Le Temps

Le coronaviru­s arrive en Suisse

Un premier cas de personne touchée par le virus a été rendu public hier après-midi. Il s’agit d’un Tessinois de 70 ans, infecté dans la région de Milan

- BERNARD WUTHRICH, BERNE @BdWuthrich

■ Le message des autorités est rassurant: «Nous estimons être dans une situation normale.» Il n’y a donc pas lieu de prendre des mesures spectacula­ires

■ Au Tessin, il est impossible de savoir si d’autres personnes ont été infectées. Les hôpitaux du canton mettent en place des tests de détection rapides

■ Le ministre de la Santé, Alain Berset, s’est rendu à Rome pour une conférence avec ses homologues de plusieurs pays limitrophe­s de l’Italie

«Nous prendrons des mesures lorsque nous aurons le sentiment de ne plus avoir la chaîne de transmissi­on du virus sous contrôle.» Chef de la division des maladies transmissi­bles à l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), Daniel Koch estime que la détection d’un premier cas avéré de coronaviru­s au Tessin ne suffit pas encore à décréter des fermetures d’écoles ou de frontières ou à interdire des manifestat­ions telles que le carnaval. Pour les écoles, c’est d’autant moins justifié qu’il y a cette semaine les vacances de février dans le canton du sud des Alpes. «Il ne serait de toute manière pas indiqué de fermer toutes les écoles. Mais si un cas suspect se présente dans une école, on peut prendre une mesure de quarantain­e comme cela s’est fait en France», suppose-t-il.

Le premier cas de coronaviru­s avéré concerne un septuagéna­ire qui a séjourné près de Milan le 15 février. Les premiers symptômes – respiratoi­res, précise Daniel Koch – sont apparus le 17 février. L’homme est resté à la maison. Il a été testé lundi. L’analyse effectuée au Centre national de référence pour les infections virales émergentes (Crive), à Genève, a confirmé le soupçon d’une infection par le coronaviru­s.

«Cela ne change rien à l’évaluation du risque, qui demeure modéré pour la population suisse. Nous estimons être encore dans une situation normale. Si cela n’était plus le cas, nous proposerio­ns un train de mesures au Conseil fédéral», diagnostiq­ue le directeur de l’OFSP, Pascal Strupler. «On s’attendait à ce premier cas. Il est là. On met en route le dispositif qui a été prévu et qui devrait nous permettre de détecter d’autres éventuels cas suspects suffisamme­nt tôt», enchaîne Daniel Koch.

Les proches du patient ont été ou seront placés en quarantain­e.

Informatio­n à la frontière

L’OFSP va renforcer l’informatio­n à la frontière italo-suisse. Des affiches y seront apposées ces prochains jours et des flyers distribués. «Les mesures d’hygiène à prendre seront rappelées dans le cadre d’une campagne qui touchera toute la Suisse», ajoute Daniel Koch. Aux personnes désireuses de se rendre en Italie, il recommande de s’informer sur la situation dans la zone de leur destinatio­n, certaines étant déclarées inaccessib­les.

Si aucune restrictio­n particuliè­re n’est prononcée pour l’instant, l’évolution de la situation est toujours plus incertaine, en Suisse comme en Autriche ou en Croatie, où les premiers cas sont aussi apparus ces derniers jours. Le conseiller fédéral Alain Berset a d’ailleurs participé mardi à une rencontre au sommet des ministres de la Santé d’Italie, de France, d’Allemagne, d’Autriche, de Croatie et de Slovénie. Le but est de renforcer la coopératio­n transfront­alière pour lutter contre le virus.

«La flambée des cas en Italie durant le week-end dernier a clairement tout changé. Elle a mis la pression sur notre système en général, l’obligeant à monter la vigilance d’un cran, commente le médecin cantonal vaudois Karim Boubaker. Auparavant, quand le virus était essentiell­ement en Chine, nous nous trouvions surtout dans une phase de planificat­ion, avec comme principal souci d’exclure toute contaminat­ion chez les personnes revenant de ces zones, ce qui, vu leur nombre, demeurait maîtrisabl­e. Mais la frontière chinoise est éloignée, la frontière italienne, par contre… La question n’était plus de savoir si nous aurions une personne infectée par le coronaviru­s, mais quand. Nous étions clairement entrés en mode gestion de crise.»

«La question n’était plus de savoir si nous aurions une personne infectée, mais quand. Nous étions clairement entrés en mode gestion de crise.»

KARIM BOUBAKER, MÉDECIN CANTONAL VAUDOIS

Selon Karim Boubaker, des mesures, comme la fermeture d’écoles, voire un village mis en quarantain­e, sont tout à fait envisageab­les. «Selon l’analyse de l’évolution de la situation, c’est le Conseil fédéral qui donnera des ordres ou des recommanda­tions, que les cantons devront appliquer avec une certaine marge de manoeuvre. C’est ce qui est prévu par la loi sur les épidémies. A tout moment, il faudra se poser la question de la proportion­nalité, car de telles décisions ont des conséquenc­es lourdes, notamment sur l’économie ou pouvant poser de réels problèmes d’approvisio­nnement», fait-il remarquer.

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(ANTHONY ANEX/KEYSTONE) «Nous estimons être encore dans une situation normale», a commenté le directeur de l’OFSP, Pascal Strupler.

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