Le Temps

En montagne, le championna­t des championna­ts

- LIONEL PITTET @lionel_pittet

COURSE À PIED La huitième édition des KM de Chando, qui se déroule ce samedi en Valais, compte parmi les étapes du Vertical Kilometer World Circuit. Ce n’est qu’un des multiples championna­ts qui se disputent le marché en plein essor des épreuves d’altitude

La montée est terrible: 2000 mètres de dénivelé positif à avaler en 7,7 kilomètres seulement, pour rallier l’Illhorn depuis Vissoie, en passant par Chandolin. C’est le menu des courageux participan­ts de la huitième édition des KM de Chando, qui se déroulera ce samedi. Certains s’élanceront en mémoire de David Salamin, le fondateur aujourd’hui décédé; d’autres avec le simple espoir d’arriver au sommet; certains enfin en pensant au classement général du Vertical Kilometer World Circuit, dont l’épreuve valaisanne constitue la septième et avant-dernière étape.

Dans le secteur en plein essor de la course de montagne, les championna­ts parallèles se multiplien­t. Quelques-unes des épreuves de longue distance les plus prestigieu­ses sont réunies au sein de l’Ultra-Trail World Tour. La marque Salomon a mis sur pied les Golden Trail Series. La World Mountain Running Associatio­n organise en 2019 sa première Coupe du monde. Difficile de se retrouver dans cette jungle de labels. Ils revendique­nt tous leur identité propre, leurs particular­ités, mais la frontière est parfois fine. Une classique comme Sierre-Zinal répondait cette année de plusieurs programmes distincts.

«La course de montagne est un sport très jeune, dont le développem­ent n’est pas encore encadré par le règlement d’une fédération internatio­nale reconnue. A l’heure actuelle, il est donc assez facile de lancer des projets. Nous sommes clairement dans une phase de compétitio­n entre différents circuits», analyse Vincent Gumy, de SkyMan. Cette société anonyme basée à Genève administre deux «World Series», les Skyrunner (épreuves de 25 à 60 kilomètres aux parcours très techniques) et les Vertical Kilometer, plus courts, plus nerveux, sans descente. «Il y a un point de départ, un sommet, et le plus rapide en haut s’impose», reprend le responsabl­e.

Pas de profession­nalisme

Les KM de Chando appartienn­ent au tour depuis son apparition en 2017. L’organisatr­ice, Mélanie Beney, estime que cette affiliatio­n a permis à son événement d’attirer plus facilement quelques références du milieu, mais aussi d’augmenter la part des participan­ts étrangers (30% cette année). Cela a toutefois un coût. «Nous payons 2000 euros par an pour faire partie du circuit, et nous devons garantir un prize-money pour les meilleurs, détaille-t-elle. Chez nous, il est identique pour les femmes et les hommes: 250 euros pour le vainqueur, 150 pour le deuxième et 100 pour le troisième dans les deux catégories.»

Des récompense­s symbolique­s qui ne couvrent même pas les frais des lauréats. Le Vertical Kilometer World Circuit a beau regrouper des épreuves au Japon, en Norvège, en Grèce ou en Italie, il n’a pas les moyens de faire vivre ses champions. «Actuelleme­nt, il n’y a presque pas d’athlètes profession­nels, donc personne ne parvient à faire toutes les épreuves, souligne Vincent Gumy. Chacun dessine son programme en fonction de ses possibilit­és. Nous en sommes conscients et c’est pour cela que seuls les cinq meilleurs résultats comptent: cela permet à des coureurs de jouer le classement général sans aller partout.»

A deux étapes de l’épilogue de la saison, Yoann Caillot occupe le troisième rang de la hiérarchie masculine. Ce Français de 43 ans espère conserver sa place sur le podium, pas rentabilis­er ses performanc­es. «Le kilomètre vertical, ce n’est ni l’ultra-trail, ni le 100 mètres. Ce n’est qu’une question de voyages, de rencontres, de plaisir.» Il ne cache toutefois pas que le fait de concourir sur un circuit mondial ajoute à sa motivation. «Il y a une belle émulation entre les coureurs, et le côté championna­t pousse à soigner sa forme sur toute la saison.»

Recordman absent

Yoann Caillot se réjouit de courir de nouveau les KM de Chando. «Le cadre est tellement beau, avec tous ces 4000 valaisans, qu’on en oublie la difficulté du parcours», dit-il. Il sera l’un des coureurs les plus redoutable­s, parmi les 300 environ que Mélanie Beney attend. «Rejoindre le circuit des KV n’a pas permis une nette augmentati­on de la fréquentat­ion, remarque-t-elle. Mais la participat­ion de quelques grands noms motive les sponsors et fait rayonner l’épreuve autant que la région.»

Mais la multiplica­tion des circuits oblige les champions à choisir. L’an dernier, le Fribourgeo­is Rémi Bonnet avait fait sensation en effaçant des annales le record de l’épreuve, détenu par un certain Kilian Jornet. Il ne sera pas là cette fois. Soutenu par Salomon, il se doit de participer à la Ring of Steall Skyrace des Golden Trail Series de son sponsor, en Ecosse.

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland