Samsung lance un téléphone sécurisé par une puce suisse
Le modèle Galaxy A Quantum dévoilé jeudi par le fabricant sud-coréen contient un module créé par la société genevoise ID Quantique
Dès le 22 mai, les consommateurs sud-coréens pourront acquérir un téléphone équipé d'une puce suisse. Jeudi, Samsung a présenté son modèle Galaxy A Quantum, qui intègre un module de chiffrement quantique. Cet élément a été développé par la société genevoise ID Quantique, qui espère ainsi s'ouvrir, après le marché informatique, celui des smartphones au niveau mondial.
Pour Grégoire Ribordy, directeur d'ID Quantique, cette annonce est «un développement majeur pour la société. C'est la première fois qu'il y aura une application de masse pour les technologies quantiques. C'était notre vision depuis la création de notre société. Désormais, c'est la réalité.» Fondée en 2001, l'entreprise, qui est une émanation de l'Université de Genève, est contrôlée depuis février 2018 par l'opérateur de téléphonie mobile sud-coréen SK Telecom. Ce dernier avait acquis la majorité – aucun chiffre précis n'avait été communiqué – de son capital pour 65 millions de dollars.
Concrètement, cette puce mesurant 2,5 millimètres de côté est un générateur de nombres aléatoires qui doit augmenter la sécurité lors de la génération de clés de chiffrement utilisées par de nombreuses applications. «La plupart de ces programmes utilisent une boîte à outils de chiffrement, boîte qui a besoin de générer des nombres aléatoires pour cela. Notre puce permet de créer ces nombres de manière beaucoup plus sûre», affirme Grégoire Ribordy.
SK Telecom, qui développe luimême des applications de paiement et d'identification, va utiliser la puce d'ID Quantique pour en augmenter la sécurité. Et en parallèle, des développeurs externes d'applications pourront créer des programmes pouvant accéder à cette puce. Le niveau de sécurité ne sera maximum que lorsque les communications s'effectueront entre deux téléphones intégrant cette puce. Celle-ci est fabriquée en Corée du Sud, pour un prix non divulgué.
Avec Swisscom?
Le smartphone vendu dès le 22 mai sera un dérivé du modèle moyen de gamme Galaxy A71 déjà commercialisé par Samsung. Compatible avec les réseaux 5G, il sera proposé pour l'équivalent d'environ 530 francs. SK Telekom aura dans un premier temps l'exclusivité de cet appareil. L'opérateur revendique plus de 30 millions de clients en Corée du Sud, soit la moitié de ce marché. L'année passée, la société a commencé à déployer une autre solution d'ID Quantique pour augmenter la sécurité lors de l'identification de ses clients à son réseau 5G. La Corée du Sud a été l'un des tout premiers pays à lancer ce type de réseau.
«C’est la première fois qu’il y aura une application de masse pour les technologies quantiques» GRÉGOIRE RIBORDY, DIRECTEUR D’ID QUANTIQUE
Pour la suite, ID Quantique voit plus grand. «Nous commençons via cet accord tripartite avec SK Telecom et Samsung à tester le marché, poursuit Grégoire Ribordy. L'ambition est ensuite de proposer notre puce à d'autres fabricants de téléphones travaillant avec d'autres opérateurs, comme par exemple Swisscom.» A noter que Deutsche Telekom fait partie des actionnaires minoritaires de la société genevoise. ID Quantique affirme par ailleurs qu'une collaboration avec Apple serait possible.
Jusqu'à présent, ID Quantique se concentrait sur la création de cartes pour des serveurs informatiques. «Ces cartes permettent par exemple d'augmenter considérablement la sécurité dans le secteur financier, mais aussi de générer des nombres parfaitement aléatoires pour les jeux de loteries, illustre Grégoire Ribordy. La Loterie Romande fait d'ailleurs partie de nos clients.»
Septante employés à Genève
ID Quantique ne communique pas son chiffre d'affaires, se contentant d'affirmer qu'il se situait, en 2019, entre 10 et 100 millions de francs, avec une croissance annuelle de 20%. La société emploie environ 100 personnes au total, dont 70 à Genève, et possède aussi des bureaux en Corée du Sud et aux Etats-Unis.
A noter que depuis septembre dernier, ID Quantique fait partie du projet de recherche européen OpenQKD, pour Open Quantum Key Distribution. Son objectif est de concevoir et tester un système de communication plus fiable, en se basant sur les technologies de communication quantique. La société genevoise fait partie des 38 entreprises et instituts de recherche sélectionnés, aux côtés notamment de la firme genevoise Mt Pelerin, de l'Université de Genève et des Services industriels de Genève. ▅