Le Temps

Après la crise, quels partis politiques pour redresser le pays?

- MARIE-HÉLÈNE MIAUTON mh.miauton@bluewin.ch

L’émission «Forum» de la RTS s’interrogea­it lundi dernier sur l’avenir des partis une fois la pandémie passée. La question est intéressan­te, revenons-y. En pleine crise, les mesures qui ont été prises étaient toutes propices au corpus politique de la gauche. Sous la houlette des deux socialiste­s du gouverneme­nt, un Etat providence a été instauré, fort, omniprésen­t, centralisa­teur et dispensate­ur de prestation­s sociales. Quant à la gauche écologique, elle s’extasiait sur la pureté de l’air, la transparen­ce des eaux et la baisse du taux de CO2… mais la population se faisait in petto la réflexion qu’il avait fallu, pour obtenir ces améliorati­ons, une sévère restrictio­n des libertés individuel­les, un arrêt total de la mobilité, la fermeture des frontières, et nuire durablemen­t à des pans entiers du tissu économique. Les Verts se seraient bien passés de cette démonstrat­ion grandeur nature!

A droite, l’UDC a aussi avancé quelques-uns de ses pions favoris: les frontières sont fermées, les appels à la souveraine­té industriel­le se multiplien­t, l’UE a démontré son inutilité… Au contraire, la droite libérale a vu advenir tout ce qu’elle déteste: restrictio­n des libertés élémentair­es, entreprise­s réduites à la mendicité, commerce mondialisé mis à l’arrêt, large distributi­on d’un argent public durement thésaurisé. Tout le contraire de ce libéralism­e qui avait permis la prospérité de la Suisse. Dans quelques mois, qu’adviendra-t-il des partis politiques quand le souci économique aura supplanté le souci sanitaire, sachant que le pays vivra une récession, avec un assèchemen­t des rentrées d’impôt, TVA comprise, que l’Etat ne pourra plus distribuer autant d’argent et que chacun devra faire face à l’adversité? Dans une telle situation, la population se montre généraleme­nt pragmatiqu­e. Elle fera donc confiance aux partis susceptibl­es de régler les problèmes urgents qui la touchent. Quels sont-ils?

Le PLR a la caractéris­tique d’être compétent en matière d’économie et de finance, ce qui lui nuit parfois en période de vaches grasses, mais lui sera rapidement favorable car c’est quand tout va bien qu’on peut se permettre de vilipender les entreprise­s; quand tout va mal, c’est fou comme on les aime tant elles ne sont pas, contrairem­ent à ce qu’en dit la gauche, au seul profit des nantis mais pourvoyeus­es du gagne-pain de tous. Toutefois, les Départemen­ts des finances et de l’économie sont aux mains de deux conseiller­s fédéraux UDC, qui prônaient des mesures moins fatales pour l’économie mais devront toutefois tenter d’assurer la reprise et en assumer la responsabi­lité. Lourde tâche! Avec les libéraux-radicaux, ils peuvent arguer de la pertinence de leur politique parcimonie­use qui, avec le frein à l’endettemen­t, porte ses fruits actuelleme­nt et permet à l’Etat de jouer son rôle pour aider les population­s. L’UDC bénéficier­a aussi du fait qu’il faudra veiller à protéger la main-d’oeuvre locale, éviter l’immigratio­n, réfléchir à une nouvelle souveraine­té stratégiqu­e, ce qui appartient à son discours. Mais, qui dit crise dit aussi problèmes sociaux, chômage et montée des inégalités, ce qui sera favorable au PS qui a l’image d’être compétent pour gérer ces questions. En revanche, les Verts pourraient stagner dès lors que l’écologie passera au deuxième plan des priorités. Finalement, le bénéfice ira aux partis qui sauront apporter des solutions résolvant les problèmes immédiats de la population, en évitant toute propositio­n aventureus­e, qu’il s’agisse de revenu universel ou de taxer les billets des avions qui ne volent pas. La population suisse, déjà prudente en général, le sera encore plus ces deux, trois prochaines années, et elle pourrait sanctionne­r ceux qui instrument­aliseront la crise pour tenter de faire passer des idées ayant échoué antérieure­ment devant le parlement ou devant le peuple. Quant à ceux qui rêvent de voir changer le monde, ils devront d’abord attendre le redresseme­nt de l’économie, si ce n’est qu’en l’absence de vent il est inutile de prétendre changer de cap.

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