Les entreprises suisses serrent les dents
Nestlé, Roche et Novartis ont décidé de maintenir leurs activités à Caracas. Mais recrutent beaucoup moins d’expatriés
Les troubles au Venezuela pèsent sur les relations commerciales du pays avec la Suisse. En 2018, les échanges économiques entre les deux Etats ont continué de dégringoler. Selon les statistiques de l'Administration fédérale des douanes, les importations en provenance de Caracas ont chuté de 7%, tandis que les exportations ont baissé de près de 36% pour atteindre les 49 millions de francs.
Si l'activité des entreprises helvétiques au Venezuela est au ralenti, c'est d'abord à cause de l'inflation, explique Pierino Lardi, vice-président de la Chambre de commerce suisso-vénézuélienne, qui vit sur place. «Une firme suisse comme Pharma, qui vend des médicaments, ne peut plus importer les matières premières nécessaires à la fabrication de ses produits, car les prix officiels sont devenus démesurés.» Et quand l'approvisionnement fonctionne comme d'habitude, ce sont les débouchés qui ne sont plus là. «En deux ans, Nestlé a réduit sa production de deux tiers, explique Pierino Lardi. Parce que les gens n'ont tout simplement plus les fonds pour acheter du lait en poudre, des biscuits et du chocolat.»
Ceux qui partent
Etant donné le climat politique, les Etats-Unis déconseillent officiellement de se rendre au Venezuela. Ce n'est pas encore le cas de la Suisse, mais certaines entreprises helvétiques ont tout de même choisi de partir. Le fabricant de machines Sulzer a totalement cessé ses activités au Venezuela fin 2016, confirme au Temps son porte-parole Rainer Weihofen. La firme développait là-bas des turbines et des systèmes de pompage, comme la Handelszeitung l'expliquait en 2017.
Les banques ont elles aussi déserté le pays. UBS et Credit Suisse ne l'ont pas officiellement quitté, mais opéreraient désormais principalement depuis la Colombie. Les tensions politiques ne sont peut-être pas la seule raison: plusieurs établissements helvétiques sont accusés par Washington d'avoir abrité les millions détournés des caisses de la compagnie nationale pétrolière, la PDVSA, par des dignitaires chavistes. Des comptes sont toujours bloqués en Suisse.
Ceux qui restent
«Mais la plupart des firmes suisses ont choisi de rester à Caracas, pour être là quand l'économie du pays redémarrera», précise Pierino Lardi, plein d'optimisme. Nestlé est toujours le premier employeur suisse du pays, avec quelque 4000 collaborateurs directs et indirects. En novembre dernier, la multinationale vantait les mérites de ses chocolats Savoy, qu'elle espérait vendre pour les fêtes de Noël. «Nous maintenons nos activités dans le pays, où nous avons cinq usines, affirme un porte-parole de Nestlé. Nous travaillons de plus en plus avec des fournisseurs locaux pour nous approvisionner en aliments et matériaux d'emballage du pays».
Roche et Novartis s'y trouvent encore également, mais dans une plus faible proportion: Novartis n'a pas d'usine sur place et emploie au Venezuela environ 50 personnes. Le constructeur Aliva Stump, lui, compte 2500 employés. Pour tourner, ces groupes font majoritairement appel à de la main-d'oeuvre locale ou issue de pays voisins, et font plus rarement venir le personnel qualifié de Suisse, pour des raisons de coûts, mais aussi de sécurité. Aujourd'hui, à peine 1200 ressortissants suisses vivent au Venezuela.
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Si l’activité des entreprises helvétiques au Venezuela est au ralenti, c’est d’abord à cause de l’inflation