A Bienne, Nebia vise les étoiles
Ce jeudi, Marynelle Debétaz fête la rénovation réussie du Palace, qui laisse toute la place au théâtre après avoir conjugué scènes et cinéma. L’artiste suisse Martin Zimmermann se joint aux réjouissances
Non, vous n’avez pas la berlue. Marynelle Debétaz a bien la même couleur de cheveux que la paroi rose pétant trônant à l’entrée de Nebia, la salle rénovée qu’elle inaugure ce jeudi avec le gratin biennois. Ancien cinéma des années 60 transformé en cinéma-théâtre dans les années 90, le Théâtre Palace vient de faire peau neuve pour mieux accueillir les amoureux de la scène francophone et s’appelle désormais Nebia, en hommage au brouillard que réserve parfois le climat bernois. Le coût des travaux? «Six millions», répond la directrice, en poste depuis 2009. C’est bien, mais pas assez: la jeune femme et son équipe ont repeint eux-mêmes les loges situées dans le bâtiment d’à côté, faute de budget. Comment mieux dire la motivation de la trentenaire diplômée en droit, gestion culturelle et dramaturgie? Entame dadaïste
Tout commence avec un éclair. Un Z lumineux qui déchire le ciel rose de l’entrée. Nebia pour nebbia, la brume en italien. Mais aussi pour Bienne lu à l’envers. L’art du revers, c’est bien la signature de cette directrice nouvelle vague. Conjuguer des spectacles grand public avec des créations plus risquées. Des formes amples, parfaitement adaptées à la scène principale, avec des moments plus intimes, idéaux pour Nebia poche, ce petit théâtre de la vieille ville, de 70 places, sur lequel la fée rouge veille aussi.
Ce jeudi 6 décembre, début en fanfare à Nebia, avec Eins zwei drei, trio élastique imaginé par Martin Zimmermann, entre cirque et musique. Une apostrophe dadaïste à savourer jusqu’à samedi. Puis, le 15 décembre, Funérailles d’hiver, à ne manquer sous aucun prétexte. Des noces compliquées par la mort d’une aînée, imaginées par Hanokh Levin et menées tambour battant par la Compagnie du Passage associée au Rideau de Bruxelles. Le titre est aussi mélancolique que le spectacle est tonique.
Mais revenons au Nebia, l’embarcation qui, remise à flot, va donner des conditions idéales d’accueil et de représentation. Le foyer a été aéré. Envolée, la caisse du cinéma qui barrait le passage. A la place, sur la droite, une billetterie arrondie et enveloppée d’une fine paroi de bois au design japonais. Autour, les murs couleur nuit font oublier le beige ingrat qui s’affichait jusqu’au plafond. Innovation encore: la création d’un vrai bar sur la gauche du foyer, qui déploie tables et chaises dans une ambiance vitrée.
On voit et on entend mieux
Le gros du chantier a évidemment concerné la salle et la scène pensées initialement pour le cinéma et dont il a fallu améliorer l’acoustique et la visibilité. «Pour le son, nous avons descendu le plafond de 14 à 8 mètres et posé sur les murs de la salle des panneaux arrondis qui contribuent à une meilleure diffusion.» Pour la visibilité, le balcon a été raccourci et la pente des sièges renforcée. Les matériaux de construction des fauteuils aux couleurs de sous-bois favorisent aussi le trajet du son.
«Sur le plateau, poursuit la directrice, nous avons supprimé les deux tours qui encadraient la scène et changé les équipements techniques qui arrivaient en bout de course. Avant les travaux, nous devions louer une régie son, car la nôtre pouvait nous lâcher à tout moment durant les spectacles…» Blaise Dutoit, directeur technique, salue aussi le renfort en projecteurs et en multimédia. La bonne nouvelle, c’est que la régie n’est plus perchée sur le balcon, mais installée au parterre à la place de l’ancienne cabine de projection cinéma, à la hauteur des sièges du fond. «C’est une amélioration considérable pour les représentations», précise la cheffe de la petite équipe de Nebia.
Le coeur dans la vieille ville
Une réserve? «Peut-être le fait que les lieux soient trop exigus pour accueillir nos bureaux.» Mais cette réserve est vite balayée lorsqu’on découvre lesdits bureaux dans la vieille ville, installés dans une magnifique tourelle médiévale qui abritait l’ancien Rathaus. Le lieu, qui surplombe la petite salle de Nebia poche, est calme et charmant comme un conte de fées. Quoi de mieux pour imaginer des saisons issues des nuées?
Eins zwei drei, du 6 au 8 décembre, Nebia, Bienne.