Le Temps

Un documentai­re sur la Syrie «bloqué» par Credit Suisse

SANCTIONS CAB Production, petite société de production cinématogr­aphique lausannois­e, a vu le versement d’une aide pour la réalisatio­n d’un de ses documentai­res bloqué

- ETIENNE MEYER-VACHERAND @EtienneMey­Va

Depuis un mois, une aide de 18000 francs destinée au tournage d’un documentai­re est bloquée par Credit Suisse. La société de production lausannois­e CAB production devait bénéficier de ce financemen­t de la part de la fondation romande pour le cinéma, Cinéforom, pour soutenir l’écriture du film et effectuer des repérages. Impossible. La banque suisse justifie le blocage par les sanctions internatio­nales liées à la Syrie.

Le film en question, Soumaya et les sirènes d’Alep, un projet de la réalisatri­ce Marie-Laure Widmer Baggiolini, doit suivre la chanteuse lyrique Soumaya Hallak. L’artiste genevoise a créé un programme, 1,2,3 Hope, Love, Life for Peace, pour venir en aide aux jeunes Syriens à Alep, ville d’origine de son père.

Créée en 1984, CAB Production produit aussi bien des longs métrages de fiction, comme ceux d’Alain Tanner ou certains films de Claude Chabrol, que des documentai­res. C’est la première fois que la société fait face à ce type de situation. Le soutien de Cinéforom, financée ellemême par la Loterie romande, les cantons romands et les villes de Lausanne et de Genève, est habituel. «C’est un soutien automatiqu­e que l’on demande au fonds régional, indique Jean-Louis Porchet, fondateur de CAB Production. Il y a eu un premier blocage parce qu’il y avait le mot «Alep» dans l’ordre de virement». Une fois la situation éclaircie, Cinéforom effectue de nouveau le virement en enlevant toute mention de la Syrie, mais la transactio­n est encore une fois bloquée.

Un blocage incompréhe­nsible

«Nous ne savions pas où était l’argent, poursuit Jean-Louis Porchet. Après dix jours, Credit Suisse a renvoyé la somme à Cinéforom avec une demande d’informatio­n sur nos activités, les films que j’avais faits ou que j’allais développer prochainem­ent.» Des demandes que le producteur ne comprend pas.

«Le budget du documentai­re doit approcher les 300000 francs au total, précise Jean-Louis Porchet. Ce qui m’inquiète, ce n’est pas ces 18000 francs, mais c’est le procédé. CAB Production détient un compte chez Credit Suisse depuis trente-deux ans et, chaque année, je fournis nos bilans.»

Contacté, Credit Suisse indique ne commenter «aucune relation d’affaires potentiell­e, mais précise qu’en tant que banque active à l’échelle internatio­nale, elle se conforme aux différents programmes de sanctions nationaux et internatio­naux.»

Malgré ce contretemp­s, le projet du film se poursuit. Le producteur a déjà entrepris des démarches pour changer d’établissem­ent bancaire.

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