Le Brexit, cette opportunité d’investissement
Le parlement britannique devrait adopter l’accord approuvé dimanche par les Européens et le gouvernement de Londres, estime le gérant d’actifs Amundi. Cela profiterait à la livre et aux actions britanniques exposées au marché domestique
tMaintenant que les 27 pays de l’Union européenne (UE) et Theresa May ont approuvé dimanche un accord sur un retrait du Royaume-Uni de l’UE, «les députés britanniques vont probablement adopter l’accord sur le Brexit début 2019, estime Didier Borowski, responsable de la recherche macroéconomique chez Amundi. Nous n’excluons pas que le premier vote au parlement britannique, prévu le 11 décembre, débouche sur un rejet, et qu’il soit suivi de concessions mineures de l’Union, ouvrant la voie à un deuxième vote, en faveur de l’accord cette fois.»
C’est le scénario central d’Amundi (70% de chances de se réaliser). Dans ce cas, Didier Borowski s’attend pour la période d’entre les deux votes à des turbulences sur les marchés, proportionnelles à l’ampleur de l’éventuel refus du 11 décembre. La livre serait encore chahutée, la devise britannique ayant déjà perdu 10% de sa valeur en termes de taux de change effectif réel depuis mi-2016, lorsque les Britanniques ont plébiscité le Brexit. Transition à durée variable
En cas de vote positif à la Chambre des communes, Londres disposerait d’une période de transition allant de mars 2019 à fin 2020 pour négocier des accords commerciaux avec l’UE et les différents pays du Vieux Continent. Vu la longueur de ce genre de négociations, «la période de transition serait vraisemblablement prolongée, ce qui abaisserait le niveau d’incertitude car le Royaume-Uni aurait l’assurance de disposer de règles du jeu inchangées pendant une plus longue période», poursuit le spécialiste d’Amundi.
Une acceptation de l’accord sur le Brexit se traduirait par un léger rebond de la croissance du Royaume, à 1,5% en 2019 et 1,6% en 2020, contre 1,3% actuellement, estime le gérant d’actifs. «Dans un contexte de ralentissement de la croissance mondiale, le Royaume-Uni ne pourrait néanmoins récupérer qu’une partie du terrain perdu depuis mi-2016», précise encore Didier Borowski. Le produit intérieur brut britannique a progressé de 3,8% depuis juin 2016, contre 4,9% pour celui de la zone euro.
Ce scénario serait bénéfique aux actions d’entreprises britanniques très exposées à l’économie domestique. L’économie britannique devrait même surperformer l’économie européenne, avance pour sa part Léon Cornelissen, chef économiste de Robeco. En conséquence, la banque d’Angleterre (BoE) relèvera ses taux d’intérêt plus tôt que la Banque centrale européenne, ce qui est positif pour la livre. Amundi prévoit une remontée modérée de la monnaie britannique, de l’ordre de 5 à 10% au maximum face au dollar à l’horizon des douze prochains mois. Dans l’obligataire, le gérant d’actifs table sur une légère remontée des taux des Gilts, les obligations du gouvernement britannique, en ligne avec le regain de croissance attendu et compte tenu du fait que la BoE remonterait probablement ses taux directeurs si l’incertitude diminuait.
Près de 70% des exportations touchées
Gérant du fonds Optimal Income Fund chez M&G, Richard Woolnough estime, lui, que l’économie britannique serait passablement pénalisée sans les quelque 750 traités internationaux qui lient le Royaume-Uni à l’UE et à plus de 40 pays non européens. «Ces textes couvrent plus de la moitié des importations britanniques et près de 70% des exportations, observe celui qui supervise 28 milliards de francs sous gestion. C’est comme lorsqu’on est membre d’un club de fitness: lorsque vous le quittez, vous perdez vos droits.»
Une autre possibilité est que l’accord conclu le dimanche 25 novembre avec l’UE soit finalement rejeté par le parlement britannique. Amundi l’envisage avec une probabilité de 20%. «Cela signifierait un «hard Brexit» à terme, la livre chuterait, l’économie britannique ralentirait de manière structurelle, notamment à cause du ralentissement de l’immigration, reprend Didier Borowski. Les actions orientées sur l’économie intérieure seraient pénalisées, alors que les entreprises très exportatrices profiteraient de la faiblesse de la livre.» Le troisième scénario envisagé, celui d’un deuxième référendum sur le Brexit, récolte 10% de probabilité.
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