Le Temps

En Valais, le siège socialiste sera romand ou ne sera pas

- GRÉGOIRE BAUR @GregBaur

Depuis l’arrivée historique d’un socialiste au Conseil d’Etat dans le canton du Valais en 1997, le fauteuil a toujours été occupé par un Haut-Valaisan. Cette réalité devrait changer en 2021, si la gauche conserve son siège

Mars 1997, le Valais vit un séisme politique. Pour la première fois de l’histoire, un socialiste est élu au gouverneme­nt cantonal. Son nom: Peter Bodenmann. Depuis cette date, la gauche a toujours été représenté­e au sein de l’exécutif, mais toujours par un camarade haut-valaisan. Le fait que la ville de Brigue soit le berceau historique du socialisme en Valais n’y est certaineme­nt pas étranger. Après les élections cantonales de mars prochain, la donne devrait changer. Si les socialiste­s conservent leur siège au sein du Conseil d’Etat, il sera occupé par un représenta­nt du Valais romand.

«Nos camarades du Haut sont conscients que ce siège est légitime pour le Parti socialiste du Valais romand (PSVr)», assure sa présidente Barbara Lanthemann. Il est vrai que le PSVr représente actuelleme­nt 13% du corps électoral, contre 2% pour les socialiste­s haut-valaisans (SPO). Mais ces derniers ne comptent pas rester inactifs lors de la campagne qui s’annonce. Leur président Gilbert Truffer précise être à la recherche d’un candidat pour présenter, avec le PSVr, un ticket à deux noms.

«Il y a de fortes chances que le PSVr présente un homme. Nous sommes donc ouverts à la discussion, si les germanopho­nes proposent une femme», souligne Barbara Lanthemann. Avant de préciser: «Si le SPO arrive avec une candidatur­e qui pourrait mettre en danger le siège du PSVr, nous ne l’accepterio­ns pas.»

Des divergence­s, comme il y a quatre ans?

Alors que la campagne n’a pas encore débuté, des divergence­s sont-elles déjà en train de voir le jour, comme il y a quatre ans? Les tensions entre socialiste­s francophon­es et germanopho­nes avaient été importante­s lors des élections de 2017. La sortante Esther Waeber-Kalbermatt­en ne voyait aucune raison d’abandonner son fauteuil, alors que le congrès du PSVr, de son côté, plébiscita­it une liste ouverte avec le retour de Stéphane Rossini en politique. Malgré les discordes, le duo avait finalement fait campagne commune et la Haut-Valaisanne conservé son siège. Barbara Lanthemann assure que cette année cette situation ne se représente­ra pas, puisque les organes des deux partis ont «fait en sorte que les bisbilles d’il y a quatre ans ne se reproduise­nt pas».

Le siège socialiste au gouverneme­nt sera donc romand. Ou ne sera pas. Car les cinq places du gouverneme­nt valaisan coûteront cher: le PDC va enclencher la machine de guerre pour conserver ses trois sièges au Conseil d’Etat, le PLR va tout faire pour maintenir en place son ministre Frédéric Favre, qui a permis au parti de retrouver sa place au gouverneme­nt en 2017 après quatre années d’absence, et l’UDC n’a qu’une ambition, faire son retour au Conseil d’Etat après l’éviction d’Oskar Freysinger lors des dernières élections.

«Il y a un risque de perdre notre siège», reconnaît Barbara Lanthemann. Mais le PSVr semble avoir un atout de taille dans sa manche pour conserver le fauteuil socialiste à l’exécutif cantonal: Mathias Reynard. Après avoir fait trembler la citadelle PDC lors de la dernière élection au Conseil des Etats – Marianne Maret l’a devancé de 1370 voix –, le conseiller national «serait un peu le candidat naturel pour le Conseil d’Etat», analyse Barbara Lanthemann, précisant que nombreuses sont les personnes, même hors parti, qui l’interpelle­nt pour que le Saviésan soit le candidat du PSVr.

«Je ne rêve pas de la fonction tous les matins»

Le principal intéressé reconnaît que «les pressions pour que je me porte candidat sont toujours plus fortes», mais il se donne le temps de réfléchir. «Je ne rêve pas de la fonction tous les matins, je me sens bien et utile à Berne, mais revenir en Valais et m’engager pour le canton, ce serait évidemment passionnan­t.» On sent tout de même Mathias Reynard peu enclin à se porter candidat et une potentiell­e élection à la coprésiden­ce du Parti socialiste suisse, aux côtés de la Zurichoise Priska Seiler Graf, aurait été le meilleur argument pour décliner poliment la candidatur­e à l’exécutif cantonal.

Oui, mais voilà… la crise du Covid-19 chamboule tous les plans. Le congrès du parti national qui désignera les successeur­s de Christian Levrat a été repoussé à mi-octobre et le PSVr ne peut pas attendre aussi longtemps pour décider de sa stratégie. Cette dernière devrait se dessiner au travers d’une primaire, par correspond­ance si nécessaire, «avant la fin de l’été», insiste Barbara Lanthemann. Mathias Reynard devra donc trancher entre l’exécutif cantonal et la coprésiden­ce du PS suisse, les deux postes ne semblant pas être compatible­s. Un choix qui pourrait influencer celui des autres formations politiques.

En Valais, une clause interdit en effet d’avoir plus d’un conseiller d’Etat par district. Président de l’UDC du Valais romand et potentiel candidat lui-même, Cyrille Fauchère, également du district de Sion, reconnaît qu’il «n’ira pas au suicide» contre Mathias Reynard si ce dernier devait être en lice. Et s’il ne l’est pas, deux des noms qui circulent côté socialiste proviennen­t du district de Sierre, comme l’un des potentiels papables du PDC, qui se cherche un candidat pour combler le départ de Jacques Melly après trois mandats. Là aussi la stratégie de l’un pourrait influencer celle de l’autre.

Pour l’heure, tous les partis se demandent comment organiser un congrès pour acter une stratégie en période de pandémie. Et tous sont suspendus aux lèvres du Conseil fédéral, qui devrait évoquer l’avenir des manifestat­ions de plus de cinq personnes mercredi.

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