La recette du PDC contre l’explosion des coûts de la santé
Les coûts de la santé ont doublé en vingt ans. Chaque année, nous consacrons 10000 francs par personne au médical. Certaines solutions se négocient depuis dix ans sans résultat. Force est de changer de tactique. Le politique doit dire stop et chacun doit y mettre du sien. Notre système de santé est l’un des meilleurs du monde: accès rapide aux soins (pas de liste d’attente); prestations complètes (pas besoin d’aller à l’étranger); excellente qualité. Mais hélas, il est aussi le plus cher d’Europe. A pouvoir d’achat égal, il coûte environ 25% de plus qu’en Suède ou en Autriche, où la prise en charge est similaire (OCDE).
C’est enfin le système qui exige le plus de paiements additionnels de la part de ses patients. Sur les 80 milliards de francs dépensés chaque année, les primes obligatoires couvrent 36% et 27% sont financés par l’Etat et les contributions invalidité, accident, AVS etc.; tandis que 7% proviennent des assurances privées et 29% directement de notre poche (OFS). Les coûts grimpent parce que nous vieillissons: les plus de 81 ans (4,4% de la population) génèrent 20,2% des coûts (Revue médicale suisse 2018). Les traitements plus sophistiqués sont aussi plus coûteux. Mais pas seulement.
Très réglementé, le secteur de la santé a l’agilité d’un mammouth. Le financement des hôpitaux est un vrai casse-tête. Et les acteurs sont multiples: médecins en profession libérale, hôpitaux publics en partie subventionnés, cliniques privées accueillant des assurés LAMal, prestataires privés (laboratoires, centres de radiologie, etc.), caisses maladie privées avec mission de service public (accepter tous les assurés). Et la tutelle politique est double: cantonale et fédérale. Enfin, il y a une forte dimension émotionnelle et éthique puisqu’il est question de réparer des corps, de vaincre la mort.
Cela fait dix ans que l’on discute de baisse du prix des médicaments, d’extension des forfaits hospitaliers, a rappelé le surveillant des prix, Stefan Meierhans, lors d’une récente conférence à Vevey. Des solutions existent sans péjorer les soins, comme l’a montré la conférence publique sur les coûts de la santé organisée par le PDC Vaud fin octobre. Mais pas la peine de chercher du côté des médecins en cabinet indépendant: ils gagnent en moyenne 153 600 francs par an avec ce qui est facturé à l’assurance obligatoire, note Philippe Eggimann, président de la Société vaudoise de médecine (SVM).
L’hôpital, qui représente environ un tiers des dépenses, offre un potentiel d’économies substantiel. Faire la transparence sur les prestations financées sur fonds publics, mettre certaines d’entre elles au concours, permettre au patient de choisir un établissement de même qualité mais moins cher, quitte à aller dans un autre canton ou une clinique privée: voilà quelques propositions de Jérôme Cosandey, directeur romand d’Avenir Suisse.
Uniformisons aussi le financement des interventions en stationnaire (lorsqu’on dort à l’hôpital) et en ambulatoire: la contribution des cantons et des caisses maladie doit être identique, afin d’éviter des reports pas toujours judicieux de patients vers l’ambulatoire, entièrement à la charge des caisses maladie et donc des primes. Tout en répartissant équitablement les économies ainsi réalisées entre cantons et caisses maladie, suggère la SVM. Et poursuivons les négociations pour les médicaments génériques, les prothèses et accessoires médicaux, la valorisation des actes médicaux (Tarmed). Les économies pourraient atteindre 1 milliard de francs selon Monsieur Prix. Tandis que les caisses maladie doivent contenir leurs frais de gestion.
La smarter medicine est une piste prometteuse. Dans chaque cas, demandons-nous: quels sont les autres traitements possibles, les bénéfices et les risques, les effets si on ne fait rien ou si, au contraire, on rajoute des mesures personnelles (exercices, régime alimentaire, etc.). L’association Smarter Medicine – Choosing Wisely Switzerland promeut cette responsabilisation du médecin mais aussi du patient. Finie l’idée d’une médecine toute-puissante ou du «j’ai payé, j’en veux pour mon argent!».
Tout cela sans perdre de vue l’essentiel, la solidarité, rappelle le professeur Marie-Denise Schaller, médecin cheffe retraitée du CHUV. Cela exclut: la médecine à deux vitesses, la chasse aux bons risques qui rapportent, la mise en danger de l’offre de soins garantie par un hôpital universitaire qui accueille tous les patients, toutes les pathologies, 24h/24. Il n’est plus possible de discuter sans aboutir, les efforts de tous doivent converger: c’est cette urgence qui a amené le PDC à lancer son initiative «Pour un frein aux coûts de la santé». ▅
L’hôpital, qui représente environ un tiers des dépenses, offre un potentiel d’économies substantiel