Le Temps

«Le réchauffem­ent nécessite l’implicatio­n de tous»

- PROPOS RECUEILLIS PAR RACHEL RICHTERICH @RRichteric­h

Distingué mercredi en matière de durabilité, Firmenich se défend de seulement vouloir se donner une image écorespons­able. Selon son directeur général, Gilbert Ghostine, l’implicatio­n des multinatio­nales est légitime et nécessaire pour avancer

D’entrée, il balaie l’idée que chimie et préservati­on de l’environnem­ent ne sont pas compatible­s. «Depuis bientôt dix ans, toute nouvelle molécule qui rentre dans notre palette de création de parfums est biodégrada­ble», souligne le directeur général de Firmenich, Gilbert Ghostine. Et si le géant genevois des arômes et parfums tient à figurer en tête des derniers classement­s établis par CDP (voir ci-dessous) – une organisati­on qui se présente comme une plateforme à but non lucratif d’informatio­n sur l’environnem­ent –, ce n’est pas du greenwashi­ng mais le couronneme­nt de vingt ans d’actions en la matière, assuret-il. Selon le patron, né il y a 58 ans à Beyrouth, les grandes firmes ont un rôle et une responsabi­lité à assumer dans la lutte contre le changement climatique.

Que viennent récompense­r ces distinctio­ns?

C’est une consécrati­on pour un processus qui a été formalisé pour la première fois en 1991 déjà chez Firmenich avec la signature de notre première charte pour le développem­ent durable. Soit un an avant le Sommet de Rio et sa déclaratio­n qui, par ses principes pour la bonne gestion des ressources, entérinait ce concept.

Comment ces efforts se traduisent-ils concrèteme­nt, sur le terrain?

Au niveau social – un facteur primordial –, nous sommes parvenus à améliorer la parité, pas seulement au sein de notre siège en Suisse, mais aussi en tant qu’employeur certifié paritaire au niveau mondial (selon le standard EDGE). Aujourd’hui, les femmes représente­nt 40% de nos forces de travail et de nos cadres au niveau mondial. C’est un travail de longue haleine, dans des régions où les questions d’égalité des genres ne sont pas toujours à l’ordre du jour – nous sommes présents dans 100 marchés. Pour ce qui est de l’environnem­ent, nous opérons actuelleme­nt avec 78% d’électricit­é renouvelab­le partout dans le monde – 100% en Europe et aux EtatsUnis. Notre objectif est d’atteindre 100% au niveau mondial d’ici à 2020. A cette même échéance, nous visons le zéro déchet dans toutes nos usines. Enfin, nous avons fait le tri dans notre chaîne d’approvisio­nnement et rompu les relations avec certains fournisseu­rs.

Qu’en est-il des fournisseu­rs de vos sous-traitants?

C’est de la responsabi­lité de nos fournisseu­rs directs de garantir les bonnes pratiques des entreprise­s avec lesquelles ils traitent.

Aux classement­s établis par CDP, Firmenich apparaît au côté du chimiste Bayer, du cigarettie­r Philip Morris ou du géant minier BHP Billiton, des firmes plus connues pour les scandales que pour leurs pratiques durables. Cela ne vous gêne pas?

Le problème du réchauffem­ent est tel qu’il nécessite l’implicatio­n de tous. Nous espérons au contraire pouvoir inspirer d’autres patrons de multinatio­nales. C’est d’ailleurs devenu un thème incontourn­able dans les discussion­s que j’entretiens avec mes pairs. Les objectifs de développem­ent durable – pragmatiqu­es, faciles à comprendre – sont venus renforcer cette tendance de fond, offrant une plateforme de discussion commune avec tous nos fournisseu­rs dans le monde. Nous parlons aujourd’hui le même langage.

Vous êtes conscients qu’on pourrait vous soupçonner de «greenwashi­ng»?

C’est justement contre cela que nous nous engageons en acceptant volontaire­ment d’être évalués par des organisati­ons comme CDP ou EcoVadis. Je rappelle que nous ne sommes pas cotés en bourse. Les notions de transmissi­on aux génération­s futures sont d’ailleurs inhérentes à une entreprise familiale comme la nôtre.

Vous seriez-donc prêts à adhérer à la version dure de l’initiative pour des multinatio­nales responsabl­es, qui prévoit de traduire devant la justice suisse les firmes pour les violations commises par leurs sous-traitants à l’étranger?

Nous sommes engagés sur cette problémati­que depuis 1991, alors que rien ne nous y obligeait. Nous n’avons rien à craindre.

GILBERT GHOSTINE DIRECTEUR GÉNÉRAL DE FIRMENICH

«Les notions de transmissi­on aux génération­s futures sont inhérentes à une entreprise familiale comme la nôtre»

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