QUI A RAISON ENTRE LES DEUX INSTANCES?
La position de M. Dehousse – ancien juge à la Cour de justice de l’Union européenne interviewé dans votre édition du 19.05.2020, «L’unité du droit européen est menacée» – manque cruellement d’objectivité. La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) s’est fait sérieusement taper sur les doigts par la Cour constitutionnelle allemande pour avoir outrepassé ses compétences. Qui a raison entre les deux instances? Pour M. Franklin Dehousse, c’est clair.
Contrairement à ce qu’il semble admettre, la CJUE n’est toutefois pas omnipotente. Les juridictions nationales gardent leurs prérogatives. Aussi M. Dehousse se trahit-il lorsqu’il reproche à Karlsruhe le «timing», sous-entendu la coïncidence de sa sentence avec la crise du financement des conséquences de la crise sanitaire en Europe. Le soupçon de mauvaise foi est permis. Enfin, la question des conséquences à terme pour tout un chacun de la politique monétaire expansive que la Banque centrale européenne mène en dehors de tout contrôle démocratique est légitimement posée.
L’intégrationnisme de M. Dehousse doit en hérisser plus d’un, surtout en Suisse. Le sentiment d’appartenance nationale fait partie de l’Europe. Le nier nuit à la cause européenne. Il est urgent, en réponse à M. Dehousse, de donner la parole à quelqu’un qui expliquerait le récent jugement de Karlsruhe de manière objective – et prendrait même sa défense.