Google et Apple accusés de s’aplatir devant la Chine
Sous la pression de Pékin, une application qui permettait aux Hongkongais de localiser les policiers sur une carte a été retirée par Apple. Les géants américains de la tech font l’objet de vives critiques
Ce n'est qu'une application, téléchargée à peine 50000 fois à Hongkong et 20000 fois hors de ce territoire, selon la société de recherche Sensor Tower. Mais le bannissement de l'application HKmap.live est surtout le symbole de la docilité des géants américains de la technologie vis-à-vis de la Chine. Sous la pression de Pékin, Apple a retiré ce programme de son magasin d'applications. Une décision vivement critiquée que les explications du directeur général Tim Cook, dans la nuit de jeudi à vendredi, n'ont pas apaisé.
L'affaire a éclaté ce mercredi. Le Quotidien du peuple, organe de presse officiel du régime chinois, s'en prend à l'application HKMap.live, qui permet au public de localiser les policiers de Hongkong sur une carte. Le programme est accusé de «soutenir les émeutiers». Mais surtout, le journal s'en prend à la marque à la pomme, qui l'héberge sur son App Store: «Est-ce qu'Apple a l'intention d'être complice des émeutiers?» écrit le quotidien, qui avertit: «Apple doit réfléchir aux conséquences de sa décision imprudente et malavisée.»
Jeu vidéo retiré
Dans les heures qui suivent, Apple s'exécute. HKMap.live est retiré de son App Store à Hongkong. Google propose toujours cette application mais en supprime une autre, un jeu vidéo baptisé The Revolution of Our Times, qui permettait de jouer le rôle d'un manifestant. C'est sur pression des autorités de Hongkong que Google s'est exécuté. Mais la multinationale a assuré que le jeu violait de toute façon une règle interne à propos d'«événements sensibles».
Ces décisions ont suscité un vent de colère, de la part des développeurs de ces applications, de manifestants à Hongkong mais aussi de politiciens américains. «Qui dirige vraiment Apple? Tim Cook ou Pékin?» a ainsi tweeté le sénateur républicain du Missouri Josh Hawley.
Tim Cook se défend
Au vu de l'importance de la polémique, Tim Cook a ainsi réagi dans la nuit de jeudi à vendredi en envoyant un e-mail à tous ses collaborateurs. La décision «n'a pas été facile», écrit-il. Son but est de «protéger les utilisateurs». Il affirme avoir reçu des «informations crédibles» de la police et d'utilisateurs à Hongkong, selon lesquelles l'application servait à «attaquer des agents de police isolés, des individus et des propriétés privées à des endroits où la police n'était pas présente».
Faux, affirment les développeurs de HKmap.live. Selon eux, il n'y a jamais eu de preuve attestant que l'application a été utilisée pour attaquer des personnes ou effectuer des destructions. Le programme ne fait que représenter sur une carte des informations issues de médias, de Facebook ou encore de Telegram.
Quartz visé
Ce n'est pas tout: en début de semaine, Apple a supprimé l'application du média en ligne américain Quartz de son App Store en Chine. Selon Quartz, c'est à cause de son traitement des manifestations à Hongkong. Une version non contredite par Apple, qui a expliqué que ce retrait est dû à Pékin qui estimait que cette application contrevenait à la loi chinoise.
Pour Google et Apple, les enjeux ne sont pas les mêmes. Le premier est quasiment absent de Chine, car ses services sont interdits par le régime – mais depuis des mois, Google songe à revenir dans le pays en respectant la censure. Apple, de son côté, réalise un cinquième de son chiffre d'affaires dans le pays – soit 52 milliards de dollars en 2018 – et y produit la quasi-totalité de ses appareils.
Blizzard dans la tourmente
A noter qu'en parallèle l'éditeur américain de jeux vidéo Blizzard est dans une tourmente identique dimanche. La société a suspendu durant un an un joueur professionnel appelé Blitzchung qui avait enfilé un masque similaire à celui porté par les manifestants pro-démocratie à Hongkong. Blizzard fait face depuis à un appel à boycott de la part de nombreux joueurs pour cette censure jugée injuste.
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