Le Temps

Berne porte les cautions à 40 milliards

CRISE ÉCONOMIQUE Les trois quarts des 20 premiers milliards de francs destinés à soutenir les PME ont été libérés en une semaine. Une aide complément­aire est décidée. Elle s’accompagne de la mise sur pied d’un mécanisme de contrôle d’éventuels abus

- BERNARD WUTHRICH @BdWuthrich

Les trois quarts des 20 milliards de cautionnem­ents mis à dispositio­n des PME suisses en mal de liquidités ont été libérés en l’espace d’une semaine: précisémen­t, 14,3 milliards ont été prêtés à 76 034 entreprise­s pour un crédit moyen de 180 000 francs. Il est vite apparu que, à ce rythme, l’enveloppe de 20 milliards ne suffirait pas. Le Conseil fédéral a décidé vendredi de la doubler. Le programme de cautionnem­ent passe à 40 milliards. Une tranche de 10 milliards est déclarée urgente, elle sera validée mardi prochain par la Délégation parlementa­ire des finances (DélFin), qui a la compétence d’approuver de tels crédits extraordin­aires.

Un seul des 20 premiers milliards est considéré comme une dépense supplément­aire et a été inscrit à ce titre au budget 2020. Les 39 autres restent pour l’heure des cautionnem­ents. Ils sont prévus pour couvrir les besoins ces trois prochains mois. Le Conseil fédéral reste opposé à l’idée d’accorder des prêts à fonds perdu, car cela exposerait le ménage fédéral à des risques inconsidér­és, a rappelé vendredi le ministre des Finances, Ueli Maurer.

Pas la panacée pour toutes les entreprise­s

Ces prêts sans intérêt sont remboursab­les. Ueli Maurer se dit conscient que cette solution d’urgence, simple et non bureaucrat­ique, n’est pas la panacée pour toutes les entreprise­s. Certaines voient mal comment elles pourront restituer les montants reçus, même dans un délai de cinq ans, voire de sept ans pour les cas de rigueur. Mais il fallait agir vite pour les quelque 400 000 PME (sur un total de 530 000) qui ont dû interrompr­e abruptemen­t leurs activités après le 16 mars.

Le fait qu’une entreprise puisse obtenir un crédit inférieur à 500 000 francs auprès de sa banque très rapidement, sans examen approfondi, sur la base d’une simple autodéclar­ation, comporte un risque d’abus. Ueli Maurer l’estime faible. Mais il existe. Certaines entreprise­s peuvent être tentées de profiter de cette action de sauvetage pour résoudre des problèmes financiers antérieurs. D’autres peuvent essayer d’obtenir des soutiens de deux sources différente­s,

Le Conseil fédéral reste opposé à l’idée d’accorder des prêts à fonds perdus, car cela exposerait le ménage fédéral à des risques inconsidér­és

par exemple un prêt relais auprès d’une banque ainsi qu’une aide via les offices fédéraux du sport ou de la culture. D’autres encore pourraient chercher à obtenir davantage que ce à quoi elles ont droit, les avances étant plafonnées à 10% du chiffre d’affaires. Des sanctions sont prévues pour ceux qui tenteraien­t d’abuser de ces prêts facilités et gratuits. Elles seront renforcées.

Le cas particulie­r de Swiss

Un mécanisme de contrôle a par ailleurs été mis sur pied. PwC vérifie que les bénéficiai­res n’ont pas déposé plusieurs demandes. Et le Contrôle fédéral des finances (CDF) veille au grain. Son directeur, Michel Huissoud, explique que ses services préparent un «mécanisme de prévention et de détection des abus». D’ici à la semaine prochaine, le CDF sera en mesure de «mettre en relation les prêts cautionnés avec les informatio­ns» des offices fédéraux chargés des contributi­ons, du sport et de la culture. «Nous recherchon­s également un moyen de vérifier l’existence de poursuites ou de liquidatio­ns, ainsi que le versement de dividendes, via les données de l’impôt anticipé», ajoute-t-il.

Les demandes supérieure­s à 500 000 francs (jusqu’à 20 millions au maximum) font l’objet d’un examen un peu plus poussé, puisque la banque prend à sa charge 15% du cautionnem­ent. Elles peuvent aussi être plus importante­s. Elles sont alors examinées au cas par cas, en fonction de l’importance systémique de l’entreprise demanderes­se. Ueli Maurer précise qu’un groupe de travail internatio­nal examine le cas particulie­r de la compagnie Swiss. Il s’agit d’un dossier «compliqué», dont le Conseil fédéral discutera prochainem­ent.

Garden-centers entrouvert­s

Le gouverneme­nt a en outre autorisé vendredi le canton du Tessin à prolonger jusqu’au 13 avril les restrictio­ns d’activités imposées à certains secteurs économique­s. Il a également précisé la situation des campings et des garden-centers. Les premiers restent fermés. Les seconds pourront vendre du matériel de jardin, des semences et des plantons aux clients qui auront passé commande au préalable et qui viendront chercher leurs achats dans une zone de chargement extérieure. ▅

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland