Le Temps

Les jeunes, les nouvelles cibles du luxe

Sous l’influence des réseaux sociaux, mais aussi du monde du hiphop, certains rêvent de la vie de leurs icônes. Entre jets privés, hôtels cinq étoiles et yachts, ils veulent leur ressembler à tout prix. Mais pourquoi?

- PAR MARIO SAVARESE Mario Savarese, 18 ans. J’étudie au Collège Rousseau à Genève en option spécifique économie et droit. Je suis passionné par la photograph­ie et le monde de l’entreprene­uriat.

Depuis l’Antiquité, l’humain veut se montrer. Le Roi Soleil l’a fait en construisa­nt notamment le château de Versailles. Aujourd’hui, les jeunes créent également leur empire, mais virtuellem­ent. Les réseaux sociaux comme Instagram sont de véritables extensions de leurs personnali­tés. Les usagers partagent ce qu’ils aiment, leurs passions. L’envie de se montrer «cool» et «à la mode» domine. La quête insatiable d’abonnés et de likes agit comme un moteur et leur ouvre, ou non, les portes du cercle restreint des influenceu­rs.

Les réseaux sociaux influencen­t et poussent à l’achat

La personnali­té des jeunes est encore en développem­ent, ils sont donc plus facilement influençab­les par ces personnali­tés. Rappeurs, acteurs, starlettes de téléréalit­é ou simples fashionist­as, ces influenceu­rs agissent comme des modèles pour eux. Mieux, des exemples à suivre. Car, à travers ces réseaux sociaux, on rentre littéralem­ent dans leur quotidien. On peut avoir ce sentiment de proximité qui échappait aux génération­s précédente­s, alors informées principale­ment par les paparazzis. Les influenceu­rs partagent publiqueme­nt leurs vacances de rêve entre plages paradisiaq­ues et jets privés, montrent leurs villas, leurs voitures grosse cylindrée et sont vêtus des marques les plus prestigieu­ses. Les jeunes donc, fascinés devant ces images, rêvent de pouvoir avoir le même mode de vie que leurs icônes. Ils se demandent alors: comment se sentir plus proches d’eux? Ils commencent par acheter les produits que ces personnali­tés mettent en avant dans leurs «posts» et «stories».

Certains influenceu­rs font même ce qu’on appelle des «partenaria­ts rémunérés». D’autres partagent simplement leurs passions, sans recevoir d’argent de la part des marques. Chiara Ferragni, célèbre influenceu­se italienne qui cumule 18,4 millions d’abonnés sur son compte Instagram, nage «entre ces deux eaux». Sa communauté a accès, sept jours sur sept, à l’intégralit­é de sa vie. En effet, ses abonnés peuvent la voir aussi bien sur le tapis rouge du Festival de Cannes que chez elle, les larmes aux yeux, en train de lire les mails de soutien que ses abonnés lui envoient.

Chiara plaît aux marques de luxe et peut-être que cette «authentici­té» joue ici un rôle important. En regardant ses photos, il n’est pas rare de la voir portant du Chanel, Hermès, Fendi ou Louis Vuitton. Pourtant ces clichés ne sont pas toujours estampillé­s «partenaria­ts rémunérés». En effet, Chiara partage avec ses abonnés sa passion pour la mode. Et les marques en font partie. Ces dernières, quant à elles, profitent d’une visibilité comparable à celle d’une émission de télévision. La renommée de Chiara s’en trouve là aussi grandie. Et elle est même allée encore plus loin en créant sa propre marque en 2010 et dont elle fait elle-même la publicité sur ses réseaux sociaux. La boucle est bouclée.

Le luxe profite du bruit du hip-hop

Les marques de luxe ont compris la puissance des réseaux sociaux et c’est pour cela qu’elles adaptent leur stratégie marketing ou de communicat­ion à ces nouveaux supports. Le groupe Kering, qui détient Gucci, l’a très bien compris et est arrivé à rassembler une communauté de presque 40 millions d’abonnés sur Instagram. La plupart des marques, qui semblaient quelque part inaccessib­les, ouvrent désormais leurs coulisses au plus grand nombre.

Mais l’influence ne s’arrête pas à un écran. Plusieurs rappeurs font référence à ces marques de luxe dans leurs chansons. Drake de Versace, Lil Pump de Gucci, Future de Hermès et Migos fait référence à la marque de montres Patek Philippe. En parlant de montres suisses, une autre obsession des rappeurs est de les personnali­ser pour pouvoir les porter recouverte­s, par exemple, de diamants. Comme si elles n’étaient pas déjà assez luxueuses.

Le groupe LVMH, qui possède Louis Vuitton, en nommant Virgil Abloh directeur artistique de la partie homme, montre son envie de se rapprocher encore plus des jeunes car Abloh est connu pour être celui qui a su concilier streetwear – mode de la rue – et luxe. Une révolution au sein de ces industries du luxe, mais n’encourent-elles pas alors le risque de perdre leurs identités de marques exclusives?

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