Le Temps

La France est aussi créatrice de sociétés

ENTREPRENE­URIAT Jamais autant de sociétés n’ont été créées en France. Au pays des grèves et des blocages sociaux, l’initiative privée se porte particuliè­rement bien

- RICHARD WERLY t @LTwerly

La France économique paraît de plus en plus déconnecté­e de la France sociale et politique. Alors qu’en matière de réforme les changement­s lancés par Emmanuel Macron donnent lieu à des accoucheme­nts douloureux, le paysage entreprene­urial est, lui, en pleine transforma­tion.

Selon l’Institut national de la statistiqu­e (Insee), l’année 2019 a enregistré un nombre record de créations d’entreprise­s: plus de 815000 sociétés ont été créées (+17,9% sur un an). Le segment le plus dynamique est celui de la microentre­prise, statut créé en 2008 sous la présidence de Nicolas Sarkozy, qui permet à une personne de se déclarer entreprene­ur en bénéfician­t de facilités administra­tives et d’exemptions fiscales jusqu’à un certain niveau de revenu. Une entreprise française créée en 2019 sur quatre est une autoentrep­rise.

La France compte ainsi 1,2 million d’autoentrep­reneurs.

Ce bond s’explique, selon l’Insee, par trois phénomènes: l’ubérisatio­n de l’économie (beaucoup de chauffeurs privés ont le statut d’autoentrep­reneur), la perte de confiance des Français dans leurs employeurs et l’afflux d’investisse­ments étrangers. Début 2019, un sondage réalisé par Elabe pour l’Institut de l’entreprise (un organe émanant du patronat) révélait que 71% des Français interrogés ont une bonne image du secteur privé et que 42% ne font pas confiance à leurs patrons.Quitte à abandonner le statut de salarié, les Français préfèrent donc devenir leur propre patron.

«Réel besoin de souplesse»

«Ce statut remédie aux insuffisan­ces de l’organisati­on française du travail. Il trahit un réel besoin de souplesse chez les actifs», justifiait l’ex-ministre de droite Hervé Novelli lors d’un récent symposium du think tank Génération Libre. «Une piste d’améliorati­on pourrait être d’aller plus loin en autorisant les autoentrep­reneurs à conquérir d’autres marchés que les services à la personne et de les protéger contre les requalific­ations en contrat de travail. Les autoentrep­reneurs devraient pouvoir assurer n’importe quelle mission dans les entreprise­s, et la société sortir doucement du tout salariat.»

Le reste du paysage entreprene­urial incite aussi à l’optimisme. Sur les 815257 entreprise­s nouvelles enregistré­es l’an passé (contre 691283 en 2018) figurent 210505 entreprise­s individuel­les classiques (+15,7%) et 218426 sociétés (+8,6%).

Le nombre d’entreprise­s en difficulté a baissé: l’Insee note 42076 ouvertures de procédure collective (en vue d’un dépôt de bilan) en 2019. La Banque de France estimait en octobre que le nombre de défaillanc­es sur un an a diminué de 3,8% à 51890 entreprise­s en cessation d’activité.

Ces chiffres sont à relier avec ceux des investisse­ments étrangers en France, en hausse depuis le début du quinquenna­t d’Emmanuel Macron. Selon le baromètre de l’attractivi­té française, la France a bénéficié de 1027 projets annoncés en 2018, ce qui la place devant l’Allemagne (973 projets) et derrière le Royaume-Uni (1054 projets). ▅

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