Le Temps

Baselworld est mort mais pourrait renaître autrement

Il n’y aura pas de Baselworld en janvier 2021, et il n’y aura plus de Baselworld tout court. Le groupe MCH renonce à organiser l’événement l’an prochain, tout en promettant une nouvelle formule

- ALEXANDRE STEINER @alexanstei­n

Baselworld est mort, et bientôt enterré. La nouvelle, pressentie depuis plusieurs semaines, est désormais officielle. Les organisate­urs ont décidé de clore ce chapitre de l’histoire du salon horloger bâlois, pour mieux le faire renaître sous une autre forme, qui reste à définir. Le directeur, Michel Loris-Melikoff, le confirme: «Baselworld a vécu sa dernière édition en 2019.» L’idée d’un report à janvier 2021, avancée dans un premier temps, est donc abandonnée.

Les 600 exposants concernés reçoivent ce jeudi matin une lettre proposant un nouvel accord de dédommagem­ent des frais engagés pour l’édition 2020. Il doit permettre de tourner la page en trouvant un consensus qui satisfasse tant MCH Group que les marques en attente de liquidités pour faire face à la crise provoquée par le Covid-19. Les organisate­urs répondent ainsi aux vives critiques formulées à leur encontre en avril dernier.

Baselworld revoit sa politique de remboursem­ent

MCH propose aux exposants de rembourser en cash deux tiers des frais d’inscriptio­n aux marques qui avaient réglé la totalité de leur dû pour Baselworld 2020. Le tiers restant permettra de couvrir en grande partie les frais déjà engagés par MCH dans le cadre de cette édition, soit 18,36 millions de francs.

Un scénario bien éloigné de celui formulé le 1er avril dernier. MCH avait alors soumis aux marques deux variantes: soit les exposants acceptaien­t un report de 85% de leurs frais d’inscriptio­n pour 2021, et participai­ent pour 15% aux frais d’organisati­on de l’édition 2020; soit ils demandaien­t un remboursem­ent en cash à hauteur de 30%. Dans ce cas de figure, le report sur l’édition 2021 se voyait réduit à 40%, pour une participat­ion de 30% aux coûts de l’édition annulée.

MCH indique que cette nouvelle offre fait suite à des discussion­s avec le Comité consultati­f de Baselworld, qui représente les grandes marques, plusieurs associatio­ns profession­nelles, ainsi que le comité des exposants suisses – présidé par Hubert J. du Plessix, directeur des investisse­ments chez Rolex. Valable jusqu’au 31 mai, elle est facilitée par un accord avec les exposants qui ont récemment annoncé leur départ de Baselworld (Rolex-Tudor, Patek Philippe, Chopard

«L’intérêt de tous est d’aller de l’avant, les exposants attendent des réponses et je veux leur en fournir»

MICHEL LORIS-MELIKOFF, DIRECTEUR DE BASELWORLD

et Chanel). Ils ont accepté de se faire rembourser un peu moins de deux tiers de leurs frais, en soutien pour les exposants restants, selon MCH.

Zenith et TAG Heuer se sont aussi joints à cette démarche, précise Hubert J. du Plessix, qui «salue l’attitude constructi­ve des représenta­nts de MCH Group, qui nous a permis de trouver cette solution équilibrée». «Notre priorité est de clore l’exercice en cours et de payer tous nos fournisseu­rs avant de nous projeter vers l’avenir», déclare quant à lui Michel Loris-Melikoff. Il précise que le futur événement fera l’objet d’un nouveau budget facturé lors de sa réalisatio­n et qui ne dépendra pas de la comptabili­té de Baselworld 2020.

Consensus à trouver

«Cette décision a été mûrement réfléchie et approuvée à l’unanimité par tous les membres du comité consultati­f», confie Michel Loris-Melikoff. Et de poursuivre: «Il faut être lucide et pratique. Il n’y aura pas de Baselworld 2021 sous la forme que l’on connaissai­t jusqu’ici. On peut le voir négativeme­nt, mais aussi se montrer positif et y voir une chance d’accélérer les transforma­tions en cours. Un nouveau produit peut voir le jour.»

Le fait de parler de nouveau produit n’est pas anodin pour le directeur de Baselworld. Comprenez par là que le rendez-vous changera de nom. Mais où se tiendra-t-il? «Nous consultons actuelleme­nt les exposants, les associatio­ns, mais aussi les acheteurs. Il nous faudra encore quelques semaines pour proposer une solution qui réponde au mieux aux attentes de chacun. La localisati­on ne pourra être fixée qu’une fois cette solution trouvée», déclare Michel Loris-Melikoff.

Si l’on insiste pour en savoir plus, le directeur de Baselworld lance une boutade: «Je pourrais vous dire que Lucerne est une superbe carte postale, pour vous mettre sur la mauvaise piste. Lausanne offre la proximité avec Genève, Zurich dispose de halles à cinq minutes de l’aéroport, c’est aussi très intéressan­t. Mais si nous nous rendons compte que nous devons organiser un petit événement très exclusif pour 10000 personnes, cela ne nous servira à rien de louer les halles de Bernexpo.»

De la déception mais pas de rancoeur

Pour Michel Loris-Melikoff, qui s’était fixé pour objectif de moderniser Baselworld lors de son arrivée à la direction du salon il y a dix-huit mois, la situation actuelle impose-t-elle un constat d’échec? «Il y a évidemment une grande déception. Lorsque l’on veut transforme­r radicaleme­nt quelque chose, ça ne marche pas toujours et il faut savoir réagir. Maintenant, nous sommes forcés de le faire», répond le principal intéressé. Quant à savoir si Baselworld a péché par excès de confiance en sa nécessité pour la branche et manqué de clairvoyan­ce, son directeur déclare que «les transforma­tions en cours auraient peut-être dû être entamées il y a huit ou dix ans».

Michel Loris-Melikoff ne cherche pas pour autant à ressasser le passé, ni à savoir s’il a été piégé par de grandes marques prêtes à quitter le navire à la première occasion: «L’intérêt de tous est d’aller de l’avant, les exposants attendent des réponses et je veux leur en fournir.» Restera-t-il à la barre une fois le nouveau projet lancé? Sa réponse est limpide: «Si je n’en avais pas envie, je ne serais pas en train de vous parler.»

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(GEORGIOS KEFALAS/KEYSTONE) Baselworld aura vécu en 2019 sa dernière édition. Son organisate­ur MCH propose aux exposants de rembourser en cash deux tiers des frais d’inscriptio­n aux marques qui avaient réglé la totalité de leur dû pour Baselworld 2020.

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