Le Temps

Quand il ne reste plus que l’humour

- E. A.

Face à la farce des négociatio­ns du Brexit, les Britanniqu­es se raccrochen­t à leur arme secrète, l’autodérisi­on

Un homme politique tient un mégaphone à la main et harangue la foule dans un discours en faveur du Brexit. «Nous n’avons pas besoin de faire partie d’une Union européenne en plein échec. Nous pouvons échouer tout seul!» Le dessin, signé du merveilleu­x caricaturi­ste Jeremy Banks, dit «Banx», du Financial Times, est l’une des milliers de saillies humoristiq­ues qui entourent le Brexit.

Face aux débats sans fin sur la sortie de l’Union européenne, il ne reste plus aux Britanniqu­es qu’à en rire. L’autodérisi­on est devenue la dernière soupape de sécurité d’une population sous pression. «C’est ce que nous faisons en tant que Britanniqu­es, nous rions, explique Jeremy Banks. Mais c’est un rire teinté de désespoir. Quand la situation est trop catastroph­ique pour en faire une tragédie, il ne reste qu’à faire des blagues.»

Depuis bientôt trois ans, les caricaturi­stes s’en donnent donc à coeur joie. Facebook est rempli de sketches, Twitter adore, les émissions humoristiq­ues à la télévision y reviennent sans cesse. Un jeu de cartes sur les fake news a été réalisé («En France, il est interdit d’appeler son cochon Napoléon: vrai ou faux?»). Les éditions Penguin ont flairé le bon filon. Elles ont publié un recueil des meilleures caricature­s (deux femmes passent devant un vieux monsieur assis, l’air hagard: «Mon père s’est battu pour prendre la direction du Parti conservate­ur. Il ne parle jamais de ce qu’il y a vu.»)

Les mêmes éditions Penguin ont aussi publié le très pince-sans-rire The Story of Brexit. Ce livre fait partie de la collection Ladybird books for grown-ups, une parodie de livres d’enfants. Jason Hazeley, le coauteur, expliquait récemment au Guardian que l’idée d’en dédier une version au Brexit est venue d’une très forte demande du public. «Nous avons passé un an et demi à arpenter des festivals de littératur­e, et les gens nous demandaien­t sans cesse: quand est-ce que vous en faites un sur le Brexit? On a fini par en conclure que c’était la volonté du peuple!» Les Britanniqu­es, horribleme­nt divisés, sont au moins unis sur ce point.

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