Le Temps

L’économie suédoise aussi ravagée que les autres

Le pays n’a pas confiné, mais son PIB accusera un recul aussi marqué que le reste de l’Europe. Il affiche en outre un taux de mortalité plus élevé

- M. F.

Une poignée de morts en plus, mais une économie qui tient le choc. C’était le scénario que la Suède imaginait pour elle-même, lorsqu’elle a choisi de ne pas confiner sa population, espérant ainsi favoriser une immunité collective et se prémunir d’une catastroph­e économique. Cela lui a valu d’être citée en exemple par tous les anti-confinemen­t du monde entier. La réalité se révèle bien différente.

L’économie risque d’être tout aussi touchée que le reste de l’Europe. Au premier trimestre, la contractio­n du PIB semble avoir été plus faible. Mais les économiste­s doutent que cela continue. Cafés, restaurant­s et magasins sont restés ouverts, mais l’activité tourne au ralenti. Les Suédois ne se sont pas déplacés librement ces dernières semaines, alors que le reste du monde restait cloîtré à la maison. Le gouverneme­nt leur a recommandé de travailler à la maison et de limiter leurs déplacemen­ts, ce qu’ils ont fait presque aussi scrupuleus­ement que dans les pays où le confinemen­t était de rigueur. C’est ce que confirme une étude de deux économiste­s de la Banque mondiale, William Maloney et Temel Taskin, qui se sont basés sur des données de Google.

Le poids des exportatio­ns

La Suède, comme la Suisse, est une économie ouverte qui dépend beaucoup de ses exportatio­ns (près de la moitié de son PIB). Elle est donc affectée par le coup de frein du commerce mondial. Elle compte aussi une solide industrie qui a été partiellem­ent mise à l’arrêt. Volvo, par exemple, a été contraint de se mettre en pause parce que les composants nécessaire­s n’arrivaient plus.

Son PIB devrait donc à peine moins reculer que celui de l’Allemagne (-6,1%, contre -6,5%), dont le rebond en 2021 devrait être plus marqué (5,9%, contre 4,3%). OutreRhin, le chômage ne devrait pas dépasser 4%, contre 9% dans le pays scandinave. La banque centrale de Suède est même plus pessimiste encore: elle table sur une contractio­n du PIB de 7 à 10% et un chômage qui grimpe entre 9 et 10,4% en 2020. A l’inverse, le Danemark, l’un des premiers pays à prendre des mesures de confinemen­t en Europe (et à en sortir), s’attend à une récession de 5,3%.

Crise «très profonde»

Selon un sondage cité par Bloomberg, 40% des entreprise­s craignent de faire faillite. Ministre des Finances, Magdalena Andersson a évoqué une «crise économique très profonde», qui se produit «plus rapidement qu’attendu», tandis que le chef économiste de l’office de la dette, Marten Bjellerup, estime que l’économie s’en sortirait un peu mieux que d’autres pays, mais de «façon marginale». Des ravages économique­s pour un taux de mortalité parmi les plus élevés si on le rapporte à la population totale et avec une épidémie qui faiblit nettement moins rapidement que chez ses voisins. Ce, alors que la perspectiv­e d’une immunité collective s’est largement éloignée: selon une étude portant sur des données à la fin d’avril, 7,3% des habitants de Stockholm avaient des anticorps contre le virus. L’immunité collective peut être obtenue lorsque au moins 70% de la population dispose d’anticorps ou a été vaccinée.

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