La France est aussi créatrice de sociétés
ENTREPRENEURIAT Jamais autant de sociétés n’ont été créées en France. Au pays des grèves et des blocages sociaux, l’initiative privée se porte particulièrement bien
La France économique paraît de plus en plus déconnectée de la France sociale et politique. Alors qu’en matière de réforme les changements lancés par Emmanuel Macron donnent lieu à des accouchements douloureux, le paysage entrepreneurial est, lui, en pleine transformation.
Selon l’Institut national de la statistique (Insee), l’année 2019 a enregistré un nombre record de créations d’entreprises: plus de 815000 sociétés ont été créées (+17,9% sur un an). Le segment le plus dynamique est celui de la microentreprise, statut créé en 2008 sous la présidence de Nicolas Sarkozy, qui permet à une personne de se déclarer entrepreneur en bénéficiant de facilités administratives et d’exemptions fiscales jusqu’à un certain niveau de revenu. Une entreprise française créée en 2019 sur quatre est une autoentreprise.
La France compte ainsi 1,2 million d’autoentrepreneurs.
Ce bond s’explique, selon l’Insee, par trois phénomènes: l’ubérisation de l’économie (beaucoup de chauffeurs privés ont le statut d’autoentrepreneur), la perte de confiance des Français dans leurs employeurs et l’afflux d’investissements étrangers. Début 2019, un sondage réalisé par Elabe pour l’Institut de l’entreprise (un organe émanant du patronat) révélait que 71% des Français interrogés ont une bonne image du secteur privé et que 42% ne font pas confiance à leurs patrons.Quitte à abandonner le statut de salarié, les Français préfèrent donc devenir leur propre patron.
«Réel besoin de souplesse»
«Ce statut remédie aux insuffisances de l’organisation française du travail. Il trahit un réel besoin de souplesse chez les actifs», justifiait l’ex-ministre de droite Hervé Novelli lors d’un récent symposium du think tank Génération Libre. «Une piste d’amélioration pourrait être d’aller plus loin en autorisant les autoentrepreneurs à conquérir d’autres marchés que les services à la personne et de les protéger contre les requalifications en contrat de travail. Les autoentrepreneurs devraient pouvoir assurer n’importe quelle mission dans les entreprises, et la société sortir doucement du tout salariat.»
Le reste du paysage entrepreneurial incite aussi à l’optimisme. Sur les 815257 entreprises nouvelles enregistrées l’an passé (contre 691283 en 2018) figurent 210505 entreprises individuelles classiques (+15,7%) et 218426 sociétés (+8,6%).
Le nombre d’entreprises en difficulté a baissé: l’Insee note 42076 ouvertures de procédure collective (en vue d’un dépôt de bilan) en 2019. La Banque de France estimait en octobre que le nombre de défaillances sur un an a diminué de 3,8% à 51890 entreprises en cessation d’activité.
Ces chiffres sont à relier avec ceux des investissements étrangers en France, en hausse depuis le début du quinquennat d’Emmanuel Macron. Selon le baromètre de l’attractivité française, la France a bénéficié de 1027 projets annoncés en 2018, ce qui la place devant l’Allemagne (973 projets) et derrière le Royaume-Uni (1054 projets). ▅