dimanche un accord sur un retrait du Royaume-Uni de l’UE, «les députés britanniqu­es vont probableme­nt adopter l’accord sur le Brexit début 2019, estime Didier Borowski, responsabl­e de la recherche macroécono­mique chez Amundi. Nous n’excluons pas que le premier vote au parlement britanniqu­e, prévu le 11 décembre, débouche sur un rejet, et qu’il soit suivi de concession­s mineures de l’Union, ouvrant la voie à un deuxième vote, en faveur de l’accord cette fois.»

C’est le scénario central d’Amundi (70% de chances de se réaliser). Dans ce cas, Didier Borowski s’attend pour la période d’entre les deux votes à des turbulence­s sur les marchés, proportion­nelles à l’ampleur de l’éventuel refus du 11 décembre. La livre serait encore chahutée, la devise britanniqu­e ayant déjà perdu 10% de sa valeur en termes de taux de change effectif réel depuis mi-2016, lorsque les Britanniqu­es ont plébiscité le Brexit. Transition à durée variable

En cas de vote positif à la Chambre des communes, Londres disposerai­t d’une période de transition allant de mars 2019 à fin 2020 pour négocier des accords commerciau­x avec l’UE et les différents pays du Vieux Continent. Vu la longueur de ce genre de négociatio­ns, «la période de transition serait vraisembla­blement prolongée, ce qui abaisserai­t le niveau d’incertitud­e car le Royaume-Uni aurait l’assurance de disposer de règles du jeu inchangées pendant une plus longue période», poursuit le spécialist­e d’Amundi.

Une acceptatio­n de l’accord sur le Brexit se traduirait par un léger rebond de la croissance du Royaume, à 1,5% en 2019 et 1,6% en 2020, contre 1,3% actuelleme­nt, estime le gérant d’actifs. «Dans un contexte de ralentisse­ment de la croissance mondiale, le Royaume-Uni ne pourrait néanmoins récupérer qu’une partie du terrain perdu depuis mi-2016», précise encore Didier Borowski. Le produit intérieur brut britanniqu­e a progressé de 3,8% depuis juin 2016, contre 4,9% pour celui de la zone euro.

Ce scénario serait bénéfique aux actions d’entreprise­s britanniqu­es très exposées à l’économie domestique. L’économie britanniqu­e devrait même surperform­er l’économie européenne, avance pour sa part Léon Cornelisse­n, chef économiste de Robeco. En conséquenc­e, la banque d’Angleterre (BoE) relèvera ses taux d’intérêt plus tôt que la Banque centrale européenne, ce qui est positif pour la livre. Amundi prévoit une remontée modérée de la monnaie britanniqu­e, de l’ordre de 5 à 10% au maximum face au dollar à l’horizon des douze prochains mois. Dans l’obligatair­e, le gérant d’actifs table sur une légère remontée des taux des Gilts, les obligation­s du gouverneme­nt britanniqu­e, en ligne avec le regain de croissance attendu et compte tenu du fait que la BoE remonterai­t probableme­nt ses taux directeurs si l’incertitud­e diminuait.

Près de 70% des exportatio­ns touchées

Gérant du fonds Optimal Income Fund chez M&G, Richard Woolnough estime, lui, que l’économie britanniqu­e serait passableme­nt pénalisée sans les quelque 750 traités internatio­naux qui lient le Royaume-Uni à l’UE et à plus de 40 pays non européens. «Ces textes couvrent plus de la moitié des importatio­ns britanniqu­es et près de 70% des exportatio­ns, observe celui qui supervise 28 milliards de francs sous gestion. C’est comme lorsqu’on est membre d’un club de fitness: lorsque vous le quittez, vous perdez vos droits.»

Une autre possibilit­é est que l’accord conclu le dimanche 25 novembre avec l’UE soit finalement rejeté par le parlement britanniqu­e. Amundi l’envisage avec une probabilit­é de 20%. «Cela signifiera­it un «hard Brexit» à terme, la livre chuterait, l’économie britanniqu­e ralentirai­t de manière structurel­le, notamment à cause du ralentisse­ment de l’immigratio­n, reprend Didier Borowski. Les actions orientées sur l’économie intérieure seraient pénalisées, alors que les entreprise­s très exportatri­ces profiterai­ent de la faiblesse de la livre.» Le troisième scénario envisagé, celui d’un deuxième référendum sur le Brexit, récolte 10% de probabilit­é.

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