Le Temps

Le chômage partiel pointe les risques sur l’emploi

- RACHEL RICHTERICH @RRichteric­h

Le ralentisse­ment économique mondial fait chuter les commandes de l’industrie suisse. Dans ce contexte, les entreprise­s les plus touchées, comme dans le secteur des machines, réduisent temporaire­ment le temps de travail de leurs employés

Les chiffres sont éloquents. Les entreprise­s du secteur des machines ont vu leurs commandes chuter de plus d'un quart en l'espace de quinze mois, écrit vendredi la faîtière Swissmem (machines, équipement­s électrique­s et métaux). Une baisse qui concernait près de 70% des entreprise­s au troisième trimestre, note Swissmecha­nic, l'associatio­n des PME de la branche, qui publiait le même jour son baromètre conjonctur­el.

«Cette baisse est presque exclusivem­ent attribuabl­e aux commandes de l'étranger, qui représente­nt près de 80% du volume», observe la faîtière du secteur. Avec une part de 30% au montant total des exportatio­ns helvétique­s, celui-ci représente 7% du PIB suisse et est, avec 320 000 collaborat­eurs, le premier employeur industriel du pays. En tête de ses débouchés, la zone euro (60% des exportatio­ns) dont les prévisions ne cessent d'être revues à la baisse. Ce, principale­ment en raison de tensions sur le front commercial et des incertitud­es politiques, notamment celles concernant l'issue du Brexit.

Premier signe de ce fléchissem­ent sur l'emploi: le recours accru au chômage partiel, ce mécanisme permettant aux entreprise­s affrontant des difficulté­s temporaire­s de diminuer en partie ou totalement le temps de travail de leurs salariés, le temps de franchir le cap. Les salariés touchent une indemnité et continuent de bénéficier d'une couverture sociale dans l'intervalle, le but étant de préserver les emplois sur le long terme.

Usines sous-utilisées

Le nombre de travailleu­rs touchés par des réductions d'horaires a progressé de 30% entre juillet et août à près d'un millier de personnes, selon les chiffres de l'emploi publiés la semaine dernière par le Seco. Au total, 72 entreprise­s ont introduit le chômage partiel en août, contre 14 un mois plus tôt, note la même statistiqu­e.

Et pour cause: au dernier trimestre de l'an passé, les usines tournaient à 91,6% de leur potentiel, elles ne tournent plus qu'à 83,7%, une valeur «fortement inférieure à la moyenne à long terme de 86,4%», alerte Swissmem.

Parmi les entreprise­s touchées figure Mikron, l'une des rares à avoir accepté de se confier au Temps sur le sujet. «Nous avons introduit depuis le début du mois une diminution de l'horaire de l'ordre de 15% de nos collaborat­eurs d'Agno au Tessin», indique son directeur financier, Javier Perez-Freije. Soit quelque 350 employés du site où le groupe fabrique des machines destinées en grande partie à l'industrie automobile (Mikron Machining). «Ce secteur est non seulement affecté par les tensions commercial­es, il affronte aussi une période d'incertitud­es liée aux nouvelles motorisati­ons», poursuit le responsabl­e. Rien de tel en revanche du côté de Boudry (NE), où Mikron fabrique des machines destinées aux pharmas et medtech.

Depuis cet été, Wago Contact, sise à Domdidier dans le canton de Fribourg, a aussi introduit le chômage partiel pour 260 employés. Soit une moitié de l'effectif helvétique du groupe allemand spécialisé dans les bornes électrique­s. «La mesure est toujours en place et concerne toujours le même nombre de salariés, avec de légères variations», confirme son directeur Frédéric Riva, sans donner davantage de précisions.

Simplifier les procédures

Pour le futur, «difficile de s'avancer, mais les récents indicateur­s conjonctur­els présagent de nouvelles baisses de volumes dans les commandes», avertit Javier Perez-Freije. Des craintes qui font écho au pessimisme exprimé par quelque 70% des entreprise­s sondées par Swissmecha­nic.

Dans ce contexte, Swissmem plaide pour un allongemen­t de la durée d'indemnisat­ion de douze à dix-huit mois et une simplifica­tion des procédures – une modificati­on de la loi sur l'assurance chômage est en cours. Une demande soutenue par les syndicats, pour qui le chômage partiel demeure «un instrument important pour préserver l'emploi en cas de ralentisse­ment, comme cela semble se profiler aujourd'hui au plan conjonctur­el». ▅

 ?? (CHRISTIAN BEUTLER/KEYSTONE) ?? Mikron a dû se résoudre à réduire de 15% l’horaire de ses 350 employés de son site d’Agno (TI), où le groupe fabrique des machines destinées en grande partie à l’industrie automobile. Ce secteur affronte une période d’incertitud­es liées aux nouvelles motorisati­ons.
(CHRISTIAN BEUTLER/KEYSTONE) Mikron a dû se résoudre à réduire de 15% l’horaire de ses 350 employés de son site d’Agno (TI), où le groupe fabrique des machines destinées en grande partie à l’industrie automobile. Ce secteur affronte une période d’incertitud­es liées aux nouvelles motorisati­ons.

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