Décès sur un chantier: trois hommes face aux juges
En 2016, le chargement d’une grue était tombé sur un employé de la construction, le tuant
Un entrepreneur, son contremaître et son grutier ont fait face à la justice mardi à Yverdon-les-Bains. En 2016, un accident de grue avait coûté la vie à l’un de leurs collègues. Les trois hommes avaient tenté de maquiller les circonstances du drame.
Le Tribunal correctionnel de l’arrondissement de la Broye et du Nord vaudois jugeait ce mardi trois hommes. Un entrepreneur de 60 ans et deux de ses employés: un grutier de 47 ans, qui est aussi son neveu, et un contremaître de 54 ans. Tous trois sont mis en cause dans un accident de grue sur un chantier fatal à l’un de leurs collègues le 11 octobre 2016 à Villars-le-Grand.
Face à la cour, les trois hommes, tous Portugais, se sont enfermés dans leurs contradictions en présence du frère et de la mère de la victime, laquelle était «un ami», ont pourtant insisté deux d’entre eux.
Le jour du drame, le contremaître a utilisé la grue, alors qu’il n’était pas titulaire du permis ad hoc. Ce faisant, il a accidentellement fait basculer son lourd chargement mal arrimé sur deux palettes vers leur collègue. Grièvement blessé, l’homme est décédé le soir même à Berne. Suite à cela, le contremaître, son employeur et le grutier diplômé avaient choisi de faire croire aux policiers que c’est ce dernier qui pilotait la machine lors de l’accident. «C’était mon idée pour me couvrir», a avoué le contremaître.
Les trois hommes affirment toujours que ce grutier était sur le chantier de Villars-le-Grand lors de l’accident. Les échanges téléphoniques géolocalisés ayant eu lieu entre eux peu après le drame, et mis au jour par les enquêteurs, rendent pourtant cette affirmation peu crédible.
«Pourquoi avoir manipulé la grue vous-même si votre grutier était là?» a lancé le président à l’adresse du contremaître. «Des fois, ça m’arrivait de prendre la grue», s’est borné à répondre l’accusé. L’homme a aussi expliqué que des collègues prenaient parfois la grue sans avoir de permis. «Je l’ai fait moi-même plusieurs fois en deux ans dans cette entreprise. On ne pouvait pas refuser de le faire», a-t-il précisé.
«Mes ordres sont que personne ne touche la grue s’il n’a pas de permis», a contredit l’entrepreneur, sans convaincre. Et le sexagénaire d’accuser le frère du disparu d’avoir pris la grue contre ses ordres quelques jours avant le drame et de l’avoir «engueulé pour ça». «Je prends à 100% les mesures pour assurer la sécurité de mes employés», a-t-il aussi affirmé.
La Suva avait pourtant constaté à six reprises entre 2004 et 2016 que, dans son entreprise, les ouvriers manipulaient les grues sans permis.
L’entrepreneur est principalement prévenu d’homicide par négligence, de violations des règles de l’art de construire, d’instigation à dénonciation calomnieuse, d’instigation à induction de la justice en erreur et d’instigation à entrave à l’action pénale.
Jusqu’à 3 ans de prison
Son contremaître est accusé notamment d’homicide par négligence et de dénonciation calomnieuse, d’entrave à l’action pénale et d’instigation à induction de la justice en erreur. Le grutier enfin est poursuivi pour induction de la justice en erreur et entrave à l’action pénale. Le chef d’accusation d’homicide par négligence est passible de 3 années de prison au plus. Le verdict sera connu lundi.
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