Les principes toltèques appliqués aux jeunes générations
Les périodes de rentrées académiques sont particulièrement propices à une exposition immodérée à ces interrogations typiques des nouvelles générations. Les jeunes posent des questions d'une candeur si extravagante qu'elle frôle l'insolence. Des questions comme «N'y aurait-il pas moyen de contourner le règlement pour que je n'aie pas à refaire des examens?» ou, en version entretien d'embauche, «Puis-je prendre deux semaines de vacances durant ma période d'essai?». L'extraordinaire aplomb que l'on prête aux auteurs de ces pépites d'irrévérence a le don d'agacer les personnes qui y sont exposées. D'où des conclusions récurrentes et exaspérées sur l'absence de motivation, de respect et de savoir-être chez les jeunes.
Mais leurs questions sont-elles si étonnantes que cela? Lorsque, jusqu'aux fonctions les plus représentatives et les plus dignes de la société, les modèles auxquels lesdits jeunes sont exposés mentent et trichent de la façon la plus éhontée? Il est bien plus poli de demander respectueusement si l'on peut détourner le règlement que d'imposer ses mensonges sur l'espace public en regardant la caméra bien en face. Souvent, les entreprises, les cadres ou les patrons qui sont exposés et cités ne le sont pas pour leur comportement exemplaire et policé. Alors pourquoi s'offusquer de ce que les jeunes ne respectent plus des modèles que l'on ne leur a pas enseignés? Leurs questions, aussi potentiellement incongrues soient-elles, méritent-elles vraiment notre jugement? Est-il si légitime de faire des déductions sur l'état d'esprit de leurs auteurs?
La thérapie cognitive, largement reprise dans la littérature de développement personnel (notamment le best-seller de Miguel Angel Ruiz Les quatre accords toltèques), éclaire pourtant sur les pièges que représentent le manque de distance ou la généralisation abusive. Nous pourrions essayer d'accueillir les questions – même les plus exotiques – comme de simples questions et y répondre au plus près de notre conscience et de notre compétence professionnelle. Cela pourrait même être un exercice de réflexion assez salutaire. Pourquoi, au fond, est-il inapproprié de prendre des vacances durant une période d'essai? Et pourquoi faut-il appliquer un règlement malgré des inconvénients évidents pour la personne qui le subit? Peut-être qu'en arrière-fond de ces interrogations qui peuvent sembler si triviales réside une véritable quête du sens de l'équité organisationnelle ou un besoin que l'on se penche sur une situation personnelle fragilisée. Rien, en tout cas, qui appelle a priori le mépris.
Par ailleurs, nous partons du principe que les nouvelles générations savent comment se comporter de manière appropriée dans le contexte de l'entreprise. Mais à qui appartient-il de leur transmettre ce savoir-être? Est-ce à l'école, aux institutions de formation postobligatoires, ou le monde professionnel doit-il s'habituer à se confronter à des nouveaux collaborateurs qui n'ont jamais été «acculturés» au monde de l'entreprise, et qui n'ont donc aucune idée de ce qui se fait ou non en son sein? Des collaborateurs qui devront apprendre à décoder sur le terrain, à coups de maladresses s'ils ne sont pas coachés, ce qui compose le savoir-être, les logiques et politiques organisationnelles?
Le moins coûteux est de s'abstenir de juger la pertinence des questions posées, de prendre du recul afin d'éviter de faire des déductions hâtives sur les motivations de leur auteur et de faire de son mieux pour y répondre, en s'exprimant clairement et avec intégrité. D'après Miguel Angel Ruiz, c'est également en appliquant ces principes que l'on devient libre et heureux. Alors pourquoi attendre?
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