Même s’il n’y a fait aucune victime, Covid-19 est déjà en Suisse
La propagation de Covid-19 s’est soudainement accélérée à travers le monde. L’Organisation mondiale de la santé parle d’une «éventuelle» pandémie. Cette prudence oratoire vise à contenir tout effet de panique. Dans les faits, le phénomène n’en est pas moins global. Il rend concrète l’interdépendance dans laquelle s’est construite l’économie planétaire, au centre de laquelle la Chine pèse d’un poids extravagant. Il teste également la crédibilité de la parole politique, jusqu’en Suisse.
Au total, 78000 personnes ont été contaminées, dans 30 pays, à l’heure où nous écrivons ces lignes. En dehors du foyer chinois, la Corée du Sud et l’Iran sont les deux territoires les plus atteints. En Europe, l’Italie est devenue le pays le plus touché du continent avec six décès en quarante-huit heures. La Péninsule compte désormais plus de 200 personnes contaminées, dont la grande majorité dans la seule Lombardie. Paralyser la région la plus industrieuse de l’Italie et contaminer des personnes dans de minuscules localités: difficile de trouver une image plus forte pour montrer que les échanges mondialisés irriguent la planète dans ses moindres recoins.
En Suisse, 300 cas suspects ont été testés. Aucun ne s’est révélé positif. Le conseiller fédéral chargé de la Santé est apparu pour la première fois en conférence de presse pour aborder cette question du coronavirus. Alain Berset l’a affirmé: le pays est prêt. Les tests vont être intensifiés, notamment au Tessin, en Valais et dans les Grisons, les régions les plus proches de l’Italie touchée. Une campagne d’information est lancée: des flyers seront distribués. A Genève, les capacités du laboratoire de référence, capable de détecter les cas de coronavirus, vont augmenter.
La parole ministérielle a un but: rassurer la population. Bloquer la frontière avec l’Italie, interdire les vols depuis la Chine et systématiser les tests aux douanes? Autant de mesures non probantes dans la situation que vit la Confédération, assène Alain Berset. Prudence et recherche de la proportion guident donc pour l’heure l’action politique en Suisse. On peut le comprendre. Surcharger aujourd’hui les services de santé, dont on pourrait avoir massivement besoin dans les jours qui viennent, n’a pas de sens. Néanmoins, on peut également espérer que les autorités, tout en prononçant ces mots rassurants, savent dans le détail quand et comment déployer les mesures qui pourraient suivre.
Car, même dans notre pays épargné, le virus est déjà là. Dans les entreprises, les ressources humaines ont déjà prié certains salariés revenant de Milan ou de Téhéran de travailler de chez eux. Les familles de ces personnes mises en quarantaine sont ainsi directement concernées. La population et l’économie suisses sont donc déjà touchées. L’organisation du quotidien commence à intégrer l’«éventuelle» pandémie. Espérons que si cet adjectif prudent tombe, la Suisse saura prendre les mesures adéquates. ▅
Objectif: rassurer la population