Le Temps

Fillettes, soyez curieuses et audacieuse­s!

- MARIE-PIERRE GENECAND La princesse eSt le chevalier, jusqu’au 24 février, La Parfumerie, Genève.

A Genève, un spectacle tout public combat les clichés encore imposés aux enfants. C’est drôle et c’est piquant

Non, la curiosité n’est pas un vilain défaut. Et non, il ne faut pas forcément être un homme pour se montrer fougueux et courageux. La Compagnie Dont Stop Me Now, qui porte très bien son nom, combat ces deux clichés à La Parfumerie, à Genève, dans un spectacle remuant et malin, même s’il devient un peu trop bavard sur la fin.

La princesse eSt le chevalier est une ode à la joie, à la musique et à l’indépendan­ce d’esprit qui a la bonne idée de s’adresser aux petits. Six ans – l’âge conseillé – paraît un peu jeune lorsque, dans le dernier quart d’heure, les justiciers s’en prennent au Moloch de l’informatio­n sur le ton de «A bas les réseaux sociaux qui nous transforme­nt en veaux». Mais le dynamisme du jeu et la beauté des décors maintienne­nt l’effet de fascinatio­n.

Bienvenue chez Kaamelott. Comme l’illustre série, le spectacle de Steven Matthews se déroule au Moyen Age et fourmille de décalages comiques (Hubert, l’âne-taxi, Hashtag, l’oiseau de malheur, etc.).

La seule qui est très premier degré – et encore, elle a également ses saillies –, c’est Maylis, la jeune princesse (Charlotte Chabbey) qui n’est pas là pour rigoler. Elle a une mission: savoir si la terre est plate ou ronde. Chaque fois qu’elle pose la question à son roi de père (Jérôme Sire, parfaiteme­nt lâche), elle est sommée de se taire. Et si elle insiste, on lui fait miroiter le destin de sa mère (Justine Ruchat), disparue pour avoir également osé s’interroger sur les lois de l’univers. GG, pour Galileo Galilei

On l’a compris, dans ce récit, ce sont les filles les plus courageuse­s et les plus dégourdies. Ou alors, les déshérités. A l’image de Francis, le paysan musicien (Lorin Kopp) qui porte très bien la jupe et pousse parfaiteme­nt la chansonnet­te. Le troubadour est pauvre et ne pense qu’à deux choses: faire de la musique et nourrir sa famille sans le sou qui se meurt à petit feu. Les deux aventurier­s s’enfuient du château pour assouvir leur besoin de réponses, rencontren­t une foule de gens dont GG, pour Galileo Galilei (Lionel Perrinjaqu­et), et, après avoir eu très chaud, arrivent à faire triompher la quête de la vérité sur l’obscuranti­sme pour idiots. Ombres chinoises et paroles cryptées

Si le spectacle fonctionne si bien auprès du jeune public – il a fait salle comble l’an dernier et est repris cette année –, ce n’est pas seulement pour son credo et son ton comique. C’est aussi et surtout pour ses décors somptueux signés Capucine Léonard-Matta Plisson, assistée de Johanna Monnier.

Le principe? Des ombres chinoises qui rappellent le travail du cinéaste et dessinateu­r Michel Ocelot (Kirikou, Princes et princesses). Soit de subtiles frises en ombres chinoises représenta­nt les monts et montagnes, villes et villages que parcourent les jeunes aventurier­s après avoir quitté le château qui, lui aussi, affiche en contre-jour ses délicats contours. Et puis, il y a la musique de Mirko Verdesca, Steven Matthews et Simon Jaccard. Elle joue, elle également, un rôle capital en rythmant la cavalcade des fugitifs et en trouvant au final les accords et paroles «cryptées» de la réconcilia­tion.

«La princesse eSt le chevalier» est une ode à la joie, à la musique et à l’indépendan­ce d’esprit

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