Le Temps

La rente-pont amorce le dernier virage

- BERNARD WUTHRICH, BERNE @BdWuthrich

La prestation destinée aux chômeurs de plus de 60 ans coûtera 150 millions à la Confédérat­ion. Une partie de la droite la rejette

La rente-pont survivra-t-elle à la crise économique provoquée par le Covid-19? Ce projet imaginé par le Conseil fédéral coûtera 150 millions de francs et devrait concerner 3400 personnes. Pour l'UDC, qui a toujours été opposée à cette prestation destinée aux chômeurs en fin de droits âgés de plus de 60 ans, c'est trop: «La situation a changé avec le coronaviru­s. 1,9 million de personnes ont recouru au chômage partiel. Cette rente arrive au pire moment. Des entreprise­s devront licencier et les collaborat­eurs les plus âgés seront les plus exposés puisqu'ils pourront toucher cette prestation», a déclaré le président du parti Albert Rösti mardi, alors que le Conseil national reprenait ce dossier en ouverture de la session d'été. Celle-ci se déroule à nouveau au centre de congrès Bernexpo, où les distances sanitaires peuvent être mieux respectées. La prochaine, en septembre, devrait à nouveau avoir lieu au Palais fédéral, prévoit néanmoins la présidente de l'Assemblée fédérale, Isabelle Moret (PLR/VD).

L'UDC prépare le référendum contre la rente-pont. Le parti en fait un argument pour promouvoir son initiative populaire sur la libre circulatio­n, objet de la votation du 27 septembre. Ce texte veut limiter l'immigratio­n et cible directemen­t la libre circulatio­n des travailleu­rs. «Notre initiative permettra aux indigènes de travailler plutôt que de toucher une rente», argumente Albert Rösti.

Le projet est entré dans sa phase finale. Les Chambres se sont mises d'accord sur le plafond de la prestation pour les couples et les parents célibatair­es: ce sera 65643 francs au maximum. Les frais médicaux – 10000 francs au maximum par ménage, 5000 francs pour une personne seule – seront inclus dans ce montant. Il reste toutefois un point de désaccord. Il concerne la prestation maximale destinée aux chômeurs célibatair­es et sans enfants. Mardi, le Conseil national a confirmé sa décision de la plafonner à 43762 francs alors que le Conseil des Etats ne veut pas accorder plus de 38900 francs. Cela représente une différence de 1,5 million de francs, soit 1% de la facture totale.

Loin de la solution initiale

Le litige subsistant au terme des trois navettes réglementa­ires entre les deux Chambres, il est désormais nécessaire de convoquer une conférence de conciliati­on, composée de treize membres de chaque conseil. Elle fera une propositio­n, qui devra être acceptée par les deux conseils. Si l'un des deux la rejette, l'ensemble du projet de rente-pont tombera à l'eau.

C'est là que l'exercice peut se révéler périlleux. Pour l'instant, la rente-pont tient bon. Elle amorce le dernier virage de son parcours chaotique. Seule l'UDC s'y oppose. Le PLR a confirmé qu'il lui était toujours favorable, car elle apporte un «soutien adapté aux travailleu­rs âgés qui ont déjà tout essayé pour retrouver un emploi». Président de l'Union syndicale suisse (USS), Pierre-Yves Maillard (PS/VD) reste optimiste. «La population en difficulté attend des réponses concrètes de la politique. La rente-pont fait partie d'un paquet élaboré par les partenaire­s sociaux pour insérer les travailleu­rs âgés dans le marché du travail. Nous ne pouvons pas dire aux plus de 60 ans qui arrivent en fin de droits qu'ils n'ont plus que l'aide sociale», argumente-t-il.

Le ministre des Affaires sociales, Alain Berset, regrette de son côté que la solution que retiendra le parlement reste «assez loin» de ce qu'avait imaginé le Conseil fédéral. Plus généreuse, la prestation qu'il avait proposée aurait concerné 4600 personnes, fixait des plafonds plus élevés – 58350 francs pour un chômeur senior seul, 87525 francs pour un couple – et aurait coûté 230 millions. Elle n'est plus d'actualité.

«Notre initiative permettra aux indigènes de travailler» ALBERT RÖSTI, PRÉSIDENT DE L’UDC

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