Politique étrangère: les insupportables excès de Levrat
C’est une attaque totalement excessive, à l’image de son auteur, que le président du PS, Christian Levrat, a lancée récemment dans les colonnes de ce journal contre le conseiller fédéral Ignazio Cassis. On y trouve, pêlemêle, des demi-vérités, des contre-vérités, des attaques personnelles enrobées de la marque de fabrique du personnage: la mauvaise foi. L’année électorale approche, mais tout de même, camarade Levrat, un peu de retenue!
Sur le principe, il est vrai qu’«une politique étrangère crédible nécessite une ligne politique lisible, orientée sur des principes clairs». Pour le PLR et ses ministres, cela se traduit en matière de politique européenne par le renforcement de la voie bilatérale avec l’Union européenne, propice au maintien de notre prospérité et de notre indépendance.
Et que fait dans ce domaine le Parti socialiste? Ces dernières années, le PS a feint de miser lui aussi sur les négociations bilatérales. «L’an dernier, je pensais qu’on pouvait laisser passer les élections européennes et fédérales, agendées toutes les deux en 2019, avant de conclure les négociations avec l’Union européenne. Aujourd’hui, je suis convaincu qu’il faut avancer plus vite», disait Christian Levrat le 5 janvier 2018, devant les médias invités à un apéritif des Rois.
Et comment va-t-il fanfaronner le 5 janvier 2019? Nous servira-t-il que «le PS est pour le lancement rapide de négociations d’adhésion à l’UE», comme cela est gravé dans le marbre poussiéreux du programme de son parti? Le diagnostic est simple: le PS, pris en otage par les syndicats, a rejoint l’UDC dans le camp des partis qui torpillent les négociations bilatérales. Les socialistes ont soutenu les ministres de l’Economie et des Affaires étrangères, chargés de la politique européenne, comme la corde soutient le pendu: au lieu de moderniser (sans les remettre en question) les mécanismes de protection salariale, le PS oeuvre pour le seul profit des syndicats. Le PS provoque ainsi l’échec des négociations avec l’UE et prend le risque de créer du chômage au détriment de ceux qu’il prétend défendre. «Le profit au lieu de l’emploi» – c’est apparemment la devise de la gauche lorsqu’il s’agit de ses propres finances.
C’est tout le paradoxe des socialistes. On est de gauche mais on aime le pouvoir, n’est-ce pas M. Levrat, vous qui vous accrochez à votre perchoir de président comme un vieux sage de l’Académie française à son fauteuil? On prétend défendre une politique des quotas, mais on lorgne le siège d’une collègue du Conseil des Etats qui ne se représente pas en éliminant, sans grands égards, une concurrente féminine du même camp, n’est-ce pas M. Wermuth, star montante du PS?
Et on peut aussi être libéral-radical, de droite, défendre ses idées et aspirer à mener une politique étrangère qui s’éloigne d’un certain angélisme naïf et aveugle et qui met au premier plan les intérêts de la Suisse et de ses habitants. Max Petitpierre a fortement marqué la politique étrangère de la Suisse et, que je sache, il n’avait pas la carte du Parti socialiste. En une année, Ignazio Cassis, notre nouveau ministre des Affaires étrangères, a remis la politique étrangère au centre du débat des citoyennes et des citoyens.
Ce qui vous déplaît, en réalité, camarade Levrat, c’est qu’Ignazio Cassis ramène la politique étrangère à sa juste place, en adéquation avec ce que souhaite (et vote) la majorité de la population. Vous craignez donc de ne plus pouvoir influencer la politique intérieure par la politique étrangère. Et vous gesticulez bruyamment pour le faire savoir et flatter la gauche de votre parti.
La politique intérieure doit façonner la politique extérieure de la Suisse. Cette année, il a beaucoup été question d’Europe, de migration, de juges étrangers et c’est tant mieux. Reprocher à M. Cassis de se poser des questions sur le fonctionnement de l’UNRWA, l’organisation de secours des Nations unies pour les réfugié-e-s en Palestine qui peine à boucler son budget alors que la Suisse la finance, cela revient à vouloir empêcher le Conseil fédéral de réfléchir, sauf lorsqu’il pense comme vous.
Dans une formule assez cocasse et qui vous vaudra, je l’espère, un Champignac de platine, vous prétendez que le monde se frotte les yeux en entendant les propos de M. Cassis. Mon conseil: ouvrez les vôtres! Et cessez de prendre la politique étrangère en otage de vos basses manoeuvres politiciennes. Les relations de la Suisse avec l’UE vont se compliquer ces prochaines années; les Suissesses et les Suisses devront plus que jamais se serrer les coudes, se montrer solidaires, combatifs et ouverts à l’innovation. Camarade Levrat, au boulot! Rassemblez vos troupes et joignez-vous à nous pour défendre les intérêts de la Suisse!
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Ignazio Cassis ramène la politique étrangère à sa juste place, en adéquation avec ce que souhaite (et vote) la majorité de la population