Le Temps

Neuvoo lève 40 millions de francs au Canada

RECRUTEMEN­T L’agrégateur d’emploi créé par des Romands en 2011 revendique 70 millions d’utilisateu­rs par mois et 56 millions de francs de revenus. Il vise la première place d’un marché convoité par Google

- RACHEL RICHTERICH @RRichteric­h

Son nom ne vous dit probableme­nt rien. «C’est du finnois, le présent du verbe conseiller», glisse son cofondateu­r Maxime Droux. Il y a pourtant de fortes chances qu’un chercheur d’emploi ou un recruteur soit tombé au moins une fois sur Neuvoo, qui référence en moyenne 30 millions d’emplois sur son site. La société créée en 2011 à Montréal par trois amis ayant grandi ensemble en Suisse vient de réussir là où beaucoup de jeunes entreprise­s trébuchent: lever 40 millions de francs en un seul tour.

La somme provient de la Caisse de dépôt et placement du Québec, l’un des plus importants fonds de pension canadiens. Elle doit permettre à l’entreprise de passer du stade de croissance à sa phase d’expansion.

Une étape déjà bien amorcée par l’entreprise, qui revendique 70 millions de visites par mois à travers le monde – plus d’un million en Suisse – et prévoit de dépasser les 100 millions de visiteurs d’ici janvier. Neuvoo compte aujourd’hui 200 collaborat­eurs couvrant 77 pays et génère 56 millions de francs de revenus.

Peu de frais initiaux et une prime au clic

«Il y a trois ans, nous étions dix fois moins nombreux, avec un chiffre d’affaires de 2 millions. Nous sommes bien partis pour franchir les 100 millions de francs l’an prochain», se félicite Maxime Droux. Cette croissance exponentie­lle, l’entreprise la doit à son fonctionne­ment, basé sur de faibles coûts initiaux et une rémunérati­on au clic, selon lui.

Neuvoo n’est pas à proprement parler un site d’offres d’emploi, mais un agrégateur, fonctionna­nt sur le principe de Trivago ou de Booking.com pour les voyages, par exemple. Autrement dit, un outil informatiq­ue qui collecte automatiqu­ement toutes les offres disponible­s sur la Toile et les transmet au candidat en fonction des critères de recherche qu’il a entrés. Parmi les acteurs les plus connus sur ce marché figurent Indeed (plus de 400 millions de visiteurs) et Google, qui a lancé récemment son pendant Google For Jobs en Europe, malgré les craintes d’abus de position dominante exprimées par ses concurrent­s.

«Les annonces d’emploi sont notre matière première et celle-ci est à dispositio­n librement sur internet», note Maxime Droux. Il s’agit d’offres visibles sur les sites des entreprise­s qui recrutent, mais aussi sur ceux d’agences de placement comme Adecco ou Randstad. Ainsi que sur les «job boards» (littéralem­ent «tableaux d’offres d’emploi»), comme Jobup, JobScout ou Monster. Le site regroupe ainsi 170000 offres en Suisse.

Les fournisseu­rs de Neuvoo en sont aussi les clients. «Ils nous paient en fonction du nombre de candidats que nous redirigeon­s vers leur site», poursuit Maxime Droux. L’entreprise a pour partenaire­s des géants comme Amazon ou Disney, en Suisse avec Adecco ou encore La Poste.

Calculer le coût d’une embauche

«Notre investisse­ment de départ, c’est l’achat de trafic candidat.» Soit le fait d’acquérir de la visibilité sur le web par le biais de bannières de pub ciblées, ou via un meilleur référencem­ent sur les moteurs de PUBLICITÉ recherche. Mais aussi en insérant des liens sur d’autres sites.

Les trois cofondateu­rs, Maxime Droux, Benjamin Philion («le geek de la bande») et Lucas Martinez («l’atout marketing») ont en parallèle déployé des efforts de sensibilis­ation auprès des entreprise­s pour les pousser à identifier leurs sources d’embauches et de placements sur internet. «Nombre de recruteurs ignorent ces données», regrette Maxime Droux. Elles leur permettrai­ent pourtant de calculer ce que leur coûte précisémen­t chaque embauche en termes de recrutemen­t. «De fait, en tant qu’intermédia­ire, nous sommes en mesure de calculer le retour sur investisse­ment.»

Une ambition, dépasser les concurrent­s

L’analogie financière est évidente dans l’open-space lausannois, siège européen de l’entreprise. Une dizaine de collaborat­eurs s’affairent au téléphone pour vendre cette matière première que sont les offres d’emploi, devenue source de rendement après avoir été requalifié­e comme du trafic par Neuvoo. Aux murs, des écrans affichent en temps réel les revenus réalisés dans chaque pays, avec évolution journalièr­e, mensuelle et annuelle.

Au milieu de cette salle des marchés, Maxime Droux laisse libre cours à ses ambitions, celle de dépasser ses principaux concurrent­s. Celle de développer un système de candidatur­e automatisé­e, qui permettrai­t de se rémunérer davantage, grâce au nombre de CV déposés. Celle, pourquoi pas un jour, de faire son entrée au Nasdaq. «Tout est possible, désormais.»

Et puis, peut-être que d’ici là, l’entreprise aura opté pour un nouveau nom, «plus facile à prononcer et à retenir»…

«Les annonces d’emploi sont notre matière première et celle-ci est à dispositio­n librement sur internet» MAXIME DROUX, COFONDATEU­R DE NEUVOO

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