L’Union européenne s’intéresse au poste de directeur de l’OMC
Alors que l’Afrique s’imaginait que c’était son tour d’assumer la direction de l’Organisation mondiale du commerce, trois candidats européens se profilent pour remplacer le Brésilien Roberto Azevêdo, qui se retire avant la fin de son mandat
Mourante? Dépassée? Paralysée? Qu'est-ce qu'on n'a pas dit sur l'Organisation mondiale du commerce (OMC), qui peine à assumer son mandat de régulation des échanges internationaux et dont le directeur, le Brésilien Roberto Azevêdo, quitte le navire à fin août, soit une année avant la fin de son mandat? Et pourtant. Les candidats à la succession se bousculent presque au portillon. Pas moins de trois Européens seraient partants pour relever le défi.
En premier, l'Irlandais Phil Hogan, commissaire européen au Commerce depuis fin 2019 et de l'Agriculture de 2014 à 2019. Avant de déménager à Bruxelles, il a été le ministre irlandais de l'Environnement pendant quatre ans. Depuis jeudi dernier, cet homme politique rompu aux rouages de la négociation internationale ne laisse planer aucun doute sur ses intentions: «Ce serait heureux si un ressortissant européen pouvait devenir le prochain directeur de l'OMC.» Son porte-parole a confirmé lundi que son patron lorgnait en direction de Genève.
La ministre espagnole des Affaires étrangères, Arancha Gonzalez Laya, serait aussi intéressée, selon des sources diplomatiques. Cette candidature se défend. De 2005 à 2013, elle était la cheffe de cabinet de Pascal Lamy lorsque ce dernier dirigeait l'OMC, tout comme entre 1999 et 2004, lorsqu'il était commissaire européen au Commerce. A la fin du mandat de Pascal Lamy, Arancha Gonzalez a été nommée directement par Ban Ki-moon, alors secrétaire général de l'ONU, aux fonctions de directrice du Centre du commerce international, une agence conjointe de l'OMC et de la Cnuced (2013-2012). Elle a quitté précipitamment ses fonctions en janvier, appelée à Madrid pour occuper le maroquin des Affaires étrangères.
Les éventuelles candidatures européennes ont pris de court les milieux diplomatiques africains à Genève
Enfin, ces derniers jours, le Financial Times et la presse néerlandaise ont avancé la candidature de Sigrid Kaag, l'actuelle ministre du Commerce et de la Coopération des Pays-Bas. Elle n'a pas démenti l'information.
Les éventuelles candidatures européennes ont pris les milieux diplomatiques africains à Genève de court. En effet, ces derniers ne cessent d'insister sur le fait que c'est le tour d'un Africain d'accéder au poste de directeur de l'OMC. Le Brésilien Azevêdo avait succédé au Français Pascal Lamy. Avant lui, le
Néo-Zélandais Mike Moore et le Thaïlandais Supachai Panitchpakdi s'étaient partagé un mandat.
En réalité, il n'y a pas de règles ni officielles ni officieuses sur la nationalité du directeur de l'OMC. Pour les Européens, le supposé tournus en faveur du continent africain n'est que du vent. Dans le meilleur des cas, ils se disent favorables à une alternance entre un directeur d'un pays développé et d'un pays en développement.
Du côté africain, trois candidats sont déjà dans les starting-blocks. Il s'agit du Suisso-Egyptien Hamid Mamdouh, ancien haut fonctionnaire à l'OMC, du Nigérian Yonov Frederick Agah, actuellement l'un des quatre vice-directeurs de l'organisation, et du Béninois Eloi Laourou, ambassadeur auprès de l'ONU à Genève.
Désignation par élimination
A compter du 8 juin, tous les candidats auront un mois pour déposer leur dossier. A partir du 8 juillet, les 164 membres lanceront la procédure de désignation, non pas par une élection, mais un mécanisme consensuel qui fonctionne par élimination. Un groupe de travail mené par le président du Conseil général de l'OMC, l'ambassadeur néerlandais David Walker, consultera les Etats sur leurs préférences et déterminera les candidats ayant le plus de chances de réunir un consensus. Après cette phase, la troïka procédera par l'élimination progressive des candidats qui recueillent le moins d'adhésions. Si tout va bien, le nouveau directeur de l'OMC prendra ses fonctions le 1er septembre.
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