Marre du bavardage post-apocalyptique
Le Covid-19 n'est pas une menace pour l'humanité. Homo sapiens compte environ 7,8 milliards d'individus. Pour faire simple et néanmoins assez précis, disons que la croissance quotidienne de la population est de 100000 personnes. Selon la Johns Hopkins University, le Covid-19 a fait 165273 victimes (état au 20 avril 2020). Même si ce bilan est appelé à augmenter, on voit bien que le nombre de morts n'imprimera pas même un fléchissement dans la courbe de croissance démographique.
Pas de menace, donc pas de coupables ni de sauveurs! Ni les Etats dont on clame à grand bruit le «retour». Parce qu'ils avaient disparu? Ni la science avec un S majuscule, dont on attend solutions et antidotes. Et pas de culpabilité non plus pour la mondialisation dont le virus marquerait sinon la défaite, du moins l'horrible face cachée.
Je ne dis pas cela pour défendre la mondialisation. Je m'en fous de la mondialisation! Je m'énerve juste de l'incroyable bavardage néo-apocalyptique déclenché par Corona Premier. Résumons: les Etats ne sont pas un contrepoids au capitalisme mondialisé. Ils en sont le rouage principal. Les appeler à contrôler ce capitalisme mondialisé, c'est aussi efficace qu'obliger un schizophrène à considérer la réalité telle qu'elle est. La science non plus ne résoudra rien. Depuis la révolution industrielle, c'est elle qui rythme la marche en avant: elle est le carburant du capitalisme mondialisé. Science, Etats, capitalisme mondialisé se trouvent tellement imbriqués qu'il est impossible de dire qui influence et qui est influencé.
Le confinement actuel vise à préserver le système de santé en écrêtant la vague de contamination. Cela semble une approche raisonnable. On verra toutefois après la crise quelles différences de mortalité ont été constatées entre les pays qui choisissent un confinement strict et ceux qui prennent peu de mesures. Le confinement est aussi un état d'exception: la mise entre parenthèses de la liberté de mouvement. Une des libertés les plus fondamentales. Et aussi la prise en main du pouvoir par les exécutifs au détriment des législatifs: en clair, un régime de gouvernement par ordonnances.
Ces Etats qui montrent les muscles et réaffirment où est la souveraineté (qui finalement n'est rien d'autre que la capacité de décréter un état d'exception) n'éprouvent-ils pas du plaisir à cet épisode? N'est-ce pas une satisfaction de voir que l'on peut influencer les choses, modifier les comportements, vider les usines et les écoles? Cela tranche avec les problématiques endémiques que sont le vieillissement de la population – qui met au défi les systèmes de prévoyance – ou le réchauffement de la planète, qui montre bien qu'Homo sapiens n'a pas besoin de virus pour être pour lui-même son principal danger!
Enfin, je veux bien diligemment applaudir chaque soir le personnel soignant mais je me sens un peu caqueux quand je réalise que je ne l'ai pas fait une seule fois durant les dix ans de l'impensable boucherie syrienne.
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Appeler à contrôler ce capitalisme mondialisé est aussi efficace qu’obliger un schizophrène à considérer la réalité telle qu’elle est