Le Temps

Le tropisme asiatique du corps estudianti­n

- SARAH ZEINES @SarahZeine­s

Le multicultu­ralisme estudianti­n de l’Institut de hautes études internatio­nales et du développem­ent est le fruit d’une évolution initiée par l’histoire mondiale. Grâce à une sélection rigoureuse, la diversité continue à gagner en force, au détriment des Confédérés

Attirer les leaders de demain des quatre coins du monde: le défi que s'est lancé l'Institut de hautes études internatio­nales et du développem­ent (IHEID) a le mérite d'être ambitieux. «Notre établissem­ent a toujours accueilli des étudiants étrangers, note Laurence Algarra, adjointe de direction. L'internatio­nalisation fait partie de notre ADN et de notre vocation globale.»

L'IHEID est né en 2007 de la fusion entre l'Institut universita­ire des hautes études internatio­nales (IUHEI) et l'Institut universita­ire d'études du développem­ent (IUED). L'histoire a initialeme­nt joué un rôle clé dans la compositio­n des corps estudianti­ns des deux instituts pères.

Des exilés

Pendant l'entre-deux-guerres, les élèves de l'IUHEI venaient principale­ment des Etats-Unis et d'Europe. Nombre d'entre eux étaient des exilés, fuyant les régimes fasciste ou nazi. Après la Seconde Guerre mondiale, les étudiants venaient à Genève pour échapper aux régimes communiste­s. De son côté, l'Institut universita­ire d'études du développem­ent (IUED) a accueilli par tradition beaucoup d'étudiants venant de l'Afrique francophon­e.

L'IHEID utilise aujourd'hui divers canaux pour se faire connaître auprès de talents dans une centaine de pays. «Les étudiants étrangers sont notamment recrutés à travers des campagnes dans les médias sociaux, explique Laurence Algarra. Les présentati­ons de professeur­s, d'alumni ou de nos étudiants d'échange dans des université­s, voire parfois dans des salons spécialisé­s, y contribuen­t aussi. Cela dit, nos élèves viennent principale­ment sur la recommanda­tion de professeur­s, d'amis ou de parents.» Une politique d'admission sélective qui vise à renforcer la réputation de l'école et n'est pas toujours comprise en Suisse: «Si l'Institut devait admettre automatiqu­ement tout étudiant ayant un bachelor d'une université suisse dans une de ses discipline­s ou un de ses domaines, explique le directeur de l'IHEID, Philippe Burrin, il lui serait difficile d'être internatio­nal comme il l'est avec une majorité de ses étudiants venant du dehors de l'Europe.»

88% d’étudiants étrangers

La fin du programme de licences, en 2007, et la spécialisa­tion du nouvel institut dans des programmes de masters et de doctorats sélectifs ont marqué un élargissem­ent des stratégies de recrutemen­t internatio­nales. Aujourd'hui, 29% des étudiants viennent d'Asie, 28% d'Europe, 10% d'Amérique du Sud, 13% d'Amérique du Nord, 7% d'Afrique et 1% d'Océanie. La part des étudiants suisses, quant à elle, est tombée de 23 à 12%. Cette ouverture et ses conséquenc­es ont fait grincer des dents dans certains milieux genevois qui avaient toujours vu cette institutio­n comme un moyen privilégié d'assurer à leurs enfants des carrières à l'internatio­nal.

Pour accueillir ces élèves étrangers, les obstacles sont légion. «Nous avons parfois des difficulté­s à obtenir des permis de séjour, reconnaît Laurence Algarra. Par ailleurs, même si nous attribuons un nombre important de bourses, le manque de soutien financier détourne des étudiants de venir. Un autre problème est le logement. Heureuseme­nt, grâce à la générosité du fondateur de l'Union bancaire privé et de sa famille, l'Institut a pu en 2012 ouvrir les portes de la Maison des étudiants Edgar et Danièle de Picciotto. Ce bâtiment offre près de 250 lits. En septembre 2020, l'Institut inaugurera, grâce à un autre donateur, sa nouvelle résidence étudiante, construite par le célèbre architecte japonais Kengo Kuma et qui pourra accueillir plus de 650 résidents.»

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