«Nous grandissons avec nos fintechs»
Parfois décrite comme l’établissement le plus numérique du pays, la Hypothekarbank Lenzburg développe ses activités en Suisse romande. Sa directrice générale, Marianne Wildi, décrit comment la «Hypi» collabore avec une douzaine de start-up et partage sa vision du secteur
Marianne Wildi est l’une des rares femmes directrices générales d’une banque cotée en Suisse. Depuis plus de dix ans à la tête de la Hypothekarbank «Hypi» Lenzburg, basée dans la ville argovienne du même nom, elle en a fait un établissement certes encore petit, mais dynamique. N’a-t-il pas été qualifié de banque la plus numérique du pays par le site spécialisé Finews? En décembre, elle a par exemple participé à Swiss Immo Lab, une société d’investissement dans les start-up «prop-tech», soit à l’application des nouvelles technologies à l’immobilier. Au total, elle est partenaire d’une douzaine de fintechs.
«Les dix années ont passé en un éclair. Les changements sont si rapides et les projets numériques si nombreux que je n’ai pas l’impression de le diriger depuis une aussi longue période», déclare-t-elle.
Banque grand public, la «Hypi» Lenzburg a développé une plateforme sous la marque Finstar qui regroupe les services de numérisation financière. Elle emploie 287 collaborateurs et son bilan atteint 5,4 milliards de francs.
La banque a annoncé vendredi qu’elle offrirait ces services de logiciels à la Caisse d’Epargne Riviera, à Vevey, dès mars 2021. En janvier dernier, elle avait déjà signé un contrat avec une autre banque régionale romande, la Caisse d’Epargne d’Aubonne. Au total, Finstar compte trois clients romands puisqu’elle a déjà une collaboration de longue date avec la Caisse d’Epargne de Nyon.
Comment votre banque traverse-t-elle la crise du coronavirus? Depuis le début des années 2000, nous n’avons cessé de nous préparer à une crise dans le cadre de la gestion de la continuité des activités (Business Continuity Management). Nous avons étudié les transferts de ressources nécessaires pour effectuer en tout temps les tâches essentielles. Dans notre gestion des plus grands risques, nous avons intégré celui d’une pandémie. Durant la crise du coronavirus, chaque collaborateur a, dès le début, disposé du matériel nécessaire et a pris les mesures d’hygiène et de distance sociale indispensables.
Est-ce que vous allez aider les PME et assouplir les conditions de crédit? Oui. Tout d’abord, nous participons au programme d’aide du Conseil fédéral qui met à disposition des crédits transitoires pour les entreprises en Suisse. En plus, à la direction, nous discutons de divers assouplissements des conditions financières pour les PME et la prolongation des prêts. Nous avons simplifié les procédures afin que de pouvoir gérer ce défi malgré des ressources limitées en raison du télétravail ou de la garde d’enfants.
Quel est votre scénario pour le paysage bancaire dans cinq ans? La demande de numérisation sera toujours plus forte sur tous les canaux possibles, du «chat» vidéo au réseau social traditionnel. Nous offrirons dès avril une solution e-banking avec «chat». La crise du coronavirus nous apprend à communiquer par internet sans perdre la qualité du contact personnel. La combinaison entre le virtuel et le physique sera profondément modifiée à long terme par la crise.
Vous ouvrez une représentation à Lausanne. Quelles relations avez-vous avec la Suisse romande? La Caisse d’Epargne de Nyon est un client de longue date. Nous voulions ouvrir un bureau en Suisse romande depuis un certain temps. Cela nous permettra de mieux servir nos partenaires romands.
Quel type de logiciels offrez-vous? Finstar, qui emploie une cinquantaine de collaborateurs, est adapté aux petits et moyens établissements comme des banques régionales, cantonales ou privées. Nous offrons des solutions flexibles «as a Service»
plutôt que standardisées. En effet, les petites banques tiennent à conserver leur indépendance entrepreneuriale. Nous sommes présents sur le même segment de marché qu’Avaloq et Finnova. Nos clients sont des banques régionales, des banques privées, des fintechs comme Avobis, dans les hypothèques en ligne, et la caisse du personnel des CFF.
Pouvez-vous préciser les contours de votre présence à Lausanne? Nous prévoyons d’avoir une équipe de conseil informatique à Lausanne de deux à quatre collaborateurs, laquelle travaillera en étroite collaboration avec la centrale. Nous commençons la phase de recrutement immédiatement pour pouvoir les former au plus vite pour être prêt au moment de l’introduction des deux nouvelles banques à la fin de l’année et au printemps prochain.
Vous comptez combien de clients dans la division Finstar? Nous avons dix clients et en ajouterons deux, sans parler des nombreuses entreprises de fintechs que nous avons intégrées dans notre écosystème.
Dans quel segment pensez-vous croître? Nous sommes prêts à offrir nos services à tous les établissements financiers, des caisses de pension aux gérants de fortune indépendants, en passant par les banques privées, mais en premier lieu aux banques régionales parce que nous disposons de toutes les fonctions dont elles ont besoin. Avec les interfaces ouvertes (Open API) que nous offrons, des relations sont possibles entre une banque romande et une start-up sur la base de notre logiciel. Notre avantage concurrentiel réside dans la rapidité et la flexibilité de l’intégration d’une start-up à notre système. Je prendrais les exemples de Neon, une société avec une application bancaire sur smartphone, et Deposit Solutions, une fintech globale dans les dépôts interbancaires numériques.
«Dans notre gestion des plus grands risques, nous avons intégré celui d’une pandémie»
Est-ce que vous profitez de l’expansion des start-up fintech dont vous êtes partenaires telles que Neon? Dans le cas de Neon, nous avons la licence bancaire, Neon a la relation avec le client. Quand Neon grandit, nous grandissons avec elle. Même si Neon gagne des clients en Suisse romande, nous les intégrons dans notre établissement. Notre système est plurilingue depuis le début. ▅