Mark Zuckerberg n’a pas de solution pour Facebook
Le directeur du réseau social tente plusieurs solutions pour désamorcer la tempête créée par Donald Trump, concernant la modération du contenu politique. Mais aucune de ses actions n’a de succès
Mark Zuckerberg est démuni. Le cofondateur et directeur de Facebook tente depuis quelques jours plusieurs approches pour sortir son entreprise d’une crise majeure. Mais aucune ne semble fonctionner. Le trentenaire, qui devait parler mardi à ses employés, ne parvient pas à éteindre l’incendie initié la semaine passée par Donald Trump.
Sur Twitter et Facebook, le président américain avait publié un message avertissant que les pillages, survenus après le décès de George Floyd, allaient susciter des tirs de la part des forces de l’ordre. Twitter avait en partie masqué ce message. Mark Zuckerberg s’y est refusé, expliquant que cette décision «avait été très éprouvante».
La colère suscitée par cette passivité, qui s’est notamment manifestée par le désaccord exprimé publiquement – une rareté chez Facebook – par plusieurs centaines d’employés ces dernières heures, a même été amplifiée par Mark Zuckerberg. Son annonce que l’entreprise allait verser 10 millions de dollars (9,6 millions de francs) à des organisations travaillant à la justice raciale est «l’une des choses les plus insultantes que j’aie jamais vues», a lancé Rashad Robinson, responsable de l’organisation Color of Change.
«Il ne comprend pas»
Lundi, la discussion menée par Mark Zuckerberg et Sheryl Sandberg, directrice opérationnelle du groupe, avec plusieurs responsables d’associations de défenses des droits civiques a mal tourné. «Le problème avec mes conversations avec Mark, c’est que j’ai l’impression d’avoir passé beaucoup de temps, avec mes collègues, à lui expliquer pourquoi ces choses sont un problème, et je pense qu’il n’a tout simplement pas la capacité de le comprendre», a affirmé Rashad Robinson à Bloomberg.
Aucun changement de politique de modération – Facebook s’interdit toute intervention dans les publications de personnalités politiques – et un versement de 10 millions de dollars. Comme pour réparer une faute et passer à autre chose. En réalité, comme l’affirme le site spécialisé The Verge, le directeur du réseau social appose un mauvais filtre sur le problème: «Pour Mark Zuckerberg et son équipe, Donald Trump est un problème légal – une question de savoir comment certains mots et phrases sont ou ne sont pas conformes aux normes qu’ils ont écrites. Mais pour les employés qui s’expriment, Donald Trump est un problème moral – un danger pour leurs amis, leurs familles, leurs communautés et eux-mêmes.»
Mark Zuckerberg a un autre souci. Avec sa politique de laisser-faire, il tente de montrer qu’il est le plus neutre possible. Comme la plupart des firmes de la Silicon Valley, Facebook est perçu comme favorable aux démocrates. Avec l’affaire actuelle, son directeur tente de rééquilibrer son image. Tout en s’entourant notamment d’hommes très marqués à droite, comme Joel Kaplan, responsable des affaires publiques et qui avait notamment apporté son soutien au juge Brett Kavanaugh – accusé d’agression sexuelle – avant sa nomination à la Cour suprême.
«S’aligner sur le pouvoir en place»
«Les plateformes comme Facebook et Google doivent toujours s’aligner sur le pouvoir, y compris les autorités. C’est une question d’auto-préservation. […] Aux Etats-Unis, Facebook a constamment ignoré ou modifié ses conditions de service au profit de Donald Trump. Jusqu’à la semaine dernière, Twitter a fait la même chose», estimait lundi Roger McNamee, ancien investisseur au sein de Facebook et devenu critique du réseau social, dans le New York Times.
Le dernier problème pour le directeur de Facebook, c’est l’absence d’une autorité de régulation indépendante. Et pourtant, la création de cette sorte de «cour suprême» du réseau social avait été annoncée en mai, avec le pouvoir d’imposer des décisions à Facebook. Mais samedi, cette autorité, qui doit trancher des cas litigieux ayant trait au contenu et à la modération, expliquait qu’elle ne serait pas opérationnelle avant la fin de l’année – sans donner de raison. En parallèle, l’un de ses membres, Michael McConnell, professeur de droit à Stanford, s’est récemment rendu coupable d’un dérapage raciste lors d’une réunion vidéo.
Pour l’heure, Mark Zuckerberg semble ainsi dépassé par une situation qu’il ne maîtrise pas.
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PATRON ET COFONDATEUR DE FACEBOOK
«Cette décision [de ne pas modérer le message de Donald Trump] a été très éprouvante»