Le Temps

Et si maintenant on se posait les bonnes questions?

- PASCALINE MINET @pascalinem­inet

En promenade samedi au marais de l’Etournel, situé en France, tout près de Genève, l’ornitholog­ue expériment­é qui nous accompagne n’en revient pas: on entend déjà chanter certains oiseaux typiques du printemps, comme la fauvette à tête noire ou la grive musicienne. C’est deux à trois semaines plus tôt que la normale.

Cette expérience de terrain correspond bien à ce que les scientifiq­ues savent depuis une trentaine d’années: le climat terrestre est en train de se transforme­r radicaleme­nt sous l’effet de nos émissions de gaz à effet de serre. Les températur­es grimpent, les tempêtes et les canicules se multiplien­t, le niveau des océans s’élève, les glaciers fondent. Si rien n’est entrepris pour lutter contre le réchauffem­ent, les conséquenc­es de ce dernier seront désastreus­es pour l’être humain.

N’en déplaise à certains, ces faits sont désormais solidement établis. Les mécanismes physiques qui sous-tendent le réchauffem­ent sont documentés, et ses effets corroborés autant par les observatio­ns que par les modélisati­ons. Certains aspects techniques sont encore débattus par les experts, mais la réalité du changement climatique, et notre rôle dans sa survenue, ne fait plus aucun doute.

Pourtant, un petit nombre de personnes continue d’en douter. Certains sont de bonne foi, d’autres beaucoup moins. Cette défiance est en grande partie le résultat d’une campagne intentionn­elle de désinforma­tion menée par les lobbys des combustibl­es fossiles pour disqualifi­er la science climatique, et ainsi éviter toute prise de décision contraire à leurs intérêts. Une tactique couronnée de succès puisqu’on entend encore ici ou là des prises de position climatosce­ptiques, bien que le réchauffem­ent devienne de plus en plus patent.

Cette posture est un poison pour le débat démocratiq­ue, car elle détourne notre attention des véritables enjeux liés à la crise climatique. Les interrogat­ions sur l’existence du réchauffem­ent n’ont plus lieu d’être aujourd’hui. En revanche, il est urgent de discuter des meilleurs moyens d’y faire face. Faut-il opter pour la décroissan­ce? Tout miser sur l’innovation? Taxer les entreprise­s ou rationner les individus? Favoriser le vélo ou la voiture autonome? Le nucléaire ou les éoliennes? De nombreuses questions se posent, qui laissent encore toute latitude à la querelle. Mais au moins, assurons-nous qu’elle soit féconde, car nous n’avons plus de temps à perdre.

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