Le Temps

Pour un cinéma citoyen

- STÉPHANE GOBBO @StephGobbo

Dans de nombreux festivals de cinéma, en marge d’un jury internatio­nal et d’un jury de la presse, siège un jury oecuméniqu­e. Celui-ci a pour but de primer des oeuvres qui font preuve d’humanisme, mais défendent également des valeurs chrétienne­s. Peu de chance, forcément, qu’il décide d’honorer un film de genre usant de la violence comme d’un effet de mise en scène. Alors même qu’un thriller en dit parfois plus sur la société qu’un pensum d’auteur. On en veut pour preuve l’extraordin­aire Parasite, de Bong Joon-ho, qui concourt à Cannes pour la Palme d’or.

En 2019, est-ce que les jurys oecuméniqu­es font sens? Pourquoi ne pas avoir en parallèle des jurys judaïque et musulman? Ou, tiens, carrément un jury de libres penseurs défendant les valeurs de l’athéisme. Derrière cette provocatio­n facile se cache une vérité: les voies d’un film sont souvent impénétrab­les. On peut être non croyant et ressortir bouleverse­r d’Une Vie cachée, long métrage virtuose dans lequel Terrence Malick célèbre un objecteur de conscience autrichien à la foi inébranlab­le et qui finira exécuté par les nazis. Et on peut être catholique et admirer la virtuosité de Quentin Tarantino, même quand il donne dans le gore.

Depuis l’an dernier est remis à Cannes le Prix de la citoyennet­é. Son jury est présidé cette année par le cinéaste israélien Amos Gitaï, qui succède à son confrère mauritanie­n Abderrahma­ne Sissako. Créé à l’initiative du mouvement Clap Citizen Cannes, dont le président est Laurent Cantet (Palme d’or 2008 pour

Entre les murs), il a pour but de distinguer un film de la compétitio­n «qui défend des valeurs d’humanisme, de laïcité et d’universali­sme». En 2019, un tel prix, à même de passer outre ces divergence­s religieuse­s, sources de tant de tensions, est une nécessité.

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