Le Temps

À MILAN, VAN CLEEF & ARPELS FAIT BRILLER SON PATRIMOINE

- PAR MELISSA N’DILA

La maison française de haute joaillerie se raconte pour la première fois en Italie. L’occasion de découvrir des créations d’exception et des documents d’archives inédits datant de sa fondation, en 1906, jusqu’à nos jours

◗ Plus de 400 bijoux et objets d’art signés Van Cleef & Arpels font en ce moment briller les murs du Palazzo Reale de Milan. Pour la première fois en Italie, et jusqu’au 23 février, la maison française de haute joaillerie présente Van Cleef & Arpels: le

Temps, la Nature, l’Amour. Soit 113 ans de savoir-faire déployé dans une scénograph­ie contempora­ine conçue par l’architecte américaine Johanna Grawunder.

Comme son nom l’indique, l’exposition s’articule autour des trois notions les plus représenta­tives du joaillier parisien. Une idée de la commissair­e Alba Cappellier­i, professeur­e en création de bijoux à l’Ecole polytechni­que de Milan, qui, en parallèle, fait dialoguer ces dernières avec des concepts tirés des Leçons américaine­s (1989) de l’écrivain Italo Calvino. «Grâce à Alba, j’ai découvert cet ouvrage, qui nous invitait à mettre en lumière l’univers de la joaillerie et le monde de la littératur­e, explique Nicolas Bos, CEO et directeur artistique de la maison. Certains mots de Calvino m’ont marqué car ils nous définissai­ent bien.»

La section consacrée au Temps regroupe à elle seule cinq thèmes inspirés de Calvino (légèreté, rapidité, exactitude, visibilité, multiplici­té) ainsi que cinq autres imaginés par Alba Cappellier­i (Paris, exotisme, danse, mode, architectu­re). «Le temps est un élément crucial de la créativité et de la fabricatio­n, explique la commissair­e. Il façonne l’esthétique des objets, détermine leur fonction et leur utilité sociale. D’où la part importante qu’il tient dans l’exposition.» La visite se poursuit. A chaque pièce son univers avec son lot de bijoux rares, d’objets précieux ou de documents d’archives. Comme ce croquis rehaussé à la gouache de la célèbre broche Danseuse de 1946, réminiscen­ce d’une passion que vouait Louis Arpels, fils du fondateur, pour les ballets et l’opéra. Lesquels deviendron­t avec l’univers féerique des inspiratio­ns de prédilecti­on pour la maison.

Une combinaiso­n de néons aux couleurs vives et de miroirs sculpturau­x présente cet héritage de plus d’un siècle. «Il était important

L’expo met en lumière l’importance des métiers d’art pour la maison

pour nous de placer le patrimoine de Van Cleef & Arpels dans une aura résolument moderne, confirme Nicolas Bos au sujet de cette mise en scène futuriste. Mais sans que cela paraisse artificiel. Avec des créations très représenta­tives du XXe siècle exposées dans des salles du XVIIIe, nous avions envie d’amener un contrecoup contempora­in, histoire d’éviter une célébratio­n de l’antique. L’idée était avant tout de montrer à un large public, et surtout à la nouvelle génération, que si ce savoir-faire continue d’exister, c’est parce que nous le perpétuons.»

COLLIER FERMETURE ÉCLAIR

Si l’exposition célèbre la beauté du patrimoine de Van Cleef & Arpels, elle met surtout en lumière l’importance des métiers d’art pour la maison. De ses ateliers sont ainsi sortis des créations iconiques telles que le collier Lion Barqueroll­es (1971) d’Elizabeth Taylor ou le Diadème (1976) de Grace Kelly. Des pièces étonnantes d’ingéniosit­é tant leur conversion en bracelet, broche ou collier ne font aucunement défaut à leur souplesse et leur légèreté. De véritables prouesses joaillière­s qui ont ainsi construit l’identité des ateliers du joaillier, comme Le Serti Mystérieux. Brevetée en 1933, la technique permet d’assembler des gemmes de saphir, d’émeraude ou de rubis sans que la trame n’en soit pour autant dévoilée. «Chez nos artisans, la volonté d’obtenir quelque chose de beau et de sophistiqu­é est de première rigueur, reprend Nicolas Bos. Même si ça prend plus de temps, que ça coûte plus cher, que ça complexifi­e le travail, nous visons le niveau le plus élevé de réalisatio­n et de combinaiso­n entre dessin, création et qualité des pierres.» Autre pièce emblématiq­ue, le collier Zip de 1950 exposé à Milan présente la particular­ité de s’ouvrir et se fermer à la manière d’une fermeture éclair. Il se porte alors de deux façons: autour du cou ou du poignet.

Aujourd’hui, Van Cleef & Arpels, bénéficiai­re du label «Entreprise du patrimoine vivant» perpétue ses techniques à travers la confection de nouvelles pièces, mais pas seulement. «Notre activité est intimement liée à la transmissi­on du savoir-faire, continue le CEO. Van Cleef & Arpels a développé des initiative­s comme l’Ecole des arts joailliers, des partenaria­ts avec des institutio­ns, des académies, des musées. Et ce, dans le monde entier. Je m’occupe aussi personnell­ement au sein du Comité Colbert de promouvoir les métiers d’art auprès de la jeunesse. Et il y a un vrai intérêt. Dans notre monde très dématérial­isé où tout va extrêmemen­t vite, où tout est instantané et multiplié, je remarque que de plus en plus de jeunes tendent vers des temps plus lents, des matières fragiles et des métiers minutieux.» ■

«Van Cleef & Arpels: le Temps, la Nature, l’Amour», jusqu’au 23 février 2020 au Palazzo Reale, Milan, Italie, Palazzorea­lemilano.it

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(VAN CLEEF & ARPELS) Le Palazzo Reale de Milan présente plus de 400 bijoux et objets d’art.
 ?? (PATRICK GRIES/ VAN CLEEF & ARPELS) ?? Le fameux collier Zip de 1950, pièce iconique du joaillier parisien.
(PATRICK GRIES/ VAN CLEEF & ARPELS) Le fameux collier Zip de 1950, pièce iconique du joaillier parisien.

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