2019 et ses promesses de grande confusion
Theresa May sera-t-elle encore première ministre en fin de semaine prochaine? Combien de temps Angela Merkel pourra-telle encore gouverner l’Allemagne? Quelle crédibilité restera-t-il à Emmanuel Macron pour poursuivre ses réformes après un nouveau week-end de violence? Le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France – les trois principales économies européennes – pourraient basculer simultanément dans une ère d’incertitude politique qui ne présage rien de bon pour l’Europe. Sans parler de paralysie, Londres, Berlin et Paris vont ces prochains mois être entièrement accaparés par leurs dissensions internes à l’heure où les EtatsUnis et la Chine se livrent une grande bataille pour l’ordre commercial du futur.
Le plan de Brexit sur lequel le parlement britannique se prononcera mardi est pour l’heure donné perdant, ce qui devrait amener tôt ou tard à une démission de la première ministre. Même si Theresa May devait finalement l’emporter, il est apparu lors des débats de ces derniers jours que le RoyaumeUni va devoir se démener durant des mois pour clarifier ses relations avec le continent européen, de très loin son principal partenaire économique. Un Brexit gagnant, vanté par ses soutiens, ne pourra éventuellement émerger que dans plusieurs années, avec l’Ecosse qui aura sans doute largué les amarres.
Les adieux d’Angela Merkel à la CDU, vendredi, hypothèque la poursuite de son mandat même si elle a fait savoir qu’elle entendait rester jusqu’au bout, c’està-dire en 2021. L’élection de sa protégée AKK (Annegret Kramp-Karrenbauer) pour lui succéder à la tête des conservateurs montre qu’elle demeure une redoutable stratège. Mais pour combien de temps? Si elle peut continuer à jouer un rôle de «vieux sage» (une sorte de Grossmuti) sur la scène internationale, son influence sur la politique allemande va rapidement s’amenuiser, et être questionnée. Y compris par sa dauphine qui devra marquer sa différence si elle entend un jour devenir à son tour chancelière.
La reculade, cette semaine, d’Emmanuel Macron sur la taxe carbone a non seulement entamé sa stature présidentielle mais galvanisé les revendications en tous genres dans une France où se sont accumulées les frustrations depuis de nombreuses années. Il sera très compliqué pour lui et son gouvernement de rétablir la confiance qui l’avait porté au pouvoir en faisant exploser le système des partis politiques. Si la France a besoin de réformes, les Français sont trop soucieux d’égalité pour avancer au pas de charge comme l’a fait le président. Erreur de méthode. Valéry Giscard d’Estaing, l’unique président libéral de la Ve République avant Macron, avait ouvert le champ à une prise de pouvoir socialiste. A moins d’un rééquilibrage social, à qui Emmanuel Macron ouvrira-t-il la voie? Une première réponse tombera lors des européennes du printemps prochain. Avec Marion Maréchal-Le Pen en embuscade pour 2022.
A ce tableau compliqué s’ajoute une Europe de l’Est de plus en plus recroquevillée, une Italie livrée à la Ligue qui impose sa ligne alors que partout les forces nationalistes ont le vent en poupe. Mais il n’y a pas que l’Europe qui avance vers 2019 dans la confusion. Combien de temps Donald Trump – affaibli par sa défaite des élections de mi-mandat – va-t-il encore fanfaronner avant que les démocrates déclenchent une procédure d’impeachment? L’assurance de la Chine est à peine moins feinte, elle qui fêtera le 70e anniversaire du pouvoir communiste (un an de plus que la durée de l’ex-URSS), mais aussi le 100e anniversaire du 4 mai et le 30e anniversaire de Tiananmen, les deux grands épisodes de manifestations démocratiques de son histoire. De quoi rendre nerveux.
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Londres, Berlin et Paris vont ces prochains mois être accaparés par leurs dissensions internes