Les récessions existent-elles encore?
Dans l’oeil du cyclone de la crise de 20082009, je me rappelle avoir été sollicité sur la question de savoir comment l’économie mondiale pourrait sortir de cette phase compliquée de récession marquée. Au regard des mesures de stimulation monétaires dans les pays développés, Etats-Unis en tête, et de relance budgétaire en Chine, j’avais alors souvent évoqué une sortie de récession en racine carrée.
En d’autres termes, après un rebond important de la croissance mondiale, cette dernière était appelée à osciller entre des phases de ralentissement et d’accélération modérée sur une période de plusieurs années. A posteriori, l’idée exprimée n’était pas si mauvaise au regard des faits. En revanche, il faut reconnaître que les oscillations de la conjoncture ont perduré sur une période beaucoup plus longue que ce que j’avais anticipé alors.
Troisième atterrissage en douceur
La meilleure preuve est certainement à rechercher dans le fait que nous pourrions être confrontés actuellement à un troisième atterrissage en douceur de la croissance économique après ceux de 2011-2012 et 2015-2016. En effet, après s’être fait peur pendant quelques mois sur le caractère inéluctable d’une récession en 2020, les investisseurs semblent désormais convaincus qu’une stabilisation de la conjoncture mondiale est possible.
Pour s’en convaincre, il suffit d’observer le comportement des actifs risqués depuis la consolidation du mois d’août. Il est vrai que certains indicateurs avancés nourrissent de raisonnables espoirs quant à une amélioration des perspectives industrielles, dans un contexte où des conditions favorables sur le marché du travail ont permis au secteur des services de continuer à soutenir l’activité depuis quelques trimestres.
La seconde phase de la racine carrée serait-elle devenue permanente? En d’autres termes, serions-nous entrés dans un monde où les récessions sont désormais exclues? Certains défendent cette thèse. On connaît la propension des investisseurs à se convaincre de l’idée que «cette fois, c’est différent» pour justifier un optimiste qui se révèle souvent excessif, ces «nouvelles théories» ne résistant pas à l’épreuve des faits.
Les nombreuses incertitudes, capables de provoquer un choc de confiance, empêchent de considérer que le risque de récession n’est plus pertinent dans le contexte économique actuel et futur
Je reste sceptique sur l’idée de la «mort définitive» de la récession autant que je l’étais sur celle qui prévalait après 2005 concernant la mort des cycles économiques! Ce qui ne veut pas dire que je réfute la possibilité de voir un atterrissage en douceur de l’activité au cours des prochains mois, au contraire.
Cependant, il y a trop d’incertitudes de toute nature, capables de provoquer un choc de confiance, pour considérer que le risque de récession n’est plus pertinent dans le contexte économique actuel et futur. Dès lors, gérer les risques demeure la priorité plutôt que la recherche de rendement à tout prix, même si les perspectives de performance des actifs financiers devraient être nettement plus modérées en 2020.
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