Le Temps

Google s’attaque au marché du jeu vidéo

- ANOUCH SEYDTAGHIA @Anouch

La multinatio­nale californie­nne a présenté mardi soir Stadia, un service qui permettra de jouer sans console. Lancé dans le courant de l’année, il pourrait, si la technologi­e tient ses promesses, faire souffrir des acteurs établis tels que Nintendo et Sony

tC’est une entrée en force sur le marché du jeu vidéo qu’a annoncée Google mardi soir. La multinatio­nale américaine accélère sa diversific­ation en voulant devenir un acteur du jeu vidéo. Dans les mois à venir, Google lancera Stadia, un service de jeu vidéo en streaming, utilisable depuis un simple navigateur web, sans console.

L’annonce, pressentie depuis plusieurs jours, pourrait faire, ces prochains mois, mal aux acteurs bien établis du jeu vidéo que sont Microsoft, Sony ou encore Nintendo. Stadia doit fonctionne­r depuis n’importe quel navigateur web, que ce soit sur un ordinateur fixe ou portable, un smartphone ou une tablette. Plus besoin de console, plus besoin de CD: l’essentiel se passera dans les centres de données (data centers) de Google, où seront stockés les jeux. Ils seront accessible­s ensuite en streaming pour l’utilisateu­r final. Google ambitionne ainsi de devenir une sorte de Netflix du jeu vidéo. Ce marché a pesé au total plus de 94 milliards d’euros (106 milliards de francs) en 2018, selon le centre de réflexion français Idate. Selon celui-ci, la dématérial­isation permettra à terme de se passer de PC qu’il faut changer tous les trois ans environ et de consoles qu’il faut renouveler tous les quatre à cinq ans. «Révolution gigantesqu­e»

Ancienneme­nt connu sous le nom de Project Stream, Stadia ne sera rien de moins que «le moteur qui va redessiner les jeux et l’avenir», selon Jade Raymond, qui va prendre la tête du nouveau studio de création de jeux vidéo de Google. Celui-ci se nommera Stadia Games and Entertainm­ent et visera tant les joueurs que les créateurs de jeux. «Nous sommes à l’orée d’une révolution gigantesqu­e dans le jeu, qui va permettre un nouveau niveau de créativité pour les développeu­rs, maintenant que le data center est votre plateforme», a poursuivi Jade Raymond. Une révolution qui faisait déjà souffrir, mercredi, les actions de Sony (-3,37%) et Nintendo (-3,20%): ces géants japonais du marché des consoles pourraient perdre des clients, attirés par le service dématérial­isé de Google.

Google compte accélérer la dématérial­isation du jeu vidéo en promettant une puissance de calcul correspond­ant à celles d’une PS4 Pro et d’une Xbox One X combinées. Il faudra en plus bénéficier d’une connexion à internet rapide. La société a évoqué mardi un débit de 15 Mbit/s et d’un temps de latence de 40 millisecon­des avec ses serveurs. Google promet un lancement instantané des jeux. Il sera possible, affirme la société, de partager un écran pour jouer à plusieurs, et d’envoyer par e-mail un lien de sa partie à un ami pour qu’il la continue.

La multinatio­nale n’a pas encore dit quand exactement ce service sera lancé – ce devrait être dans le courant de l’année aux Etats-Unis, sans date précise non plus pour l’Europe. On ne connaît pas le montant total des investisse­ments. Aucun prix non plus n’a été articulé, et l’on ne sait pas encore s’il sera possible de jouer en payant un abonnement mensuel ou s’il s’agira de sessions de jeu à l’unité. Le géant du web commercial­isera une manette sans fil pour jouer, dont des photos ont été dévoilées, mais son prix demeure pour l’heure secret. Google assure que les affichages 4K, 8K et HDR seront supportés, avec une fluidité de 60 images par seconde (FPS).

En quête de blockbuste­rs

On ne sait pas encore non plus quels studios travailler­ont pour ce projet. Ce sera en tout cas certaineme­nt au début le cas d’Ubisoft, qui a déjà mené des tests avec la société américaine. Reste à savoir ce que feront les grands studios Activision, Electronic Arts ou encore Take Two. Ceux-ci ont des liens étroits avec Sony ou encore Microsoft pour la sortie de leurs jeux sur console. Lors de la présentati­on du service de Google, le jeu NBA 2K19 (Take Two) a été rapidement évoqué, indiquant que la société est sans doute en négociatio­ns avancées avec plusieurs éditeurs. Ce sera vital pour Stadia: il faudra absolument attirer rapidement les plus grands jeux sur le service pour le rendre attractif pour les internaute­s.

Stadia sera «le moteur qui va redessiner les jeux et l’avenir», affirme Jade Raymond, qui dirigera le nouveau studio de création de jeux vidéo de Google.

Plus besoin de console, plus besoin de CD: l’essentiel se passera dans les centres de données de Google, où seront stockés les jeux

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(STEPHEN LAM/REUTERS)

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