FAIRE ÉVOLUER LA MOBILITÉ VERS PLUS DE DOUCEUR
Dans votre éditorial «Auto versus vélo, un combat obsolète» (LT du 20.05.2020), M. David Haeberli fait état de la reprise des hostilités entre cyclistes et automobilistes et déplore cette guerre de religions qui, selon lui, est d’un autre temps. Dans sa démonstration, il oublie un paramètre essentiel qui est d’ailleurs trop souvent occulté par les débatteurs: la plupart, si ce n’est la quasi-totalité, des conducteurs utilisent leur véhicule simplement parce qu’ils ne peuvent pas faire autrement. On ne choisit pas de rester prisonnier d’un bouchon par plaisir ou masochisme, mais par nécessité professionnelle ou personnelle.
En installant dans la précipitation de nouvelles pistes cyclables au coeur de la cité, nos élus, protégés par l’excuse du Covid, ont assouvi leur désir de pouvoir absolu. Leur objectif n’était pas tant de faciliter la vie et de garantir la sécurité des pratiquants de la petite reine, mais bien de compliquer la vie des automobilistes en réduisant la fluidité du trafic. Ce postulat, érigé en dogme par les exécutifs et leurs états-majors, qui consiste à rendre le trafic motorisé impraticable pour dissuader les automobilistes d’utiliser leurs véhicules, est le combustible de ce conflit stérile.
Une option intelligente qu’aurait pu, par exemple, prendre le Conseil d’Etat, mais à l’impossible nul n’est tenu, aurait été d’utiliser les quais rive droite (comme c’est déjà le cas sur la rive gauche) et de conserver les deux voies de circulation existantes. Mais le Conseil d’Etat a voulu faire un acte militant en faveur de la mobilité douce au lieu de simplifier la vie de tous, ce qui devrait pourtant être sa mission.
Comme le dit M. Haeberli, à part quelques irréductibles de tous bords, il y a certainement un large consensus pour faire évoluer la mobilité vers plus de douceur, mais il serait temps que les politiques comprennent que cela doit se faire de façon ingénieuse et pragmatique, en valorisant la complémentarité et en évitant de faire en permanence la leçon aux citoyens. Si, au lieu de faire autant de politique politicienne, ils pouvaient mettre leur énergie dans l’étude de solutions pratiques, ça nous reposerait. Nous n’avons pas envie que les pouvoirs publics (et souvent les médias!) fassent tout le temps la morale au bon peuple. Notre pays peut compter sur des citoyens responsables qui sauront répondre positivement si on leur propose des solutions intelligentes qui favoriseront la mobilité (et la vie) de chacun.