Contre le discours de haine, #jesuislà
De nos jours, nombreux sont celles et ceux qui, notamment chez les jeunes générations, se renseignent et s'informent sur la Toile. Ce qui y est publié peut, dans bien des cas, forger l'opinion publique. Le web est un immense puits d'informations et de connaissances, il peut être un outil merveilleux mais il risque aussi, malheureusement, d'être un puissant outil de désinformation, tant il est parfois compliqué de trier le vrai du faux au milieu de la masse de ressources consultables.
De plus, en fréquentant un peu les réseaux sociaux et internet en général, il est pratiquement impossible d'éviter d'être confronté à de multiples reprises à des messages haineux. L'anonymat et le flou juridique autour des propos délictueux sur le web rendent certains intervenants beaucoup plus virulents et hargneux qu'ils ne le seraient ouvertement dans la vraie vie, déshumanisant ainsi leurs interlocuteurs. Face à cette haine, on peut souvent se sentir bien impuissant et ne pas savoir comment répondre, craindre de se faire agresser rien qu'en exprimant une opinion bienveillante, ou simplement en fournissant des informations sourcées remettant en question des fake news.
Face à ce triste constat, certains internautes ont décidé de se regrouper afin d'agir et de mettre fin à l'expansion de la haine sur les réseaux sociaux. Cette idée a germé en 2016 dans l'esprit de Mina Dennert, journaliste suédoise qui est à l'origine du mouvement et qui a créé le groupe suédois #jagärhär, regroupant actuellement 75000 membres environ. D'autres pays ont suivi, tels que l'Allemagne (#ichbinhier, 45000 membres). Au début de l'année 2019, la version francophone a vu le jour sous le hashtag #jesuislà et elle compte déjà près de 5000 membres.
De nombreuses études démontrent que la lecture des commentaires change la perception d'un article chez son lecteur. C'est la raison pour laquelle plusieurs groupes organisés distillent haine et désinformation en profitant des algorithmes pour être les plus visibles sous les articles de presse: de cette manière, ils peuvent influencer la masse silencieuse qui lit les commentaires et peut penser que, parce qu'un message est répété plusieurs fois, il correspond à la réalité. Les réseaux sociaux sont donc devenus un formidable outil de propagande, l'important n'étant pas forcément qu'une information soit réelle et prouvée, mais d'avoir les moyens de la propager, et de convaincre le plus grand nombre de personnes possible qu'elle exprime la réalité.
Il est assez impressionnant de voir à quel point une fake news peut prendre de l'ampleur grâce à des clics et des partages. Examiner ces fonctionnements, tenter d'en comprendre les rouages, réfléchir à comment contrer cette manipulation de masse est donc essentiel, car le jeu des groupuscules haineux est un jeu dangereux – mais bigrement efficace. Seul face à ce constat, il est très difficile d'agir…
Mais, puisque l'union fait la force, rejoindre des mouvements comme #jesuislà permet de prendre conscience que, grâce à un système organisé et à un nombre de membres assez important, il est possible de devenir une épine, de plus en plus grosse, dans le pied des organisations haineuses.
Pour atteindre cet objectif, le groupe #jesuislà fonctionne avec les mêmes outils que les groupes malveillants. Les membres commentent de façon bienveillante et étayée sous les parutions polémiques, puis vont liker ces commentaires mesurés afin de les faire remonter grâce aux algorithmes, les rendant ainsi visibles pour tout lecteur. Le but n'est pas de chercher à convaincre à tout prix, ni de répandre une pensée unique, mais bien de ne pas laisser une place aussi importante aux haineux de tous bords.
Le groupe est composé de personnes aux idées politiques, confessions et origines variées, qui se rejoignent sur la même envie qu'un dialogue, un échange d'idées sans haine soient possibles sur les réseaux sociaux. Chaque graine plantée contre la haine peut grandir, permettant ainsi un changement dans le paysage internet… Et les planteurs de graines sont, heureusement, de plus en plus nombreux!
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Les réseaux sociaux sont donc devenus un formidable outil de propagande