PostFinance est recalée par la Finma
Les établissements «too big to fail» doivent montrer comment ils comptent assurer leurs fonctions essentielles en cas de crise. UBS et Credit Suisse ont passé le test, pas la Banque cantonale de Zurich, Raiffeisen et PostFinance
Seules les deux grandes banques sont prêtes à affronter une crise de grande ampleur. La Finma a validé les plans d’urgence suisses de Credit Suisse et UBS – avec une réserve pour la seconde – mais elle a jugé ceux de Raiffeisen, de PostFinance et de la Banque cantonale de Zurich (BCZ) «pas encore exécutables» dans un communiqué envoyé mardi matin.
Ces cinq banques dites d’importance systémique (ou too big to fail), dont une faillite pourrait mettre en danger le système financier suisse, devaient présenter comment elles comptent assurer leurs fonctions essentielles pour l’économie suisse en cas de turbulences financières. Il s’agit notamment du trafic des paiements et des opérations de dépôt et de crédit.
Nouveau plan pour Raiffeisen mi-2020
Credit Suisse a passé la rampe sans problème. UBS a aussi vu son plan approuvé, «à la réserve que certains engagements conditionnels sont encore trop élevés», selon le régulateur. A la BCZ, «il existe un plan plausible quant à la manière dont les ressources nécessaires à un cas de crise pourront être complétées dans les domaines des fonds propres et de la liquidité». Mais Raiffeisen et PostFinance doivent encore soumettre un plan plausible. Dans un communiqué, la première assure qu’elle le présentera d’ici à la mi-2020.
Contactée, la seconde estime que «l’évaluation de la Finma souligne la situation difficile de PostFinance». Elle invoque l’interdiction d’octroyer des crédits, qui «nous contraint de placer les fonds que les clients nous confient sur les marchés financiers, sur lesquels nous peinons à dégager des rendements avec l’environnement de taux négatifs». Ainsi, poursuit un porte-parole, «ce sont des centaines de millions de francs de produits d’intérêts qui disparaissent» et qui empêchent PostFinance de réaliser suffisamment de bénéfices pour augmenter ses réserves financières au niveau demandé par le régulateur. «Une introduction en bourse nous apporterait des fonds propres supplémentaires», poursuit-il.
Or «personne ne voudra prendre des parts dans une banque qui ne peut pas octroyer de crédits» et si le Conseil fédéral s’est dit favorable à la levée de l’interdiction, il faut une révision de la loi sur l’organisation de La Poste. Tout ceci est en discussion à Berne, ajoute-t-il.
Professeur d’économie à l’Université de Genève, Jean-Charles Rochet estime néanmoins qu’il ne faut pas s’inquiéter de ce rapport de la Finma. «On prend des précautions extrêmes pour se prémunir en cas de crise. Elle n’est pas satisfaite, mais il s’agit surtout de demander plus de précisions sur la continuité des opérations des banques en cas de crise.» Pour autant, poursuit-il, «cela ne signifie pas qu’il faut relâcher l’attention, car les crises peuvent se produire rapidement, à l’image de l’impact du coronavirus sur les marchés financiers». La Suisse étant plus stricte que ses voisins à l’égard des banques systémiques, elle est aussi mieux préparée, ajoute-t-il.
«Il s’agit surtout de demander plus de précisions sur la continuité des opérations des banques en cas de crise»
JEAN-CHARLES ROCHET, PROFESSEUR D’ÉCONOMIE À L’UNIVERSITÉ DE GENÈVE
L’autorité des marchés financiers évalue aussi les progrès que font ces cinq banques dans ce qu’elle appelle la planification de la stabilisation, soit les mesures qu’elles prévoient de prendre pour affronter une crise sans demander d’aide publique. Elle les a approuvés pour toutes les banques. La Finma fait enfin un plan de résolution qui prévoit comment assainir ou liquider un établissement. Ces procédures ont été mises en place dans le sillage de la crise financière, lorsque la Confédération et la Banque nationale avaient dû intervenir pour sauver UBS au bord du gouffre en automne 2008.
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