Le Temps

«L’inadmissib­le passivité du Conseil fédéral»

- RECUEILLIS PAR M. G. ET B. B. PROPOS

La climatolog­ue Martine Rebetez, professeur­e de l’Université de Neuchâtel et de l’Institut fédéral de recherches WSL de Birmensdor­f (ZH), critique vertement la politique climatique du gouverneme­nt

L’initiative sur la protection des glaciers est-elle encore nécessaire alors que le Conseil fédéral vise désormais le même but, soit la neutralité climatique en 2050? Il est vrai que cette initiative est relativeme­nt modérée par rapport à l'urgence climatique. C'est le minimum que la Suisse doit faire, elle qui est dotée d'un haut niveau de compétence­s et de ressources financière­s. Ce texte présente une énorme différence avec le plan du Conseil fédéral car celui-ci prétend pour une bonne partie payer des projets à l'étranger au lieu d'effectuer réellement la réduction des émissions de CO2 ici, alors que l'on sait aujourd'hui que ces projets sont généraleme­nt totalement inefficace­s.

Les initiants prétendent que la moitié des glaciers alpins disparaîtr­ont d’ici à 2050. Confirmez-vous cette affirmatio­n?En nombre de glaciers, c'est difficile à dire, mais une chose est sûre: avant la fin du siècle, il ne restera au mieux plus qu'un tiers du volume actuel de la glace, même si nous limitons le réchauffem­ent à 1,5 degré par rapport à l'ère préindustr­ielle. Depuis les années 1990, la fonte des glaciers n'a cessé de s'accélérer car les températur­es augmentent très rapidement.

Quel est désormais l’enjeu de cette initiative?Elle obligera le Conseil fédéral à prendre réellement des mesures. Ces trente dernières années, ce gouverneme­nt a fait preuve d'une passivité inadmissib­le, alors qu'il disposait pourtant de toutes les connaissan­ces scientifiq­ues pour agir. Aujourd'hui, nous avons aussi toutes les technologi­es nécessaire­s à dispositio­n. Ce qui manque, ce sont les encouragem­ents politiques et financiers pour favoriser le développem­ent des énergies renouvelab­les, et en particulie­r l'énergie solaire. Le bénéfice de la transition ira bien au-delà du changement climatique: nous n'aurons plus à payer la facture du pétrole et nous gagnerons en indépendan­ce énergétiqu­e. De plus, en termes de santé, nous réduirons les maladies dues à la pollution de l'air et tous les coûts et malheurs qu'elles engendrent.

CLIMATOLOG­UE

«Avant la fin du siècle, il ne restera au mieux plus qu’un tiers du volume actuel de la glace»

 ??  ?? MARTINE REBETEZ
MARTINE REBETEZ

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland